Drogue au volant: plus de salive pour des contrôles plus rapides

Des gendarmes pratiquent un contrôle routier le 4 décembre 2014 à Bonnières-sur-Seine (Yvelines)
Des gendarmes pratiquent un contrôle routier le 4 décembre 2014 à Bonnières-sur-Seine (Yvelines) © AFP – Lionel Bonaventure

« Vos papiers… et votre salive s’il vous plaît »: gendarmes et policiers ont expérimenté jeudi et vendredi deux nouvelles méthodes de prélèvement salivaire, moins « chronophages » qu’une prise de sang, pour intensifier la lutte contre la consommation de drogues au volant.

Le testeur, un bâtonnet plat glissé pendant trente secondes sous la langue, est formel. Trait rouge: présence de cannabis. « Comme 9 dépistages positifs sur 10 », souligne le gendarme Aurélien Page, qui participait jeudi à l’opération menée sur trois points de contrôle autour de Bonnières-sur-Seine (Yvelines).

« Normalement, après 8 ou 10 heures, c’est passé, c’est comme l’alcool », peste un jeune conducteur, bientôt 21 ans, les cheveux noirs redressés par un gel généreux.

Il reconnaît avoir « fumé du cannabis lors d’une soirée entre amis hier soir », mais ne s’est pas « posé la question » au moment de prendre le volant le lendemain après-midi. « Je ne conduis jamais juste après avoir fumé. Hier, c’est un copain qui m’a ramené », tient-il à préciser.

Un test de détection salivaire de la consommation de drogues utilisé lors d'une opération de gendarmerie à Bonnières-sur-Seine, le 4 décembre 2014 © Lionel Bonaventure AFP

En temps normal, le jeune homme aurait gagné un court séjour à l’hôpital de Mantes-la-Jolie, situé à 15 km, pour confirmer ce dépistage par une prise de sang et un examen médical. « Là-bas, on n’est pas prioritaire, car ce n’est pas une urgence », explique Christophe Greneche, commandant de l’escadron de sécurité routière des Yvelines. « On y passe trois heures, quatre heures, parfois plus. Pendant ce temps, on n’est plus disponible s’il survient un accident important. »

Cette étape coûteuse et « chronophage », M. Greneche espère la supprimer grâce à ces deux nouvelles méthodes de prélèvement salivaire réalisées sur place et en cours d’expérimentation par les forces de l’ordre.

– « Augmentation automatique » des contrôles –

Dans la première, la seringue laisse place à une brosse venant frotter l’intérieur de la joue du jeune contrevenant, qui s’est porté volontaire. « C’est là que se trouvent les cellules épithéliales, où vient se fixer le THC », le principe actif du cannabis, explique le commandant Olivier Le Roux, directeur du Centre de recherche, d’expertise et d’appui logistique (Creal), basé au Chesnay (Yvelines).

L’autre procédé, similaire au dépistage en vigueur, vise à recueillir de la salive. Il pourrait être plus efficace pour déceler « la cocaïne et les amphétamines », indique M. Le Roux.

Pour les besoins de l’expérimentation et le respect de la procédure, un médecin de Versailles a été dépêché sur place pour réaliser, au préalable, la traditionnelle prise de sang.

Charge ensuite aux blouses blanches de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN), à Rosny-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), d’analyser et de comparer les échantillons. L’objectif: prouver que la salive est aussi fiable que le sang et ainsi s’épargner la case piqûre à l’hôpital.

« Les études scientifiques ont montré qu’on retrouvait dans la salive les mêmes éléments que ceux qu’on pouvait retrouver dans le sang », assure François Heulard, responsable physique-chimie à l’IRCGN.

« On a développé une méthode qui permet d’atteindre des seuils de sensibilité extrêmement bas », ajoute-t-il. Et prévient les petits malins « qui mettraient des produits masquants dans la bouche »: « on doit pouvoir adapter les modalités de prélèvement pour se prémunir de toutes les tricheries ».

Une seconde opération de contrôle a été menée à Paris vendredi soir, place de la Bastille. Ces tests seront menés jusqu’au 1er juin 2015 dans huit autres départements: Alpes-Maritimes, Dordogne, Gironde, Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique, Moselle, Nord et Haute-Savoie.

Une fois généralisé, après modification du code de la route, ce nouveau protocole permettra une « augmentation automatique » des contrôles de stupéfiants sur les automobilistes, affirme le lieutenant-colonel Philippe Bartolo, de l’Unité de coordination de lutte contre l’insécurité routière (Uclir).

En 2013, « près de 11 millions de tests d’alcoolémie ont été réalisés, contre seulement 144.000 contrôles de stupéfiants, dont 48.000 positifs », rappelle-t-il. « On a encore d’énormes marges de progrès », prenant en exemple la Belgique et l’Espagne qui ont déjà mené ces expérimentations.

Source : Le Point

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *