Je hais la révolution

Par le Général Roland DUBOIS

Cette année nous allons célébrer le 230ème anniversaire du 14 juillet 1789, date retenue comme fête nationale par une loi de 1870. Contrairement à ce que pense aujourd’hui une majorité de nos compatriotes, ce n’était pas du tout une date qui allait de soi puisqu’il a fallu y « réfléchir » pendant 80 ans. Mais par un saisissant raccourci de la pensée et de la mémoire, cela permet de gommer le fait que la première apparition de la république n’a été qu’une fausse couche douloureuse dont la France a eu bien du mal à se remettre. Si on voulait bien regarder les faits et ne pas se contenter d’ânonner bêtement la liturgie de la doxa républicaine, on verrait que le premier fœtus républicain a été expulsé dans les horreurs de la terreur, et le nouvel enfantement a dû attendre longtemps le passage de trois rois et deux empereurs. La liberté, l’égalité et la fraternité y ont-elles gagné quoi que ce soit qui vaille la peine et fasse pardonner les abominations révolutionnaires ? Evidemment non. Les pays qui nous entourent sont nés récemment ou sont souvent des royautés parlementaires pas moins démocratiques que notre république. Malgré les convulsions qui marquent l’histoire de tous les peuples, ils ont évolué de manière beaucoup plus apaisée que nous vers des systèmes démocratiques semblables au nôtre, sans les abominations que certains excusent en feignant de les considérer comme inévitables et justifiées par le fait même de l’aboutissement finalement heureux. Un mal pour un bien en quelque sorte ; c’est le résultat qui compte ; ne nous attachons pas aux détails.

Dans toutes les périodes troublées, quand les structures sociales et administratives craquent, quand la peur du gendarme s’affadit, des excès sont commis. Mais ce qui est déplorable, regrettable dans une situation de désordre devient monstrueux, impardonnable, quand le crime de masse est organisé par ceux-là mêmes qui prétendaient apporter la liberté et qui sont aux commandes. Et ce fut le cas de tant de nos révolutionnaires que trop souvent on continue à honorer ! Ce qui ne nous empêche pas, encore aujourd’hui, de nous recueillir au souvenir de cette période et de mettre sans cesse sous le regard des autres la gloire d’avoir tant massacré d’innocents. En fait nous avons inauguré à cette époque le premier pouvoir totalitaire des temps modernes qui a servi de modèle à toutes les tyrannies du 20ème siècle, nazisme et communisme en tête. La filiation est évidente, et revendiquée d’ailleurs par ces dernières. On promet au peuple la liberté et l’abondance, et on lui apporte la tyrannie et la pénurie.

Les citations accusatrices authentiques sont innombrables, incontestables car inscrites dans les archives de la nation. On pourrait en citer jusqu’à la nausée. Robespierre, tyran emblématique, est un des plus grands responsables des crimes de cette époque, et cela en un an seulement. Mais sur le podium des criminels en séries, des massacreurs, on se bouscule. Marat, pousse-au-crime halluciné, Carrier, responsable à lui seul de 10.000 morts en moins de six mois, Collot d’Herbois se vantant de ne pas faire le détail (« si l’on épargnait les innocents trop de coupables échapperaient), lui et son complice Fouché massacrant les suspects à coup de canon à Lyon car la guillotine avait un débit trop lent, le général Westermann écrivant à la convention : « Citoyens républicains, il n’y a plus de Vendée ; elle est morte sous notre sabre libre, avec ses femmes et ses enfants », et tant d’autres. Certes beaucoup ont péri à leur tour sous le « rasoir national », abominable expression inventée par les révolutionnaires eux-mêmes ; mais pas en châtiment de leurs crimes ; simplement parce que leurs exécuteurs du jour, complices de la veille, craignaient d’être à leur tour victimes de leur démence meurtrière. Deux brillantes exceptions cependant à ces fins tragiques : Fouché qui a réussi à servir et trahir successivement tous ses maîtres et à survivre, et, champion toutes catégories, le général Turreau, massacreur en chef de la Vendée à la tête de ses colonnes infernales. Fait baron d’Empire, grand Officier de la Légion d’Honneur par Napoléon qui l’envoie en outre ambassadeur de France aux Etats-Unis, puis récompensé par le roi (un comble!) par l’attribution de la Croix de Saint Louis, enfin immortalisé par une inscription avec les gloires de la république sur l’Arc de Triomphe ; il est mort fortuné dans son lit. Notons que toutes les demandes faites pour en rayer le nom sur l’Arc de Triomphe ont été rejetées par l’autorité républicaine.

Peut-on haïr la révolution sans haïr la république actuelle? Oui car Dieu merci celle que nous connaissons depuis longtemps n’a plus grand-chose à voir avec le monstre des origines. Les sacrifices consentis par le peuple français sous le drapeau tricolore depuis plus de deux siècles en ont sanctifié les plis, et il faut bien des symboles nationaux. Mais j’avoue qu’il m’est pénible parfois de me rappeler que le pays autoproclamé des droits de l’homme revendique sa naissance au milieu des charniers, comme si la ci-devant France n’avait pas existé ou si son souvenir était honteux. Notre histoire n’a pas commencé avec la révolution. L’amalgame réducteur si souvent fait entre la patrie française et la république est choquant. Notre président précédent osait dire que le patriotisme c’est la défense de la république. Et bien non ! Les citoyens des pays démocratiques qui nous entourent ne sont pas moins patriotes, même s’ils ne vivent pas en république. La république c’est un système de gouvernance ; rien de plus ; les « valeurs » dont on la croit chez nous exclusivement chargée sont partagées par bien d’autres ; et nous ne pouvons même pas en revendiquer la paternité qui échoit à la constitution américaine de 1787.

On vient de commémorer le génocide arménien par les Turcs en 1915. On s’apprête à instaurer une journée du souvenir du génocide rwandais ; on se demande pourquoi. Quand pensera t-on à instaurer une journée commémorative du génocide vendéen, quand des gens, des Français ceux-là, ont été massacrés par d’autres Français non pour ce qu’ils avaient fait mais pour ce qu’ils étaient ?

Général (2s) Roland DUBOIS – VPF Ile de France

Source : Volontaires Pour la France

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