Eric Ciotti : «Les suicides dans la police ne sont pas une fatalité»

Depuis le début de l’année, 48 policiers se sont donné la mort. Face à ce drame humain, le député LR appelle à «réarmer l’Etat», dans une tribune au Parisien.

YZ4IFCDD7T63BY6NS4FKAFUTAY«En rejetant ma proposition de loi, qui prévoyait d’investir 15 milliards d’euros sur six ans, la majorité a démontré qu’elle préférait la communication à l’action.» LP/Illustration/Elene Usdin

Éric Ciotti, député LR des Alpes-Maritimes

« Nos policiers meurent en silence, et ce silence les tue une seconde fois. Outragées, insultées, agressées et humiliées, nos forces de l’ordre subissent une violence quotidienne qui les pousse pour certains jusqu’au suicide. Les chiffres sont effrayants : 48 policiers se sont donné la mort depuis janvier 2019. C’est déjà dix de plus que sur la totalité de l’année 2018. Du jamais-vu. L’explosion de l’insécurité, la menace terroriste maximale mais aussi les locaux délabrés, les procédures qui se multiplient et les conditions de travail éprouvantes ont fait bondir ce taux de suicide, déjà supérieur de 36 % à celui de la population.

Bien sûr, chaque situation est singulière. De nombreux facteurs expliquent un geste de désespoir. Mais ne fermons pas les yeux sur le malaise extraordinaire qui étreint ces hommes et ces femmes dont le rythme de travail harassant casse bien souvent leur vie familiale. Je le dis avec force : le suicide dans la police ne doit jamais devenir un des risques du métier.

Cessons de banaliser les agressions qui défraient la chronique le temps d’une valse médiatique et dont la gravité s’accentue jusqu’à l’extrême. Chacun se souvient des scènes de guérilla urbaine intolérables où des black blocs se retrouvent en ordre de bataille pour casser du flic. On ne contente plus de taper : on veut tuer désormais. Mais par quel processus mortifère d’amnésie collective sommes-nous passés des scènes de liesse de janvier 2015 — où des inconnus embrassaient des policiers pour les remercier de leur intervention lors des attentats islamistes de Charlie Hebdo —, au slogan ignoble Suicidez-vous clamé par des voyous un funeste samedi de printemps?

Face à ce constat terrible, il n’y a qu’un seul mot d’ordre : respect et reconnaissance pour nos forces de l’ordre qui œuvrent sans relâche. Contre la brutalité envers les policiers, seule la fermeté permettra d’inverser la tendance. Dans cette tâche indispensable, le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, débordé, a failli lamentablement. Pis, il a ajouté à son inefficacité et son incompétence du mépris indigne. Alors que l’Etat doit aux policiers 23 millions d’heures supplémentaires, leur ministre de tutelle m’a affirmé droit dans les yeux, lors d’une visite à Nice, qu’il ne leur devait rien. Les familles et les proches des policiers apprécieront, tout comme elles avaient peu goûté l’absurdité d’une circulaire qui incitait les policiers à organiser des barbecues pour empêcher les suicides.

C’est le même Christophe Castaner qui estime que la prison n’est pas toujours la solution pour ceux qui attaquent les policiers. Je pense au contraire qu’il faut rendre l’uniforme de la République inviolable. Pour cela, j’ai proposé à de nombreuses reprises à l’Assemblée nationale que les sanctions soient automatiques et les peines plus sévères contre ceux qui agressent ceux qui nous protègent. Sans cela, c’est toute la force dissuasive de la loi qui est affaiblie. Les hommages ne suffisent plus : il faut réarmer l’Etat. En juin dernier, en rejetant ma proposition de loi de programmation pour la sécurité intérieure qui prévoyait d’investir 15 milliards d’euros sur six ans, la majorité a démontré qu’elle préférait la communication à l’action. L’état critique de l’immobilier et des équipements vétustes joue pourtant un rôle évident sur le bien-être des personnels et sur les risques psychosociaux. Ne pas s’y attaquer est criminel. »

 

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