Des crachats et d’Eric Zemmour…

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Tous les crachats ne se valent pas et certains suscitent plus d’indignation que d’autres qui peuvent être grossiers mais n’offensent pas.

Il y a des hommes qui crachent en marchant sur les trottoirs, on ne sait pas pourquoi.

Il y a des footballeurs qui assez régulièrement crachent sur le terrain ou quand ils en sortent. C’est une habitude assez répugnante mais je me demande si elle est liée à un besoin physique. Un jour j’aimerais pouvoir demander à Kylian Mbappé la raison de ce geste.

Ce sont, les uns et les autres, des crachats qui n’induisent qu’un rapport avec soi.

Rien à voir avec le crachat ignominieux qui a visé Eric Zemmour le 30 avril et dont l’auteur s’est vanté par la suite sur les réseaux sociaux, se félicitant de ce « mollard » et des insultes qu’il avait proférées (Valeurs actuelles).

Eric Zemmour n’a pas déposé plainte mais son intervention n’était pas nécessaire. Le parquet de Paris a tout de même ordonné – le 2 mai pour des faits du 30 avril – une enquête pour violences et menaces à l’encontre de cet individu à l’identité facilement vérifiable et convaincu d’infractions au demeurant revendiquées.

Au sujet d’Eric Zemmour, un petit miracle français s’est tout de même produit. S’il n’a pas eu droit à un communiqué de l’Elysée – le président l’a cependant appelé au téléphone le 1er mai vers 20 heures – – ou à une dénonciation de Christophe Castaner, il peut se targuer, victime, d’avoir favorisé un consensus extraordinaire.

Je ne parle pas des protestations des honnêtes gens qui, amis ou non, ont condamné l’acte inqualifiable qu’il a subi et qui a été suivi par le narcissisme provocateur du transgresseur. Tout étonné de n’être un héros pour personne, il a rendu un hommage pervers à Eric Zemmour en justifiant ses saletés par le fait que ce dernier était « trop fort ».

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Denis Olivennes, Raphaël Enthoven, Bruno Retailleau et Caroline Fourest notamment ont usé des mots qui convenaient pour soutenir Zemmour. Rien d’étonnant de leur part qu’une forme de morale et le souci de la liberté d’expression ont toujours animé. Leur soutien, ne valant pas approbation de ses convictions, est d’autant plus appréciable que, contrairement à d’autres qui ont suivi le mouvement, ils n’ont jamais poussé, à force d’intolérance et de stigmatisation de Zemmour, des malfaisants à s’en prendre à lui.

Mais la bienheureuse surprise est venue de la LICRA qui a enfin saisi qu’elle avait le droit aussi de se préoccuper des victimes qui n’étaient pas de gauche, immigrées, sans papiers ou prétendument molestées par la police. Ce serait formidable si elle pouvait continuer cet élan d’éthique et de défense universelles et équitables.

Je n’oublie pas Marlène Schiappa qui avec justesse et délicatesse a soutenu Eric Zemmour. On pense ce qu’on veut de sa politique mais son humanité n’est pas hémiplégique.

Sur Twitter, et c’est déplorable, on ne se débarrasse pas aisément de la tentation du cloaque : il y a eu quelques réactions indignes sur mon compte auxquelles j’ai répondu à ma manière. En gros c’était bien fait pour Zemmour et ce n’était pas grave !

Double honte pour ce personnage qui a insulté et craché : on commet des infractions puis on les exhibe sur les réseaux sociaux. L’influence de ceux-ci ne devient nauséabonde qu’à cause de ce genre de misérable qui s’en sert parce qu’il est trop bête, trop abject pour mesurer qu’on n’a qu’une chose à faire après avoir ainsi transgressé : se terrer, s’effacer.

J’espère vraiment que la gloire judiciaire, par sa condamnation, viendra s’ajouter à sa gloriole indécente de quelques heures. Il est un représentant des plus médiocres de cette mode du crachat qui salit celui qui en use et pallie l’incurie de la pensée, la pauvreté du verbe et fait fi de la civilité française, pour ce qu’il en reste.

Pour certains, le crachat est devenu leur identité salivaire, la démonstration qu’ils se permettent tout, alors que les mots les laissent désarmés.

Je ne souhaite pas que la France se mue en espace de la barbarie du crachat.

Mais une image m’obsède et on sait que je n’ai jamais abusé des comparaisons avec des périodes atroces de notre Histoire. Avoir vu Eric Zemmour dans cette rue, seul, le dos courbé, tenant ses sacs de courses, non pas craintif mais le regard inquiet, pressé de rentrer chez lui, poursuivi par cette haine et ces éructations, m’a fait songer à des horreurs anciennes.

Faut-il que je les précise ?

Source : Philippe Bilger

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