L’été chaud des gendarmes du Golfe de Saint-Tropez

« Aujourd’hui on cible les vendeurs de beignets », briefe l’adjudant-chef Didier Aleins à la gendarmerie de Saint-Tropez, avant d’envoyer la moitié de sa brigade à l’assaut de la plage de Pampelonne.

Le golfe de Saint-Tropez attire chaque été richissimes estivants et nuées de touristes ordinaires, scrutés avec convoitise par les vendeurs à la sauvette, escrocs et délinquants accourant dans leur sillage. Le travail des gendarmes s’avère intense et multiforme.

Des gendarmes déguisés en vacanciers lambda sont partis en repérage, une heure auparavant, des deux extrémités de la célèbre plage de Pampelonne, sans importuner les nudistes dorés à point. L’adjudant-chef Aleins et ses hommes n’ont plus qu’à escorter quatre vendeurs de beignets et glaces.

Les saisonniers, protégés par leur contrat de travail, suivent docilement les uniformes bleus en slalomant entre les serviettes. « Si vous acceptez la destruction des marchandises, vous ne serez pas inquiétés », précise Didier Aleins, sur un ton bienveillant.

Les vendeurs goguenards demandent la permission de manger une glace avant le massacre à l’eau de javel. Tous travaillent pour un entrepreneur de Cannes qui vend chaque été sans autorisation ses denrées sur les plages de la Côte d’Azur, malgré 17 procédures judiciaires…

La « marche des gendarmes », tube siffloté du film « Le gendarme de Saint-Tropez » tourné localement voici cinquante ans avec une mémorable scène de chasse aux nudistes sur la plage de Pampelonne, retentit sur le portable de l’adjudant-chef. « On est là, on va pas mettre les Ch’tis! », assume avec humour ce Toulonnais qui a fait le tour de France avant d’être muté à Saint-Tropez.

« Au niveau de la carte de visite et de la carrière, ce n’est pas rien, c’est connu dans le monde entier », confie cet amateur de la série culte des aventures du colérique gendarme incarné par Louis de Funès, dont la statuette trône à la buvette de la gendarmerie.

 

– Chasse au serval –

 

Au delà du folklore, « c’est énormément de travail », précise-t-il, en soulignant le caractère atypique de la zone. L’été précédent, les gendarmes avaient dû attraper avec une perche un serval (gros félin) de 18 kilos, échappé d’une luxueuse propriété louée par des Russes.

« Une grande adaptabilité et disponibilité sont les maîtres mots sur le Golfe de Saint-Tropez », résume l’énergique capitaine Marianne Richard, officier adjoint d’un vaste groupement de gendarmerie de l’est du Var, composé de 5 brigades (136 gendarmes) dont celle de Saint-Tropez.

Pour l’été, quelque 65 gendarmes mobiles de l’escadron de Dijon sont venus en renfort. « C’est très différent des quartiers sensibles », confie l’un d’eux, « peu habitué à l’exposition de tant de richesse » et ahuri par « l’imprudence des touristes ».

En journée, c’est un festival de vols dans les parkings et sur les plages, une série noire d’accidents de deux roues. La nuit, les gendarmes encadrent des bagarres de fêtards alcoolisés sortant des bars et discothèques côtiers. Sans compter cette nouvelle enquête sur la mort suspecte d’une sexagénaire à son domicile de l’arrière-pays…

Au QG du groupement, Marianne Richard consulte le bilan de la nuit: un vol et un incident alcoolisé avec outrage à agent à Saint-Tropez, un rôdeur suspect à Sainte-Maxime, une bagarre de sortie de discothèque à Port Grimaud, mais aussi un cambriolage, un accident de la route, un incendie de véhicule…

Les rangs des délinquants locaux, présents toute l’année, sont étoffés par des malfaiteurs venus de Nice, Marseille, de la région parisienne, d’Italie ou d’Espagne.

Quatre Italiens soupçonnés d’avoir volé plusieurs montres de luxe ont déjà été interpellés cet été. Une centaine de cambriolages – dans les villas de luxe tout comme dans les campings – ont été commis en juillet dans la région, chiffre toutefois en baisse de 30%. Deux véhicules électriques, permettant des approches silencieuses, sont donc testés depuis peu à Saint-Tropez.

Dans le Golfe de Saint-Tropez, il faut aussi tout simplement « montrer du bleu », pour dissuader les délinquants et atténuer le sentiment d’insécurité, souligne la capitaine Richard. En ce mois d’août dévolu au farniente, le groupement de gendarmerie ne connaît pas une minute de répit.

Source : Le Point

 

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