À Montcornet, Macron honore de Gaulle et célèbre «l’esprit français»

Devant une poignée d’invités dont Xavier Bertrand, le président de la République a prononcé un discours aux accents très politiques. Il a rappelé que la France n’est forte que lorsqu’elle est unie.

Une première pour un président sous la Ve République. Et une première pour le chef de l’État depuis le début de la crise sanitaire. Dimanche, Emmanuel Macron a fait une parenthèse dans la gestion de l’épidémie de coronavirus pour se rendre à Montcornet (Aisne). C’est depuis ce minuscule bourg d’à peine 5km², niché sur une colline au confluent de la Serre et de l’Hurtaut, qu’il a décidé de lancer les commémorations de «l’année de Gaulle». Théâtre d’une bataille méconnue de l’histoire de France – elle s’est soldée par une défaite – mais fondatrice du destin de Charles de Gaulle, cette commune était restée jusqu’à présent un angle mort de la mémoire de la Seconde Guerre mondiale. «Souvenons-nous», a-t-il ainsi exhorté, en énumérant les différents épisodes qui ont constitué «“l’étrange défaite” du mois de mai 1940».

En ce 80ème anniversaire de la Bataille de France, Emmanuel Macron a ensuite rendu un hommage particulièrement appuyé aux soldats français qui ont évolué «sous le commandement énergique et déterminé d’un colonel de 49 ans». «Il est exceptionnel qu’un colonel soit appelé au commandement d’une division. Mais ce colonel-là, en effet, était exceptionnel. C’était de Gaulle. Ce 17 mai 1940, il n’arborait encore ni épaulette étoilée de général, ni croix de Lorraine . Mais, déjà, celui qui emportera à Londres l’esprit de la République, l’honneur de la Nation, et le flambeau de la Résistance, était une étincelle de volonté face au brasier hitlérien. C’était de Gaulle», s’est-il enflammé, devant le petit-fils de l’intéressé. Ce dernier s’est d’ailleurs félicité de «la révolte du courage, de la volonté, de la lucidité et de l’énergie» incarnée par son grand-père, qui «a démontré que quand on veut, on peut».

Admirateur revendiqué de son illustre prédécesseur, le chef de l’État a d’ailleurs tenté de dresser un parallèle entre la France du siècle dernier et la situation actuelle du pays. Il a ainsi livré un vibrant plaidoyer en faveur de «l’esprit français» que seul son mentor aux multiples casquettes – «colonel, général, chef de la France libre, président de la République» – a su incarner durant sa carrière politique et militaire. «Songez que de Gaulle est devenu de Gaulle en moins d’un mois ! Le 17 mai il n’est rien, et quatre semaines plus tard il sera l’homme du 18-Juin», appuie l’Élysée.

«La voie de la cohésion» plutôt que les discordes accessoires

«L’esprit français, oui, farouchement libre et fier, déterminé et inébranlable , qui jamais ne meurt, même quand le pays est vaincu. L’esprit français qui, toujours, permet au peuple de France de se redresser et de reprendre la grande marche de son destin. L’esprit français, qui jamais ne se résout à la défaite, qui choisit la conquête, et embrasse l’audace. De Gaulle nous dit que la France est forte quand elle sait son destin. Quand elle se tient unie. Qu’elle cherche la voie de la cohésion au nom d’une certaine idée de la France. Qui nous rassemble par-delà les discordes alors devenues accessoires, et les désaccords souvent trop vétilleux», a loué le président.

Difficile de ne pas voir dans cette tirade des accents très politiques. A fortiori lorsque l’on sait qu’Emmanuel Macron l’a prononcée devant Xavier Bertrand, le président ex-LR de la région Hauts-de-France qui, compte tenu des règles sanitaires, a fait partie des très rares invités autorisés à assister à la cérémonie.

Encenser de Gaulle, une manière pour Bertrand de mieux critiquer Macron

Leurs relations, déjà glaciales depuis le début du quinquennat, se sont encore rafraîchies ce week-end. Le chef de l’État n’a en effet pas apprécié la tribune dont s’est fendu l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy dans les colonnes du Journal du dimanche . «Ce serait être piètre gaulliste de se contenter de révérer le passé sans essayer d’y lire les leçons que nous devons en tirer. […] De Gaulle nous apprend aussi en mai 1940 ce que doit être un chef. […] Pour de Gaulle, un chef ne doit pas parler en permanence, à tort et à travers. Il doit mener son pays d’une main ferme sans se préoccuper de sa popularité et être capable d’assumer seul les bonnes décisions. Il ne doit pas avoir le besoin pathologique d’être aimé mais se doit tout entier à la France», écrit Xavier Bertrand. «Le président était étonné qu’il choisisse un registre d’opposition un jour pareil», confirme un proche, estimant que la période ne se prêtait pas aux bisbilles politiques dans la perspective de l’élection de 2022.

Encenser de Gaulle, une manière de mieux critiquer Emmanuel ­Macron ? C’est ainsi que l’a perçu le chef de l’État. D’autant que, pour ne rien arranger, Xavier Bertrand a été le seul élu à refuser de se plier la consigne de l’Élysée, qui avait demandé aux présents de bien vouloir retirer leur masque le temps de la cérémonie. S’en est suivi un échange extrêmement froid entre les deux hommes. Pas le premier, ni le dernier.

Source : Le Figaro

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