Coronavirus : ces patrons qui pensent éviter les procès en faisant signer une décharge à leurs salariés

– SALVADOREAN PRESIDENCY / AFP
Comme le relate le JDD ce vendredi 27 mars, certains patrons font signer des décharges en responsabilité à leurs salariés en cas de contamination au travail, afin – croient-ils – d’éviter d’éventuelles poursuites.

« J’atteste venir exercer mon activité professionnelle de mon propre chef et m’engage à n’exercer aucun recours contre la société XX en cas de contamination par le Covid-19. » Ce vendredi 27 mars, le Journal du Dimanche fait état de plusieurs documents de cet acabit transmis par des employeurs à leurs salariés. Vous ne rêvez pas : certains patrons font signer des décharges en responsabilité à leurs employés en cas de contamination au travail, afin – croient-ils – d’éviter d’éventuelles poursuites.

Une autre décharge envoyée à nos confrères du JDD laisse le choix au travailleur : prendre des jours de congé (avec ou sans solde), ou bien reprendre le travail “en toutes connaissances de causes et des dangers encourus concernant le Covid-19”, en s’engageant à ne pas se retourner contre l’entreprise “au cas où il/elle serait infecté dans l’exercice de ses fonctions”. Parmi les entreprises soucieuses de ne pas être poursuivies en justice, beaucoup auraient, toujours selon le JDD, été contraintes de reprendre leurs activités sans être couvertes par le chômage partiel, notamment dans les secteur du BTP et de l’industrie.

Malheureusement pour les employeurs qui voudraient s’exonérer de leurs obligations en matière de sécurité, ces décharges n’ont aucune valeur juridique. En effet, non seulement le salarié peut être couvert au titre des accidents du travail en cas de contamination, mais son employeur peut en outre être condamné pour faute inexcusable s’il n’a pas pris toutes les mesures nécessaires à la protection de ses salariés.

Obligation de résultat

L’article L. 4121-1 du Code du travail dispose en effet que l’employeur “doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs”, comprenant notamment “des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation” et “la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés”. L’employeur doit enfin veiller à “l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances”, comme c’est évidemment le cas avec le Covid-19. Sur son site, le ministère du travail précise qu’il “n’incombe pas à l’employeur de garantir l’absence de toute exposition des salariés à des risques mais de les éviter le plus possible”.

Comme le précise la jurisprudence dans un arrêt du 22 février 2002 de la Cour de cassation, il s’agit là d’une obligation de résultat : un employeur ne doit pas seulement diminuer le risque, mais l’empêcher, sans quoi sa responsabilité pourra être engagée en cas d’accident ou de maladie en lien avec les conditions de travail du salarié. “La responsabilité de l’employeur pour méconnaissance de cette obligation spécifique de prévention des risques professionnels peut être recherchée en amont de toute atteinte à l’intégrité physique ou mentale du travailleur”, confirme le ministère. Il appartient alors à l’employeur de prouver qu’il a fait tout le nécessaire pour prévenir les risques, en l’occurrence de contamination.

Comme le rappelle le JDD, un arrêt du 18 février de la Cour d’appel de Grenoble vient précisément de confirmer la condamnation de la direction d’une maison de retraite après qu’une soignante a été contaminée par la tuberculose, les juges ayant estimé que l’entreprise avait tardé à réagir et à protéger les personnels.

Source : Marianne


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