Politique de justice : Transformons ! Vraiment !

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La justice est aujourd’hui le maillon faible de la sécurité en France. Dans cette tribune, le Général Bertrand Soubelet, vice-président d’Objectif France, apporte deux propositions concrètes qui visent à redonner un nouveau souffle à l’institution judiciaire, et lui permettre de mieux appréhender les enjeux de sécurité d’aujourd’hui et de demain.

Depuis plus de dix-huit mois nous entendons un discours qui magnifie la transformation au point d’en faire le principal objectif du quinquennat. Ce mot est omniprésent et il devient une des causes majeures de la déception des Français.

Notre avenir passe en effet par une modification profonde de nos schémas de pensée et de fonctionnement dans beaucoup de domaines. Mais elle prendra du temps et ne peut pas se faire contre les Français. Nos compatriotes attendent impatiemment des mesures fortes et symboliques qui ne viennent pas.

Et l’un des sujets de préoccupation demeure la confrontation des Français à l’insécurité.

Une France harmonieuse devrait avoir pour fondement le respect du contrat social qui repose sur l’exercice des libertés et le bon fonctionnement de la justice. Or la réponse à certaines formes de délinquance ne correspond plus aux besoins d’une société profondément bouleversée par l’évolution des mœurs et des standards.

Alors allons-y, arrêtons de faire du recyclage, transformons !

Notre vision de l’ensemble sécurité-justice doit répondre avec efficience aux maux qui nous frappent. Combattre l’insécurité passe par un traitement global des questions de tranquillité publique et de justice. Oui, les moyens «justice-sécurité » méritent incontestablement d’être améliorés pour être portés à 1,5% du PIB et atteindre le seuil minimal de 34 milliards d’euros. Mais sans une conception claire et débarrassée de tout dogmatisme, l’incompréhension entre les Français et l’État subsistera.

Or ce lien de confiance indispensable doit être renoué avec une approche concrète et pragmatique.

Voici deux propositions issues de l’expérience et de la réalité du terrain.

Notre conception de la sanction et de la prison est anachronique. Le « tout carcéral » n’est pas la solution qui règle tout. Coûteuse et pas toujours dissuasive, la prison conduit rarement à la réinsertion. Par ailleurs, elle est devenue un facteur de radicalisation islamiste.

Bien sûr, l’incarcération s’impose dans certains cas, notamment pour les auteurs de crimes contre les personnes et pour ceux qui représentent un danger sérieux et immédiat pour la société. Pour ces détenus qui méritent des conditions d’incarcération dignes, il est absolument nécessaire de reconstruire 15000 places de prison. Profitons en pour revoir notre conception des maisons d’arrêt et de la détention car avec des structures plus légères, donc moins coûteuses, le résultat serait sans nul doute meilleur.

Alors, quelles sanctions en dehors de la prison et des peines alternatives déjà pratiquées ?

La généralisation de la caution, de la saisie, de la confiscation et de la vente de tous les biens acquis frauduleusement. Déjà pratiquées pour certains délits, elles doivent être généralisées. Le Parlement doit légiférer dans le même esprit que la loi Warsmann et en faire des peines principales.

Cette évolution présente deux atouts majeurs. Celui du message clair de la société vers le délinquant : « Tu ne profiteras pas de tes forfaits » et du caractère exemplaire, car les citoyens honnêtes sont ainsi confortés et rassurés. Elle est une véritable peine pour le délinquant car elle fait disparaître tout le produit de ses «activités». Son standing, son ou ses véhicules, les biens immobiliers… tout est confisqué. Tous ses efforts sont réduits à néant et cette peine là est bien plus efficace que la prison. Beaucoup de magistrats le disent même si certains se réfugient encore derrière le principe de la propriété privée… Cela permettra enfin, grâce aux biens saisis et au produit de leur vente, une meilleure prise en compte des victimes et une amélioration des moyens budgétaires des services qui contribuent à l’ensemble de la chaîne pénale.

Un autre sujet majeur est celui du règlement de la délinquance de proximité. Elle se confirme tous les jours avec des agressions de pompiers, de médecins, de gendarmes, de policiers et de professeurs. Les responsables politiques ne réagissent que lorsque la rumeur publique des réseaux sociaux les y contraint. C’est la dictature de l’événement au détriment du traitement de fond. Ces trafics, ces agressions gratuites et affrontements de plus en plus fréquents avec les forces de l’ordre passent par un traitement énergique des jeunes délinquants de 12 à 18 ans. Il nécessite des mesures fortes et emblématiques.

Ce ne sont pas 100 ou bientôt 120 centres éducatifs renforcés (CER) et centres d’éducation fermés (CEF) accueillant 8 jeunes chacun qui régleront la question. Les besoins sont considérables, et il est urgent de pouvoir éloigner des jeunes délinquants de leur « territoire » pour les accueillir dans des structures fortement encadrées afin de leur redonner des repères et les resocialiser. Il s’agit de milliers de jeunes de 12 à 18 ans pour lesquels aucune solution viable n’est à la disposition des magistrats. Il est essentiel d’extraire ces jeunes de leur milieu habituel pour de longues périodes.

Des projets existent, à l’instar des chantiers éducatifs de travail pour 20 à 25 jeunes avec un encadrement de réservistes de la Garde Nationale et d’éducateurs triés sur le volet. Leur redonner la capacité de prendre un chemin de vie acceptable constitue un grand défi. Il doit être relevé sans tarder avant qu’ils ne deviennent des habitués des tribunaux surchargés et les pensionnaires des maisons d’arrêt surpeuplées.

De tels dispositifs coercitifs et éducatifs permettront à beaucoup de quartiers de « respirer » et aux forces de sécurité et aux tribunaux de ne pas s’épuiser avec les mêmes « sauvageons ». Ces structures devraient, de manière naturelle et très symbolique, être partiellement financées par les allocations familiales des parents défaillants.

La prise en compte de cette minorité déviante est un enjeu majeur alors que le ministère de la jeunesse a été transformé en direction au sein du ministère de l’éducation nationale. Choix discret, mais sans aucun effet positif jusqu’ici.

Osons donner une vraie réponse à ces jeunes à la dérive, sans jamais renoncer à la fermeté et à la privation de liberté.

Une politique ambitieuse, c’est avant tout faire des propositions et des choix raisonnés pour répondre aux besoins collectifs prioritaires. Des choix structurants, sans a priori, en dehors de toute considération corporatiste et idéologique.

Cette vision doit être guidée par la restauration du contrat social et privilégier l’intérêt du pays et des Français. C’est ce qui nous manque depuis bien longtemps.

Bertrand Soubelet
Vice président d’Objectif France

Source : Objectif France.org

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