#etudiantspasinfluenceurs: des étudiants en colère après une émission avec Gabriel Attal et de jeunes stars des réseaux sociaux

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Le porte-parole du gouvernement a lancé ce mercredi «Sans Filtre», une émission mensuelle pour échanger sur la politique de l’exécutif avec des influenceurs. Mais de nombreux internautes ont exprimé leur colère à l’idée d’être représentés par des jeunes… très privilégiés.

Dans un salon richement décoré, entre les grands lustres et les dorures, l’échange a duré près d’une heure et demie dans la soirée du mercredi 24 février, et était diffusé sur YouTube et sur Twitch, une plateforme de vidéo en direct. Au centre de ce studio aménagé dans l’un des bâtiments annexes du palais présidentiel de l’Élysée, Gabriel Attal, le porte-parole et benjamin du gouvernement, converse à bâtons rompus avec de jeunes influenceurs stars des réseaux sociaux, triés sur le volet. Il est interrogé notamment sur les mesures mises en place par le gouvernement à destination des jeunes et des étudiants, dont beaucoup estiment appartenir à une «génération sacrifiée»: faiblement exposés aux formes les plus graves du virus, ils consentent néanmoins à des restrictions sanitaires sévères, au point de sombrer parfois dans la précarité.

Pourtant, malgré les efforts répétés du gouvernement et même du chef de l’État (qui avait défié directement, quelques jours plus tôt, deux vedettes de YouTube) pour parler aux jeunes par l’entremise des nouveaux réseaux sociaux, cette opération de communication a été accueillie avec colère par de nombreux étudiants. Sur Twitter en effet, le hashtag #etudiantspasinfluenceurs culminait en tête des tendances ce samedi après-midi.

Sous ce mot-clé, de nombreux étudiants, accompagnés de certains de leurs enseignants et représentants syndicaux, s’indignaient de ce que le gouvernement n’ait répondu qu’aux questions d’influenceurs célèbres – aux conditions de vie très éloignées de celles des étudiants les plus précaires. Un internaute relevait par exemple que Fabian, un des jeunes conviés à l’Élysée, prenait récemment la pose sur Instagram devant une voiture de luxe, avec ce commentaire: «Je me suis fait un beau cadeau pour mes 20 ans».

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Dans un message devenu viral, une autre internaute soulignait également le décalage entre le quotidien de ces influenceurs et la vie étudiante en temps de crise, rendue pénible par la multiplication des cours en ligne:

Invitez moi à l’Élysée vous allez voir moi je sais c’quon a vécu j’ai des témoignages poignants d’étudiants a vous faire pleurer c’est pas celle qui fait des vlog à Dubai pendant nos cours de zoom qui nous représente on marche sur la tête là !!!! #etudiantspasinfluenceurs

— Nei (@nrhxnn) February 26, 2021

Au Figaro, Alexane Nylon, l’étudiante à l’origine de ce hashtag, explique le sens de sa démarche: «Je déplore que des personnes non concernées par la situation étudiante soient sondées pour en parler avec le gouvernement, quand des syndicats étudiants, des organisations étudiantes ou simplement des étudiants le peuvent.» Sur son profil Twitter, elle remercie également l’économiste Thomas Porcher, membre des Économistes Atterrés et engagé à gauche, pour son soutien affiché au mouvement. «Franchement, pour qu’un porte-parole du gouvernement puisse penser qu’inviter 3 influenceurs sur Twitch suffit à endormir la jeunesse, c’est vraiment qu’il vous prend pour des idiots», avait notamment écrit celui qui enseigne également à la Paris School of Business.

«Je déplore que des personnes non concernées par la situation étudiante soient sondées pour en parler avec le gouvernement»Alexane Nylon, étudiante à l’origine du hashtag #etudiantspasinfluenceurs

«Les jeunes ont joué le jeu et ont fait société, en acceptant des sacrifices pour protéger la santé de leurs aînés», explique au Figaro Thomas Porcher, qui dénonce en outre une «opération de communication du gouvernement» visant à masquer «les interrogations sur l’avenir qui tiraillent les étudiants». Il regrette en outre que le plan de relance ne prévoie pas davantage de mesures pour les jeunes, prônant davantage de mesures sociales à leur endroit.

Dépolitiser la contestation étudiante

Même son de cloche du côté de l’UNI, dont le délégué national Jacques Smith regrette auprès du Figaro «une marque d’irrespect à l’égard des étudiants, alors que la qualité générale des formations s’est dégradée». Pour ce responsable syndical, l’échange avec des influenceurs est «une manœuvre visant à se mettre les jeunes dans la poche en vue de 2022». En effet selon lui, «les syndicats étudiants, qui suivent de près ces sujets, auraient été plus légitimes pour en discuter, mais ils ont été écartés afin de dépolitiser la contestation.» L’UNI, qui fait campagne derrière le slogan «Un Amphi Pas Un Psy», déplore notamment de n’avoir été convié que deux fois en deux mois par l’exécutif, et seulement pour évoquer le fameux «chèque psy» débloqué par le gouvernement à destination des jeunes.

Curieusement, la youtubeuse EnjoyPhoenix, qui faisait partie des invités mercredi soir, l’a elle-même fait observer à Gabriel Attal en direct, s’étonnant de l’absence de journalistes pour répondre aux propos du porte-parole. «Je ne suis pas journaliste, a-t-elle lancé. D’ailleurs, je trouverais ça super que la prochaine fois il y ait un journaliste qui soit là pour rétorquer, parce que ce n’est pas mon métier. Je viens juste poser les questions que ma communauté aimerait mettre en avant.» Toujours sur Twitter ce samedi, le nom de la youtubeuse figurait également parmi les tendances du jour, de nombreux internautes s’amusant à souligner le décalage entre son train de vie luxueux et les conditions des étudiants les plus précaires.

Source : Etudiant Le Figaro

 

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