Pour le major, l’égalité ne dépend pas d’un  » e  »

Vous ne verrez pas son visage. Elle n'aime pas ça et n'en a pas envie. Et elle vous reprendra également illico si vous féminisez son titre. Par principe. - Vous ne verrez pas son visage. Elle n'aime pas ça et n'en a pas envie. Et elle vous reprendra également illico si vous féminisez son titre. Par principe.

Vous ne verrez pas son visage. Elle n’aime pas ça et n’en a pas envie. Et elle vous reprendra également illico si vous féminisez son titre. Par principe.

Le major Vaquette ne s’en laisse pas conter. Même si la situation des femmes en gendarmerie a évolué, positivement, il y a encore à faire. Elle y veille.

 Après avoir frappé à la porte, on entre dans le bureau du major Vaquette. C’est écrit assez grand pour ne pas l’oublier. « Je ne féminise pas », lance ce petit bout de femme de 55 ans qui, depuis juin 2015, commande la brigade de proximité de Ballan-Miré, qui dépend de la communauté de brigades de Chambray-lès-Tours, dirigée par le lieutenant L’Hostis.

Dictionnaire Larousse et textes de l’Académie française comme juges de paix, elle ne veut pas croire que les « e » ici ou là soient indispensables. « Si on veut l’égalité, il ne faut pas féminiser », poursuit le major qui a, au fil de ses 28 ans de carrière, pu constater cependant de réelles améliorations au sein de la gendarmerie. Les femmes ont gagné du terrain… et la mentalité des hommes a évolué.

Le plafond de verre : «  Un faux problème  »

Pour cette fille de militaire, devenir gendarme a toujours été un objectif. Restait à éviter les chicanes. Et les quotas (lire ci-contre). Elle sera donc manutentionnaire, opératrice de saisie et femme de ménage dans une clinique psychiatrique avant de passer le concours et d’entrer à l’école, à Montluçon. En 1989, c’est la première affectation. En Mayenne. Une brigade rurale. Elle se souvient très bien des remarques goguenardes des agriculteurs du cru sur sa capacité à utiliser une arme.
L’examen d’officier de police judiciaire en poche (« J’affectionnais le judiciaire »), elle intègre une brigade de recherches. Deviendra aussi instructeur à l’école des sous-officiers de Libourne. « C’est important de faire passer son savoir et sa passion », explique encore celle qui commande désormais une équipe de onze personnes, parmi lesquelles quatre femmes. Là encore, elle veille toujours « au côté humain ».
De ses années d’expérience, le major Vaquette garde des anecdotes face à cette parité en marche. « C’était une minorité, certes, mais tout au long de ma carrière, j’ai connu des collègues masculins qui ne me le disaient pas ouvertement mais qui m’ont fait sentir que j’étais une femme, et donc pas capable de faire certaines choses. Ça m’a poussée à faire plus, et au bout d’un moment, c’est usant », confie la quinquagénaire au caractère pourtant bien trempé. Elle se souvient d’avoir, « une bonne dizaine de fois » désarmé des hommes munis de fusil, couteau ou autre arme de poing et avoir connu « toujours un petit moment de solitude » en constatant que son binôme homme était « soit assis dans le véhicule, soit resté sur le perron. »
Pas assez pour la décourager. Son métier, elle l’aime. Même s’il est chronophage, et parfois éprouvant. Un choix qu’elle a mené de front avec sa vie d’épouse et de maman. « On sait à quoi on s’engage, et on s’y tient. En l’occurrence, il faut avoir une bonne nounou ! »
Pour Marie-Laure Vaquette, le fameux « plafond de verre » qui empêcherait les femmes d’accéder à des fonctions identiques à celles des hommes serait un faux problème. Ce sont les femmes qui s’interdiraient trop souvent d’y prétendre…
Aujourd’hui, le major Vaquette, en fin de carrière, remercie « nos devancières, et pas qu’en gendarmerie d’ailleurs. Maintenant, c’est rentré dans les mœurs. Il est grand temps. Pour tout le monde. » Avec ou sans képi.

repères

> Au niveau national, la gendarmerie compte actuellement 18 % de femmes. Au groupement d’Indre-et-Loire, elles sont 117 sur 662, tous statuts confondus.
> Rappelons que jusqu’en 1983, les seuls militaires féminins de la gendarmerie étaient des personnels de soutien. Dès lors, le recrutement des sous-officiers de gendarmerie s’ouvre aux femmes. Mais avec des quotas. Ils seront supprimés en 1998.
> Fin 2014, le dernier verrou cède : trente gendarmes féminins sont affectés au sein des trois escadrons de gendarmerie mobile.
> En avril 2014, un plan d’action pour l’égalité professionnelle a été activé au sein de la gendarmerie.

Textes et photos : Vanina Le Gall

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *