Inceste : la décision du tribunal de Saint-Malo fait polémique

Le 5 septembre dernier, un père de famille a été jugé pour « atteinte sexuelle incestueuse » sur fille de 4 ans par le tribunal correctionnel de Saint-Malo.
Le 5 septembre dernier, un père de famille a été jugé pour « atteinte sexuelle incestueuse » sur fille de 4 ans par le tribunal correctionnel de Saint-Malo. | OUEST-FRANCE
Dans une affaire d’inceste où la victime n’avait que 4 ans, le parquet a retenu « l’atteinte sexuelle » plutôt que « l’agression sexuelle ». Une décision qui provoque un tollé sur les réseaux sociaux, car certaines associations contre l’inceste estiment que cela sous-entend un consentement de la victime. Décryptage.

Le 5 septembre dernier, un père de 37 ans a été condamné pour atteinte sexuelle incestueuse par le tribunal correctionnel de Saint-Malo. En 2017, il a forcé sa fille de 4 ans à lui toucher les parties intimes, alors qu’il avait consommé de l’alcool. Le père a reconnu les faits et a présenté ses excuses à l’audience. La mère, partie civile, demandait simplement un euro symbolique.

Le père était aussi poursuivi pour délaissement : parfois, il la laissait seule chez lui et oubliait de lui donner à manger, mettant en danger l’enfant. Le tribunal l’a condamné à huit mois de prison avec sursis et à une mise à l’épreuve pendant deux ans, avec obligation de soins. Il est également inscrit au fichier des auteurs d’infractions sexuelles.

Un tollé sur les réseaux sociaux

Depuis le week-end dernier, la polémique enfle sur les réseaux sociaux, autour de la notion d’atteinte sexuelle. « Une fille de 4 ans considérée comme « consentante »», déplore ainsi l’Association Internationale des Victimes de l’inceste (Aivi).

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« En retenant l’atteinte sexuelle, le tribunal considère qu’il n’y avait pas eu de violence, de contrainte, de menace ou de surprise, comme c’est le cas pour une agression sexuelle. Cela sous-entend un consentement de la victime et qu’elle l’a fait de son plein gré, explique Isabelle Aubry, victime d’inceste, présidente de l’Association internationale des victimes de l’inceste et auteure du livre La première fois, j’avais six ans ?. Elle n’avait que 4 ans, c’est fou ! Nous demandons un non-consentement automatique pour les mineurs. »

Valérie Boyer, députée LR des Bouches-du-Rhône, critique, elle, « une décision de justice profondément choquante qui ne reconnaît pas la souffrance de la très jeune victime ».

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« Honte à la justice », écrit l’association féministe Osez le féminisme.

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Pourquoi le parquet de Saint-Malo a retenu l’atteinte sexuelle

« C’est de l’extrapolation d’associations, en aucun cas le parquet a estimé que la fillette était consentante. Les faits auraient pu être requalifiés en agression sexuelle, reconnaît la procureure Christine Le Crom, mais il s’agit d’un geste unique du père alcoolisé, qui ne s’est pas reproduit. La peine aurait été la même s’il avait été poursuivi pour agression sexuelle. » La procureure rajoute : « Une loi de mars 2018 précise que le jeune âge suffit à prouver qu’il y a contrainte et surprise. » L’avocate de la victime, Me Caroline Verdier, aurait « préféré que l’agression soit retenue, mais cela ne change rien. Bien évidemment, la victime n’était pas consentante, il n’y a pas d’ambiguïté. »

Âge minimal pour le consentement sexuel : que dit la loi ?

En février 2018, un procès s’ouvre à Pontoise où un homme de 28 ans est jugé pour atteinte sexuelle sur une enfant de 11 ans, plutôt que pour viol, estimant que la relation était consentie. Face à la polémique que suscite l’affaire, la secrétaire d’État à l’Égalité femme-homme Marlène Schiappa, via la loi qui porte son nom, a modifié certains points du Code pénal pour considérer que la surprise ou la contrainte n’ont plus à être démontrées pour les mineurs dans certaines situations.

Néanmoins, ni la loi ni la décision ne fixent un âge de référence, au grand regret des associations. Seule la jurisprudence estime que jusqu’à l’âge de 5 ans, les enfants sont « incapables de réaliser la nature et la gravité des actes qui leur étaient imposés ».

Source : Ouest-France

Note de la rédaction de Profession-Gendarme :

Quelques définitions :

Atteinte sexuelle – Délit –  En France, l’atteinte sexuelle sur mineur est une infraction prohibant et réprimant les relations sexuelles, y compris consenties, entre un majeur et un mineur sexuel. Cet acte est considéré comme un délit. L’atteinte sexuelle se compose de tout agissement en rapport avec l’activité sexuelle.

Agression sexuelle – Crime – Une agression sexuelle désigne tout acte de nature sexuelle, non consenti, imposé par une contrainte physique ou psychologique, et considéré comme un crime dans la plupart des pays.

Article 222-22 du Code Pénal: « Toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise est une agression sexuelle » Ainsi : – Imposer à l’autre de voir une scène ou un comportement à caractère sexuel (exhibitionnisme, visionnage de films pornographiques…)

 

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