Quand le sage montre la lune l’idiot regarde le doigt. Il se trouve que l’inverse est vrai aussi !

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Qui montre le virus, les déjantés qui décapitent ?

Inutile d’être un grand sage pour voir le doigt de l’idiot !

Respect pour la fonction, pas pour ceux qui l’ont exercé depuis Le Général De Gaulle.
J’entends beaucoup parler de satanistes ! Pourquoi dire soi-même quand d’autres disent mieux ou avant ?
Encore un conte, d’auteur anonyme !

Le diable 

Ti-jac sans peur revenait de guerre, sac à l’épaule, canne au poing, manteau fané, bottes trouées. Un soir venteux sur son chemin, merci Dieu, enfin un village. Maisons basses, fumiers bourbeux. Un chien vint lui gronder autour. Une vieille, devant sa porte, balayait quelques rats crevés. Elle râlait dur.

– Salut, grand-mère ! Y a-t-il une auberge où loger ?

– Une auberge, ici ? Ah, misère !

Elle ricana, torcha son nez. Elle lui désigna la colline. 

– Nous avons bien ce vieux château, mais il n’y fait pas bon dormir. Le diable y vient, à ce que l’on dit. Ceux qui ont risqué leur carcasse entre ses toiles d’araignées sont tous morts d’épouvante pâle. 

– Hé, qu’importe ma bonne mère ! Pourquoi crois-tu qu’on m’appelait, dans mon régiment, Ti-Jac sans peur ? J’y roupillerai comme un loir !

Il grimpa jusqu’à la bâtisse, il poussa le portail plaintif, fit sonner son pas sur les dalles d’une salle aux meubles moisis. Il faisait froid. Il alluma un grand feu dans la cheminée, s’y chauffa les pieds et les mains, puis sortit ses trois dés d’ivoire et se mit à jouer tout seul.

Il les lança sous la chandelle. Ils roulèrent. Un bras pâlichon tomba, badaboum, du plafond, de l’autre côté sur la table, un deuxième, puis deux jambes. Ti-Jac, rigolard, leva le nez.

– Hé, là-haut, merci pour les quilles ! Manque la boule, envoyez-la !

Une tête dégringola, rebondit sur les quatre membres. Tourbillon de pieds et de mains. Un petit bonhomme apparut, regard torve, barbe pointue, cheveux plantés en balai-brosse. C’était le diable. Il dit :

– Bonsoir.

– Salut à toi, répondit Ti-Jac. Grand merci pour la compagnie. Si nous jouions une partie ?

Il lui fit un clin d’œil canaille.

– Bien volontiers.

– À toi l’honneur.

Le diable agrippa les trois dés, souffla dessus, les fit rouler. Le premier tomba sous la table.

– Ramasse, dit le malotru.

– Fais-le toi-même, peau de bouc, je ne suis pas ton domestique !

Le diable recula sa chaise, il ronchonna, se baissa. Alors Ti-Jac empoigna sa canne, et à deux poings, coup droit, revers, il s’abattit sur le mauvais, sur son crâne, son dos, ses fesses.

– Tu croyais rouler Ti-Jac sans peur ? Que lui veux-tu à ce château ? Hé, pet de Dieu, avoue, sinon je te hache en purée de viande !

– Yayay ! pitié, je meurs, arrête, assez, drapeau blanc, je dis tout ! Suis-moi. Promets, ne tape plus !

Il s’en fut en trottant, trébuchant, le dos courbe, en tenant ses reins. Ti-Jac le suivit, le bâton haut. La cheminée. Au fond de l’âtre, un placard déguisé en mur. Ouverture. Des pièces d’or ruisselèrent en flot cliquetant jusqu’au beau milieu de la salle.

– C’est ma réserve, dit le diable. L’or me sert à pourrir les gens. Pour une poignée de ces pièces, ils me laissent prendre leur âme. La tienne, Ti-Jac ? Non, je n’en veux pas. Que veux-tu, je suis peu de chose. Mon seul pouvoir est d’effrayer. Là sont ma gloire et ma puissance. Qui me regarde sans effroi voit ce que je suis, rien de plus un petit bonhomme flapi, un monstre de papier, de pacotille. Prends ce que tu veux et va-t’en. Moi, salut, je vais me coucher.

Il s’en fut. L’ombre l’effaça. Ti-Jac emplit son sac à ras bord et s’en fit un bel oreiller.

Le lendemain de bon matin il remit sous ses pieds la route. Après douze jours de bon vent, la capitale du royaume lui vint devant. Le glas sonnait à tous les clochers de la ville. Il pleuvait des larmes partout. On sanglotait dans les mouchoirs, on voilait de deuil les façades, on s’agenouillait dans les rues, on appelait Dieu au secours. Ti-Jac s’informa.

– Qu’est-ce qui se passe ?

– La fille du roi, lui dit-on. Elle doit être livrée au diable. Une fois par an, c’est ainsi, une pucelle doit payer la tranquillité du pays. Cette année, malheur sur nos vies, c’est notre princesse Lison qui a tiré la paille courte. Regardez-la comme elle est belle ! Avec quel courage elle s’en va !

Une jeune fille pieds nus, couronne fleurie, robe blanche, entre deux haies de cris fêlés, de gémissements, de murmures, descendait la rue vers le fleuve où l’attendait le bateau noir. Ti-Jac accourut à son côté.

– Je vous accompagne, dit-il.

– Inutile, c’est sans espoir.

– Que nous importe, allons toujours !

Sur le rivage, plus personne, sauf le diable qui descendait la passerelle pour accueillir son beau cadeau. Il aperçut Ti-Jac.

– Aïe, malheur ! Encore toi ? Je suis maudit !

– Tout juste mon beau. Tu décampes, et tu ne reviens plus ici, sinon, je dis à tout le monde que tu n’es qu’un loup de papier !

– Ok, ok ! C’est d’accord, ne t’énerve pas.

Le diable hissa la voile en grande hâte. Retour triomphal au palais.

Le roi invita le sauveur de sa Lison à déjeuner.

– Ainsi, surprenant jeune homme, vous ne connaissez pas la peur.

– Non, Majesté. Je le regrette. J’aimerais bien la rencontrer pour voir quelle tête elle me fait.

– Attendez le dessert mon cher.

Fin du repas. Gateau-surprise.

– Découpez-le, mon bon ami, dit la princesse à son voisin.

Son voisin, c’était Ti-Jac, bien sûr. Comme il avançait le couteau, la montagne de chantilly, s’ouvrit soudain, deux oiseaux blancs en jaillirent et s’envolèrent au nez du sauveur ébahi. Il sursauta, cria : 

– Holà !

– Vous avez eu peur, dit le roi.

– J’avoue. Merci, c’est délicieux.

Inutile de vous le dire, Ti-Jac sans peur épousa Lison. Elle l’effraya de temps en temps. Mais l’amour seul parvint à faire ce que le diable n’avait pu.

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