Police. Des épouses en colère

les-femmes-de-policiers-manifesteront-ce-samedi-a-paris_3952408 Les femmes de policiers manifesteront ce samedi , à Paris, pour exprimer le mal-être de leur époux dans leur profession .

Laure (*), épouse d’un policier finistérien retiré du service en raison d’un état de stress post-traumatique, participe ce samedi, à Paris, à la manifestation organisée par le mouvement Femmes des forces de l’ordre en colère (FFOC).

 

Comment ce mouvement des Femmes des forces de l’ordre en colère est-il né ?

 

Il a vu le jour sous la forme d’une page Facebook ouverte par l’épouse d’un CRS, en février 2017, au moment de l’affaire Théo. Des politiques, des artistes et quantité de gens accusaient alors la police avant même les premières conclusions de l’enquête. Aujourd’hui, elle compte environ 12 000 conjointes de policiers, gendarmes, pompiers et des métiers d’uniformes, dont 130 en Bretagne. C’est aussi une association apolitique et asyndicale qui revendique 500 adhérents et qui entend s’exprimer au nom de nos époux, interdits de grèves et de manifestations.
Vous-même, qu’est ce qui vous a poussé à le rejoindre ?

La situation de mon mari, policier dans le Finistère, je ne précise pas l’endroit volontairement. Il est arrêté depuis plusieurs mois. Pendant de longues semaines, je l’ai vu passer par des phases d’épuisement, de stress intense, de cauchemars, jusqu’à ce qu’il exprime très clairement des pulsions suicidaires. Je peux vous dire que quand votre conjoint vous dit ça par téléphone, on pense automatiquement au fait qu’il a une arme de service. Après examens, on lui a diagnostiqué un état de stress post-traumatique lié à sa profession.
Qu’est-ce qui, selon vous, a provoqué cet état ?

Il y a plusieurs facteurs dont il m’a parlé avant de s’en ouvrir à ses collègues et à sa hiérarchie, car c’est un milieu où on ne veut pas montrer ses faiblesses. Déjà, son quotidien d’officier de police judiciaire l’amène à traiter d’affaires sordides, des agressions de mineurs, des morts, une violence presque quotidienne qu’il banalisait… On me rétorquera qu’il a signé, qu’il a choisi mais c’est oublier que ce sont des êtres humains. Ensuite, il y a la charge de travail, la complexification des procédures et puis, parfois, ce sentiment d’inutilité devant la réponse judiciaire.
Pourtant, on imagine des conditions moins difficiles en province et plus particulièrement en Bretagne ?

C’est un leurre. Oui, comme beaucoup il a commencé sa carrière en Ile-de- France où il a connu une plus grosse pression. Mais même ici, c’est de pire en pire. Je ne parle pas uniquement de ce qu’il subit mais des conséquences sur nos vies, la mienne et celle de nos enfants. Ce n’est plus tenable. Alors qu’on est dans une toute petite commune, on doit vivre avec les menaces !
À quelles menaces faites-vous allusion ?

Imaginez ce que c’est que d’entendre un homme que vous avez interpellé vous dire le nom de la commune où vous vivez et le nombre de vos enfants ! J’ai un autre fait : ce jour où dans un magasin de Quimper, où nous n’habitons pourtant pas, mon mari m’a demandé de quitter précipitamment les lieux avec les enfants après avoir reconnu l’un de ses « clients », comme il dit, réputé pour sa violence.
Cette manifestation, qu’en attendez-vous ?

Dans un premier lieu, d’affirmer que je suis fière d’être la femme d’un policier. Nous ne sommes pas dans l’inconstance comme ces gens qui applaudissent la police le lundi, après un fait vu dans les médias, et l’insulte deux jours plus tard, lors d’un contrôle routier, oubliant qu’ils sont prêts à donner leur vie. Cette action, on espère aussi qu’elle permettra de donner un coup de pied dans la fourmilière et de permettre à notre présidente de se faire entendre auprès du ministère de l’Intérieur. Il a les mêmes chiffres que nous : dans la police, le taux de suicide est trois fois plus important que dans le reste de la population.

* Prénom modifié

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