Maladresse ou indécence ?

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Maladresse ou indécence ?

 

 

Ainsi donc, à parcourir la presse, le Président serait « claqué » selon ses propres confidences, « très fatigué » selon son parti LREM dont un représentant ajoute : « Au bout de seize mois, il y a une part de fatigue« . « Il a pris cher », confie un de ses proches. Cela fait une semaine que la communication de l’Elysée nous narre par le menu l’épuisement présidentiel.

 

L’homme qui avait vanté son jeune âge comme une qualité de performance politique est donc sur les genoux. Soit. Mais sans doute le problème ne vient pas que de l’usure normale du pouvoir. D’une part E. Macron ne délègue rien et veut garder la main sur tout et d’autre part il est critiqué de toutes parts, même par ses proches, à la fois car il décide seul, de manière « jupitérienne », et surtout car les résultats ne sont pas au rendez-vous, loin de là, et qu’il s’effondre d’autant plus dans les divers sondages d’une opinion qui rejette massivement sa politique de hussard à grands coups de pied-de-biche.

La question qui se pose dès lors n’est pas qu’il soit fatigué. C’est de savoir si c’est physiquement ou mentalement.

 

 

Ce Président du « nouveau monde » est en effet un incorrigible mégalomane, il est difficile de le contester. Cette pathologie (car c’en est une) non seulement le pousse à tout faire seul (sinon c’est mal fait) et surtout, ne trouvant pas la reconnaissance, voir l’admiration, quasi-monarchique qu’il réclame en retour du « peuple », ne peut que conduire à l’effondrer psychologiquement. Il voudrait sans doute avant tout réussir sa vie, être aimé, être beau, gagner de l’argent, puis surtout être intelligent, et partout dans la rue, il veut qu’on parle de lui, que les filles soient nues, qu’elles se jettent sur lui, qu’elles l’admirent, qu’elles le tuent, qu’elles s’arrachent sa vertu. Et pourtant il bosse à plein temps…

 

 

Quelle ingratitude que celle des manants ! Il faut donc qu’il se repose quatre jours. « Il a besoin d’être tranquille, en paix, au calme, sans personne du cabinet ni journaliste à ses talons », raconte un ami. D’autant, comme le relatent avec complaisance tous les médias, que la semaine prochaine s’annonce un long périple de six jours pour les commémorations du centenaire de la fin de la grande guerre. « Un long et fatigant déplacement dans l’est et le nord de la France ». Presque un « chemin de croix » à lire ce genre de propos à côté duquel le « chemin des Dames » aurait été une simple promenade de santé sans doute ?

Télescopage des mots du « storytelling »* présidentiel pour le moins maladroit.

 

 

Cette fin de centenaire, c’est l’arrêt de plus de quatre ans d’une guerre terrible, de manque de sommeil, de bombardements incessants, de vie misérable dans la boue, d’assauts meurtriers, de pleurs, de hurlements, d’existences fauchées, de survie parmi les cadavres pourrissants et les rats, par tous les temps, d’hygiène rudimentaire, de maladies, de blessures terribles, de folie parfois. La fin d’un véritable enfer qui ne connut pas, lui, de repos. De soldats hébétés, épuisés, laminés, qui pour la première fois depuis quatre ans, pour ceux qui étaient indemnes, pouvaient se projeter dans les minutes suivantes en étant certains de les vivre.

 

 

Que valent face à cela seize petits mois de présidence, et encore plus 6 minuscules jours de déplacement confortable, quand bien même le programme soit dense ? Les mots des communicants ont-ils perdu le moindre sens ou versent-ils sans honte dans l’indécence ?
Question qui résonne encore plus sourdement, lourdement, à la lecture d’un constat émis par un collaborateur présidentiel dans Le Point :  » Quand vous êtes jeune et que vous n’avez pas beaucoup connu l’épreuve, vous êtes souvent désarçonné lorsque celle-ci survient.

 

 

« En cette période de souvenir, de commémoration, le respect élémentaire aurait été de ne pas en faire des tonnes sur la relative fatigue présidentielle dont Emmanuel Macron est le seul et unique responsable. Comme la plupart des combattants de la Grande Guerre, et encore avec la « chance » d’avoir survécu assez longtemps pour cela, mon arrière grand-père n’a bénéficié que d’une seule permission loin des tranchées, quelques petits jours avec sa femme et ses deux enfants en bas âge, avant de mourir au feu dans la Somme en juillet 1916.

Quelle est la valeur de « l’épuisement » d’Emmanuel Macron face aux regards de ces soldats qu’il devrait honorer avec un peu plus de dignité que sa communication maladroite ?

 

 

Marc Louboutin

 

* storytelling = la narration
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Marc Louboutin, né le à Quimper dans le Finistère, est un ancien lieutenant de police auteur de deux livres.
  • Métier de chien – Lettres à Nicolas » Editions Privé (autobiographie) 2007
  • « Flic, c’est pas du Cinoche » Editions du Moment (essai) 2010 (l’auteur a réalisé pour sa promotion, et à titre de teaser, une série de quatre clips) diffusés sur internet
Références et liens externes :

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