Exilés de l’intérieur, les nouveaux « cagots » s’organisent

Cagots, qu’èsaquo ? Les cagots furent des communautés humaines mises au ban de la société entre le Moyen Âge et la Révolution française. Ces communautés réparties en plusieurs endroits des côtes atlantiques françaises et espagnoles durent vivre exclues à la périphérie des villes et villages – à la manière des castes d’ »intouchables » qui subsistent encore en Inde de nos jours. On pensait ce terme de « cagot » définitivement tombé dans les oubliettes de l’histoire, après qu’ils avaient été réhabilités et réintégrés dans leur droits à la Révolution française, mais le signe de la patte d’oie rouge a ressurgi dans les manifestations cet été, car une nouvelle catégorie de personnes à exclure a fait son apparition dans la bouche du président de la République lors de son allocution du 12 juillet 2021, celle des « non-vaccinés ».

Sofiane est membre d’un mouvement informel qui ressuscite leur mémoire : il nous présente les « cagots » d’aujourd’hui, qui, prenant acte de la ségrégation qui s’installe et de la stigmatisation assumée qui frappe ceux qui refusent les injections anti-covid, cherchent, proposent et partagent des solutions pour que les « emmerdés » s’organisent.

Un peu d’histoire

D’origines diverses (descendants de Wisigoths, Cathares, Sarrasins…), le point commun de ces cagots fut d’être discriminés, humiliés, maltraités, exploités. Ils demeurèrent exclus parce qu’on les croyait malades de la lèpre et malsains. Si certains d’entre eux ont pu être malades initialement, le rejet se perpétua sur leur descendants, la rumeur perdurant bien après la disparition de la lèpre, alors même qu’ils étaient en bonne santé.
Ils étaient des sous-citoyens, moqués, brimés, auxquels de nombreuses choses étaient interdites, et qui devaient se signaler par le port permanent d’un insigne représentant une patte d’oie rouge à 3 doigts (ou de canard). Il leur était interdit de se mêler aux fidèles, ils avaient une entrée spéciale qui leur était réservée dans les églises. On ne devait pas les toucher, ils avaient leurs propres fontaines, leurs propres cimetières. Ils ne pouvaient pas prendre part aux festivités avec les autres villageois, ils ne pouvaient épouser que des membres de leur communauté ou d’autres communautés de cagots.
Ils n’avaient pas de nom de famille. Les professions ayant trait à l’alimentation ne leur étant pas autorisées, ils ont dû se spécialiser dans les activités non susceptibles de transmettre la lèpre, les métiers du fer et du bois : charpentiers, menuisiers, bûcherons, tonneliers, forgerons…
Pour la justice, le témoignage d’un citoyen valait celui de sept cagots.
Quelques siècles plus tard, cela donné des idées à quelques Toulousains : organiser ces millions de nouveaux « cagots » isolés potentiels, au sein d’un mouvement informel représenté par le site collaboratif cagots.fr
Les cagots étaient également appelés « agots » au Pays basque français et en Navarre espagnole,  « crestians » ou  « chrestias » au XIIIè siècles, « caquous » en Bretagne, « canars », « ladres », « gahets », « gahetz », « gafets », « gaffets »,  « capots » ou gens des marais d’Anjou,  « coquets » de Vendée,, »cascarròts » au Pays basque ou grauèrs en Bigorre (liste non exhaustive…) Évidemment, on ne peut résumer plusieurs siècles d’histoires et de particularités régionales en quelques lignes.


Pour aller plus loin :
Cagot (Wikipédia)
Les Cagots de Lube
Les cagots et leurs congénères, L. Louis-Lande 
Les cagots des Pyrénées : une ségrégation attestée, une mobilité mal connue, Geneviève Jolly
Histoire des Cagots de France et de Navarre (YouTube)
Cagots et Kaskarots, leur véritable histoire : conférence à Hagetmau (avril 2017) (YouTube)
DÉBUNK : le mystère cagot | Mini documentaire (YouTube)


Auteur(s): FranceSoir

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