Terrorisme: «La question de la répartition des compétences entre armée, police et gendarmerie va se poser»

Des soldats se préparent aux missions de surveillance du territoire, au camp de Satory à Versailles, le 13 janvier 2015.

Des soldats se préparent aux missions de surveillance du territoire, au camp de Satory à Versailles, le 13 janvier 2015. – Christophe Ena/AP/SIPA

Après les attentats de la semaine dernière, des moyens supplémentaires ont été affectés par le ministère de la Défense pour assurer la sécurité de «sites sensibles». Environ 10.500 militaires sont déployés ce mercredi, comme l’a annoncé le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian. Comment analyser cet engagement militaire? Eléments de réponse avec Olivier Renaudie, professeur de droit public à l’université de Lorraine*.

Environ 10.500 militaires sont aujourd’hui engagés dans une «opération intérieure». Pourquoi est-ce exceptionnel?

Cet engagement est exceptionnel, car les événements meurtriers de la semaine dernière sont sans précédents, tout comme l’émotion nationale suscitée. Ce chiffre de 10.500 militaires est conséquent, plus que les 8.500 militaires engagés dans les «opérations extérieures». Il est à mettre en rapport avec le nombre, très important, de sites sensibles sur le territoire national. Cet engagement est prévu dans le Livre blanc de la Défense nationale, qui précise qu’en période de crise, jusqu’à 10.000 militaires peuvent être mobilisés pour assurer la sécurité du territoire national.

Ce dispositif est-il durable?

Cette situation exceptionnelle est sous doute difficile à pérenniser dans le temps. Se posent les questions du roulement entre les militaires engagés à l’étranger et ceux sur le sol national, ou encore de la vétusté de certains matériels utilisés. Si cette opération dure plusieurs mois, se posera aussi la question de la répartition des compétences entre les forces de la Défense, la police et la gendarmerie. On peut penser à une adaptation des techniques utilisées, à un référentiel commun sur l’usage des armes par exemple, afin d’assurer une action homogène de ces forces.

«L’emploi des réserves doit être amélioré», annonce François Hollande aux armées ce mercredi. Pensez-vous que les réservistes doivent être utilisés pour cette mission?

Les réservistes constituent depuis des années une piste, parallèlement à la logique d’économies en cours. Mais ils ne constituent qu’une variable d’ajustements dans les armées.

«Le rythme [de la réduction des effectifs] doit être revu et adapté», souligne le président de la République devant les armées. Va-t-on revenir sur la logique de réductions de postes?

Dans ce contexte sensible, il y a évidemment un effet d’aubaine pour le ministre de la Défense. Il va certainement demander une rallonge, voire un réajustement des moyens à plus long terme.

Peut-on s’attendre au développement du privé pour assurer la sécurité des sites sensibles?

La sécurité privée en France est en pleine expansion, avec environ 130.000 agents. Ils agissent dans des lieux privés et non sur la voie publique, où agit la force publique. La sécurité ne se délègue pas, a encore rappelé une décision du Conseil constitutionnel de 2011. L’abandon de la force publique au profit du privé n’est pas envisageable.

Source : 20 minutes

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