« On n’ose même plus dire qu’il est policier » : elle raconte le quotidien éprouvant de son mari

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Anne, 40 ans, femme d’un fonctionnaire à Caen (Calvados), connaît bien le quotidien de ces policiers qui participent, mercredi 2 octobre, à une Marche de la colère à Paris. Week-ends qui sautent, dénigrement, idées désespérées… Elle raconte les répercussions d’un métier sous pression sur leur vie de famille.

La vie de famille

« Mon mari assure des missions de police-secours. Même quand ils ont des jours de repos prévus, les policiers de Caen sont souvent rappelés. Pour l’anniversaire de notre garçon, on avait préparé une soirée avec tout le monde, on avait fait à manger. Deux jours avant, il a été rappelé pour travailler ce samedi-là. On l’a fêté sans lui.

C’est souvent comme ça, quand on essaie de planifier quelque chose en famille. Il a parfois l’impression de ne pas voir grandir ses enfants.

Des gens nous disent : pourquoi il ne dit pas non ? Mais il sait que ses collègues ne sont pas assez nombreux et il préfère être auprès d’eux, même s’il s’en prend plein la gueule. »

L’image de la police

« On n’ose même plus dire qu’il est policier, ni moi ni les enfants. Parce que les réactions sont toujours très virulentes, lors de discussions avec des amis ou même en famille. Il y a cette idée du policier qui vient casser du Gilet jaune. Avant, il était CRS, et on ressentait déjà ce dénigrement. Ça s’est aggravé avec les Gilets jaunes. Au début, on a essayé d’expliquer que la police n’est pas là pour empêcher de manifester. Mais ça aboutissait à des dialogues de sourds, on a préféré ne plus aborder le sujet. »

Le désespoir

« Il y a une période où il m’a fait très très peur. On n’était pas loin du burn-out. Je lui ai dit : démissionne. Il a eu un arrêt de travail, le médecin lui a dit de prendre le temps de réfléchir.

Il a repris mais c’est là qu’on a décidé de parler davantage, entre nous deux, des choses difficiles qu’il vivait. J’ai préféré essayer de jouer ce rôle d’écoutante car je sais qu’il aurait eu du mal à parler à quelqu’un d’autre.

Ce qu’il me raconte ? Les accidents et les corps en bouillie. Les appartements où il découvre une personne décédée depuis longtemps. Ou encore cette fois où il s’est retrouvé coincé avec un coéquipier face à une vingtaine de mecs, car l’autre patrouille était déjà prise.

Finalement, je m’imaginais des choses encore pires. Mais son métier, c’est côtoyer la mort, le chagrin, la violence sociale. »

Le soutien des proches

« S’il n’avait pas eu sa famille, il me dit qu’il ne sait pas comment il aurait pu remonter à la surface, quand il était proche du burn-out. Pour l’instant, ça va. Mais il n’est jamais totalement serein, il repense à des choses, quand il rentre chez lui.

Quand on a un policier dans la famille, on a finalement l’impression que la police est toujours dans la maison. »

Des moyens

« Les policiers ne sont pas assez nombreux, n’ont pas de moyens suffisants. Parfois, ils ne sont que deux patrouilles pour dix-huit communes à gérer ! On les sollicite de plus en plus, les ordres ne sont pas forcément cohérents. Ils ont à la fois la pression dans la rue et par leur hiérarchie.

C’est pour ça que je me suis investie dans l’Association des femmes de forces de l’ordre en colère. Moi, ce métier, je dis qu’ils sont super courageux de le faire. »

Source : Ouest-France

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