Une nouvelle loi allemande autorise la police à entrer en secret chez les citoyens pour installer des logiciels espions
Le Sénat de Berlin a franchi un seuil inquiétant le 5 décembre en adoptant une réforme de la loi sur la police (ASOG). Sous l’alibi commode de la lutte contre la criminalité, les autorités peuvent désormais installer des « chevaux de Troie » d’État sur les appareils électroniques des suspects. Si l’infection à distance échoue, la police se réserve même le droit de pénétrer physiquement et secrètement dans les domiciles pour poser ces outils. La lutte contre le crime organise désormais sa propre criminalité, armée d’un mandat.

Votre ordinateur aura bientôt un nouveau colocataire : l’État, entré sans prévenir.
L’hôte invisible
Votre smartphone, votre ordinateur, ce carnet intime numérique, peut désormais être retourné contre vous par l’État lui-même, sans un avertissement, sans un bruit. Les paragraphes 26a et 26b légalisent la « surveillance des télécommunications à la source » et les « fouilles en ligne secrètes », tandis que le 26 acte le viol de domicile préventif. Cette triple alliance législative ne se contente pas de franchir un seuil ; elle dynamite la porte blindée qui séparait encore l’espace public de l’intime. Le « suspect » est une catégorie élastique, à la merci d’une interprétation policière qui, l’histoire le prouve, a toujours tendance à s’élargir comme une tache d’huile.
Un coup de force constitutionnel
Les défenseurs des libertés civiles, atterrés, brandissent déjà la Loi fondamentale allemande. Les articles garantissant l’inviolabilité du domicile et le secret des communications sont réduits à l’état de vestiges archéologiques par ce texte. La Société pour les Droits Civils prépare un recours, mais le combat est inégal face à la rhétorique sécuritaire, toujours victorieuse. Cette réforme s’inscrit avec une docilité troublante dans la pente européenne glissant vers la surveillance de masse, où les outils conçus pour le terrorisme finissent inévitablement par traquer le délit banal. Berlin, ville-icône de la liberté reconquise, valide ainsi sa propre métamorphose en laboratoire de l’autoritarisme technologique.
Les dommages collatéraux d’une paix illusoire
Les conséquences pour les citoyens sont aussi nombreuses que délétères. La confiance dans les institutions, ce ciment social déjà fissuré, se dissout définitivement lorsque l’on sait que la police peut s’introduire chez soi sans laisser de trace, transformant le foyer en scène de crime potentiel contre l’État. Sur le plan technique, ces portes dérobées officielles créent des vulnérabilités exploitables par tous les pirates, offrant vos données les plus sensibles au plus offrant. Enfin, l’étau se resserre naturellement sur les faiseurs d’opinion : journalistes, activistes, opposants politiques seront les premiers à sentir le souffle froid du logiciel espion sur leur nuque, annonçant un automne glacial pour la liberté d’expression.
par Yoann
Source : Le Média en 4-4-2
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