Emmanuel Macron, l’ivresse des cimes et les « discours coupables »

Macron-avion

Voici que, comme le souverain pontife qui se met fréquemment à raconter n’importe quoi sitôt qu’il est en avion, saisi par quelque ivresse des cimes, le président de notre Présipauté, s’en revenant d’être allé imiter Chirac à Jérusalem, fut saisi du même mal.

Celui, déjà, de cette mode des fausses confidences des hommes politiques où l’on feint d’être naturel et où tout est calculé.

Celui, ensuite, de proférer un nombre important de paroles éminemment contestables voire parfaitement stupides, et d’autres carrément graves.

Passons sur l’habituel couplet d’autoflagellation comparant grosso modo la Shoah et la guerre d’Algerie: que ne ferait-on pour glaner quelques voix communautaristes…

La ficelle, même bien enrobée dans une herméneutique de pacotille, ne tient pas la route et cette compétition mémorielle n’est pas une nouveauté dans le kougloff intellectuel qui tient lieu de pensée au macronisme.

En revanche, des paroles particulièrement hallucinantes ont été tenues, au sujet de la fronde sociale, dont la nuit passée a offert un si beau visage, avec ses multiples marches aux flambeaux, dignes, joyeuses, chaleureuses, sans violences (et c’est bien sans doute cela qui dérange le plus le pouvoir).

En effet, Emmanuel Macron a affirmé qu’en opposition politique démocratique, on avait « l’interdiction de la haine ».

Hier, dans mon article chez Atlantico, je mettais en garde contre le fait que le vrai but avéré de la redoutable loi Avia était, au-delà de favoriser le minoritarisme militant, de museler, à terme, l’opposition sociale et politique que l’on assimilerait promptement à de la « haine » que l’on criminaliserait peu à peu, en soi, en tant que sentiment coupable.

Il n’aura pas fallu attendre un jour pour obtenir la confirmation du bien-fondé de cette analyse.

Emmanuel Macron évidemment se trompe, à dessein, puisqu’il s’agit là de mettre en place une rhétorique et un processus profondément anti-démocratique : en démocratie, comme n’importe où, on a parfaitement le droit d’avoir la haine, de haïr un homme politique, un légume vert, une chanson, une odeur, une saison, un sport, un style vestimentaire et même une religion qui nous sortirait par les trous de nez. La haine est un sentiment, une opinion, et elle est particulièrement répandue voire indispensable dialectiquement et précisément en politique, et particulièrement quand on a affaire à un pouvoir sourd et aveugle qui avance tel un Panzer en mode Blitzkrieg.

Emmanuel Macron s’en est pris à ceux qui tiennent des « discours politiques extraordinairement coupables ». Coupables, le mot est lâché.

Tout dans cette phrase est grave : criminalisation de la pensée, criminalisation de la liberté d’expression, criminalisation de l’opposition politique.

Et s’il se trouve de nombreuses personnes qui considèrent que, certes, nous ne sommes pas encore en dictature mais plus tout à fait en démocratie, il va bien falloir finir par les entendre et les écouter.

Sauf à mettre plus de la moitié du pays à la Bastille avec un oeil en moins.

Source : Vue du Droit

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