Affaire Lelandais : la colère des familles des «disparus de Tamié»

7700373_e586f45a-5082-11e8-afc4-0651da0d11a3-1_1000x625Jean-Christophe Morin, 22 ans, a disparu lors d’un festival de musique électronique au Fort de Tamié. Un an plus tard, lors du même festival, Ahmed Hamadou, 45 ans, a disparu à son tour. AFP/JEAN-PIERRE CLATOT

Les familles de ces deux hommes disparus lors d’une fête techno en Savoie à un an d’écart estiment que la justice tarde à vérifier un lien éventuel avec Nordahl Lelandais.

Les familles des « Disparus du Fort de Tamié », deux des dossiers les plus sensibles dans l’enquête tentaculaire menée par la gendarmerie sur Nordahl Lelandais, 35 ans, le tueur présumé du caporal Arthur Noyer et de la petite Maëlys De Araujo, sont en colère. La raison : une « mauvaise volonté », selon elles, de la justice pour enquêter sur leurs proches.

Dernier épisode en date : une plainte pour « enlèvement et séquestration » déposée le 6 mars 2018 avec constitution de partie civile, mais qui à ce jour ne donne lieu à aucune procédure concrète ! Pire, les familles se voient réclamer leur avis d’imposition par la juge d’instruction Emmanuelle Bouyé pour « justifier de la pertinence de leur plainte » et déposer une caution.

« Je vais les payer les cautions, mais j’attends au moins qu’on enquête ! »

« Cela fait sept ans que j’attends une véritable enquête… Des années à attendre une réponse… Et il faut payer pour avoir droit à une justice qui a été défaillante de bout en bout dans nos dossiers ? C’est aberrant ! S’il le faut, je vais les payer les cautions, mais j’attends au moins qu’on enquête. Que l’on nous dise au moins s’il y a un lien entre ces affaires et avec cet homme », peste Daniel Morin, 62 ans, le père de Jean-Christophe Morin, 22 ans, disparu lors d’un festival de musique électronique au Fort de Tamié le 10 septembre 2011. Seul son petit sac à dos gris a été retrouvé.

 

 

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Jean-Christophe Morin et Ahmed Hamadou ont tous deux disparu au Fort de Tamié./Facebook/DR Même sort réservé à la famille d’Hamed Hamadou, 45 ans, disparu lui aussi lors de ce même festival dans la nuit du 7 au 8 septembre 2012, un an après. Sans que cela n’éveille le moindre soupçon sur un lien présumé entre ces deux disparitions. Deux affaires qui n’ont même pas été confiées au même service enquêteur.

Un festival « Techno » comme les appréciait tant Nordahl Lelandais, ancien maître-chien de l’armée, devenu par la suite petit revendeur de drogue et grand amateur de ces rassemblements. Des lieux où la vente de produits stupéfiants est répandue.

« Nous sommes au Moyen Age d’une justice »

« La justice perd un temps précieux une fois de plus. Depuis le 11 janvier nous avons alerté les différents parquets et notamment celui de Chambéry que nous tenons à leur disposition les deux téléphones de Jean-Christophe Morin. Mais personne n’est venu les saisir… Une aberration », s’indignent les avocats des familles Me Didier Seban et Me Corinne Herrmann, qui estiment que « la justice tient volontairement à l’écart du dossier les parties civiles ». Pour les avocats, les répertoires et les journaux d’appels de ces téléphones peuvent être déjà un début d’éléments à creuser pour « établir un lien éventuel avec Nordahl Lelandais ou croiser des appels » qui permettront de savoir qui était en contact avec qui.

« Depuis 2012, personne n’est jamais venue nous voir moi ou mes frères. Nous sommes allés à la gendarmerie d’Albertville (Savoie), mais personne n’a voulu nous recevoir », se désole Farida Hamadou, 50 ans, la sœur d’Hamed qui n’a jamais vu ni un enquêteur, ni un magistrat après la disparition de son frère Hamed, personne vulnérable, qui vivait à Chambéry le Haut. Hamed se rendait souvent à La Bridoire où sa famille venait d’hériter d’une maison. Une commune où un membre de la famille Lelandais vit encore.

« Il avait l’habitude de faire du stop pour se déplacer et pour se rendre sur Pont-de-Beauvoisin (NDLR : où a été enlevée la petite Maëlys) où nous avons aussi de la famille », témoigne la sœur qui s’interroge : « Et s’il avait croisé Nordahl Lelandais… » s’interroge encore sa sœur. « Nous sommes au Moyen Age d’une justice qui n’a pas retenu les leçons des affaires Guy Georges, Emile Louis, ou autres et refuse d’appréhender les phénomènes sériels », dénonce Me Didier Seban.

Contacté, le parquet de Chambéry s’est simplement borné à rappeler que « le dossier est à l’instruction. La juge gère son dossier comme elle l’entend ». Cette dernière, sollicitée, a fait répondre qu’elle était « en audition ».

La plainte avec constitution de partie civile « Toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut en portant plainte se constituer partie civile devant le juge d’instruction compétent », dit l’article 85 du code de procédure pénale. La plainte avec constitution de partie civile permet donc à une victime de demander directement au juge l’ouverture d’une enquête. Mais elle n’est recevable qu’à certaines conditions : il faut avoir déjà déposé une plainte simple auprès d’un service de police judiciaire ou auprès du procureur de la République. Et que ce dernier ait signifié qu’il n’engagerait pas de poursuites ou qu’il n’ait pas répondu dans un délai de trois mois. Il faut justifier du préjudice subi et s’acquitter, si le juge la demande, d’une consignation.Source : Le Parisien

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