Seine-Saint-Denis : les retraités de la police au repos forcé ?

8049300_114005e2-5a31-11e9-af67-960d1b354b9f-1_1000x625Illustration. Les délégués à la cohésion police population interviennent souvent dans les établissements scolaires pour faire de la prévention ou auprès des élèves décrocheurs. LP/M.C.

Les délégués à la cohésion police population (DCPOP) ont été invités à ne pas travailler en avril faute de budget. Ce lundi soir, le ministère de l’Intérieur se veut rassurant. Mais l’inquiétude demeure sur le terrain.

Travailleront, travailleront pas ? Les délégués police population ont reçu pour consigne de ne pas travailler en avril pour des « raisons budgétaires ». Ce lundi soir, le ministère de l’Intérieur dément : « Il n’y a pas de problème budgétaire. Les délégués police population sont au cœur de la police de sécurité du quotidien, leur mission est essentielle et, évidemment, elle ne s’arrêtera pas. »

« Mais on n’est pas au courant ! Nous, on nous a demandé fin mars de ne pas travailler en avril, parce qu’il n’y a plus de budget ! » regrette Patrick Valade, délégué police population à Sevran depuis septembre. La nouvelle est arrivée par mail fin mars, expliquait avant lui un collègue qui préfère rester anonyme. Il a déjà prévenu tous ses interlocuteurs qu’il ne fallait pas compter sur lui en avril, et a annulé ses interventions au collège.

Retisser de la confiance dans les quartiers

C’est en Seine-Saint-Denis que le poste est né, au lendemain des émeutes de 2005. La ministre Michèle Alliot-Marie avait alors repris l’idée de chercheurs qui prônaient le recours aux retraités de la police, pour retisser sinon de la confiance, au moins un dialogue avec les habitants des quartiers.

En dix ans, le dispositif s’est étendu partout en France. L’Intérieur annonçait 151 postes en 2018, dont 85 affectés aux zones de sécurité prioritaires, à raison de 15 vacations par mois, payées entre 100 et 200 € brut selon le grade.

«Ils désamorcent les tensions »

Six mois après la mise en place des premiers quartiers de reconquête républicaine, sous les auspices de la nouvelle police de sécurité du quotidien, la possible mise au repos des délégués a fait grincer des dents. « C’est un gros problème, réagit un policier. Ces délégués font le lien, désamorcent des tensions, après une intervention compliquée, ils évitent que la pression monte ».

Avec le temps, la confiance s’installe. Beaucoup d’habitants ont leur portable et leur confient aussi des renseignements précieux. « Ils nous apportent un témoignage concret et réel », vante Redouane M’Hamdi, secrétaire 93 du syndicat des chefs d’établissements scolaires.

Indignation des maires

L’inquiétude fait des vagues chez les élus, qui craignent que la mission de leur délégué soit sur le fil. « C’est inadmissible, ce dispositif a fait ses preuves depuis dix ans ! » tempête Stéphane Blanchet maire (sans étiquette) de Sevran, qui craint que la chaise de son délégué reste vide au prochain conseil local de prévention de la délinquance.

« Depuis 2012, le ministère a pris la mauvaise habitude de ne plus payer leurs heures sup’ aux policiers. Maintenant on ne paye plus les DCPOP, c’est affligeant », renchérit Bruno Beschizza (LR). À Clichy-sous-Bois, le maire Olivier Klein (PS) s’est demandé si la ville pouvait prendre à sa charge les vacations d’avril.

Une question écrite au ministre

Le député Stéphane Testé, membre de LREM, a déjà saisi le ministère de l’Intérieur pour avoir des explications. Selon lui, « il y a eu un arrêt des vacations pour une histoire de crédits ». Il ajoute : « Quand j’ai posé la question il y a quelques jours, on m’a répondu que la DGPN (Direction générale de la police nationale) s’était engagée à ne pas toucher à cette enveloppe. Donc, pour moi, il n’y avait plus de sujet », explique-t-il.

En 2012, déjà, les délégués avaient été priés de rester au repos pendant l’été, avant un contre-ordre de dernière minute. L’inquiétude reste certaine. Le député (PC) Stéphane Peu a prévu de poser une question écrite au ministre, réclamant la « sanctuarisation du financement ».

Source : Le Parisien

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