L’OTAN prépare désormais une guerre totale de l’Europe contre la Russie… par Eric Verhaeghe

Le sommet de l’OTAN, qui s’est tenu hier à Madrid, a pris un certain nombre de décisions fondamentales que la presse subventionnée n’a pas absolument pas relayées, ou s’est contentée d’édulcorer pour les rendre acceptables par l’opinion. Pourtant, ce qui ressort de ce sommet auquel Emmanuel Macron a participé, c’est la préparation dès maintenant d’une guerre totale sur le sol européen contre la Russie. Combien de Français sont conscients de l’aventure dans laquelle la caste mondialisée et son multilatéralisme nous entraînent ?

Du sommet de l’OTAN, c’est tout juste si l’on a retenu qu’il se tenait à Madrid, et qu’il a validé l’adhésion (sous surveillance turque) de la Suède et de la Finlande. Et pour le reste, rien ou presque n’en a transpiré. 

Pourtant, des décisions bien plus importantes y ont été prises, qui, tôt ou tard, exposeront les Européens à un conflit direct, chaud, “de haute intensité”, c’est-à-dire destructeur et meurtrier, avec la Russie. Mais les Français ne s’intéressent guère à la question : ils sont tout entiers occupés à savoir qui va présider la Commission des Finances, avec le soutien de qui, et dans le dos de qui. 

On a les urgences que l’on peut. 

Une déclaration finale du sommet sans aucune ambiguïté

Pour comprendre l’insignifiance des préoccupations françaises, membre pour une durée désormais inconnue (tant la France est rabaissée) du Conseil Permanent de Sécurité, il suffit de lire la déclaration finale du sommet qui n’a suscité en France aucune réaction politique solide, ni même significative :

Dans un environnement de sécurité radicalement bouleversé, ce sommet représente un jalon important dans le renforcement de notre Alliance et l’accélération de son adaptation. (…)

La Fédération de Russie constitue la menace la plus importante et la plus directe pour la sécurité des Alliés et pour la paix et la stabilité dans la zone euro-atlantique. (…)

Nous avons redéfini les fondements de notre posture de dissuasion et de défense. L’OTAN continuera de protéger les populations de ses pays membres et de défendre chaque centimètre carré du territoire de l’Alliance, et ce en permanence. Forts de cette posture récemment améliorée, nous allons renforcer de manière significative notre dispositif de dissuasion et de défense sur le long terme pour assurer la sécurité et la défense de tous les Alliés. Nous le ferons suivant notre approche à 360 degrés, sur terre, dans les airs, en mer, dans le cyber et dans l’espace, afin de pouvoir contrer toutes les menaces et relever tous les défis. (…) Nous nous réjouissons des contributions initiales proposées par des Alliés pour le nouveau modèle de forces de l’OTAN, qui permettront de renforcer et de moderniser sa structure de forces et de faire en sorte que nos plans militaires de nouvelle génération soient pourvus de ressources. Nous allons améliorer nos exercices de défense collective pour nous préparer à des opérations multidomaines de haute intensité et garantir à tous les Alliés un renforcement sur court préavis. Toutes ces mesures renforceront considérablement le dispositif de dissuasion et les défenses avancées de l’OTAN. Elles aideront à éviter toute agression contre le territoire de l’OTAN en empêchant tout adversaire potentiel d’atteindre ses objectifs.

Combien de citoyens appartenant à des pays membres de l’OTAN, combien de Français, savent que l’alliance a décidé de se “renforcer” face à la Russie, en redéfinissant sa “posture de dissuasion et de défense”, ce qui passe par des “exercices de défense collective pour nous préparer à des opérations multidomaines de haute intensité” précisées comme étant “sur court préavis” ? Combien de citoyens ordinaires ont compris que ces expressions alambiquées signifient concrètement que nous nous préparons désormais à une guerre directe avec la Russie sur le sol européen ?

Et si l’on parlait de “notre dissuasion” ?

Autre point là encore passé totalement sous silence par la presse subventionnée : la redéfinition du “concept stratégique” de l’OTAN, c’est-à-dire du service rendu par l’OTAN à ses membres, et surtout des cas où l’OTAN invoque son article 5 (du traité de l’Atlantique Nord), celui qui permet de déclarer la guerre à un ennemi. 

Là encore, ce point fondamental est resté dans l’ombre, et nul organe de la presse subventionnée ne s’est senti obligé d’alerter l’opinion sur le point des décisions qui ont été prises à Madrid. Pourtant, le texte proposé au public est désormais sans ambiguïté :

Le Conseil de l’Atlantique Nord pourrait décider d’invoquer cet article en réponse à une attaque armée. Un acte isolé de cybermalveillance, une opération hostile menée en direction de l’espace, depuis l’espace ou dans l’espace, ou une série de tels actes ou opérations, ou une opération hybride visant les Alliés pourrait atteindre le seuil correspondant à une attaque armée et conduire le Conseil de l’Atlantique Nord à invoquer l’article 5. L’Alliance est fondée sur le lien qui unit durablement l’Europe et l’Amérique du Nord par-delà l’Atlantique. L’OTAN reste l’unique forum transatlantique, essentiel et indispensable, pour les consultations, la coordination et l’action sur toutes les questions touchant à la sécurité des Alliés.

Il n’est pas inutile de prendre le temps de lire ce paragraphe qui dit deux choses essentielles. 

En commençant par la fin, on comprend que “l’OTAN reste l’unique forum transatlantique” où se décide l’entrée en guerre contre un ennemi. Et comme l’OTAN est contrôlée par l’armée américaine, cette phrase rappelle que c’est l’armée américaine qui décide de déclarer la guerre sur le sol européen en impliquant des troupes européennes. 

En outre, on découvre désormais que cette guerre peut être déclarée non seulement pour riposter à une attaque armée ennemie, mais aussi à la suite d’un “acte isolé de cybermalveillance”. Là encore, combien d’Européens ont compris que les généraux américains pourraient décider d’affronter la Russie depuis la Pologne dans l’hypothèse où une cyberattaque bloquerait l’économie américaine, et qui serait attribué à la Russie ?

Qui a bien compris cela en France ? Qui a entendu que Paris pourrait être rasée par un missile russe ripostant à une attaque de l’OTAN décidée par des généraux américains selon qui la Russie bloquerait les ordinateurs de Wall Street ? 

Ceux qui se souviennent des armes de destruction massive irakiennes inventées de toutes pièces par la CIA devraient désormais se demander s’ils sont prêts à vivre la même expérience que Bagdad dans des conditions exactement identiques. 

La défense de la France livrée aux Américains

Dans les années 60, la France avait eu le courage de s’abstraire de cette terrible mécanique où des généraux américains décider de livrer une guerre “chaude”, de “haute intensité” dit-on maintenant, sur notre sol, au besoin sans nous consulter. Le temps a fait son oeuvre et, désormais, le pantin Macron peut non seulement décider seul d’accepter cette situation effrayante, mais il ne trouve sur sa route aucun député, aucun sénateur, aucun journaliste, pour l’interpeler sur sa décision. 

Cette solitude du pouvoir n’empêche pas l’OTAN de déclarer :

Grâce au lien et à l’engagement qui nous unissent, nous continuerons de sauvegarder la liberté et la sécurité de tous les pays de l’Alliance ainsi que nos valeurs démocratiques communes, maintenant et pour les générations futures.

Mais pourquoi avons-nous un doute sur la sincérité de cette phrase ?

Source : Le Courrier des stratèges

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