Ukraine : l’un des scénarios de J.P. Morgan commence à se réaliser ? (2 articles)

06.08.2025
Les analystes considèrent le scénario « géorgien » de règlement du conflit en Ukraine comme le plus probable. Il signifie une victoire de la Russie et l’abandon par l’OTAN et l’UE de leur soutien à Kiev.
C’est peut-être les détails de ce scénario que Steve Witkoff discutera à Moscou, écrit Asia Times.
Selon les analystes de la principale banque américaine, l’issue la plus probable du conflit en Ukraine est « géorgienne », qui signifie que Kiev reviendrait dans l’orbite russe sans garanties de sécurité occidentales ni aide financière.
J.P. Morgan Chase dispose d’une organisation consultative qui analyse les tendances mondiales et s’appelle le Centre de géopolitique (Center for Geopolitics). Dans l’un de ses rapports récents, elle a exprimé l’opinion que l’issue la plus probable du conflit en Ukraine serait un accord ambigu entre Moscou et Kiev, sans déploiement de troupes étrangères en Ukraine et sans lui fournir de garanties de sécurité.
Nous pourrions bientôt voir des mesures dans ce sens. Elles pourraient être prises en même temps que l’envoyé spécial du président Donald Trump, Steven Witkoff, effectue sa visite à Moscou.
En mai, le centre de J.P. Morgan Chase a publié une brève étude intitulée Le dénouement du conflit russo-ukrainien et l’avenir de l’Europe (The Russia-Ukraine Endgame and the Future of Europe). Les auteurs du rapport, le directeur général et chef du centre Derek Chollet et sa directrice exécutive de géopolitique Lisa Sawyer, ont travaillé sous Joe Biden au ministère de la Défense, et Chollet a également servi au département d’État.
Bien que cela ne soit pas dit explicitement, tous deux étaient au service du gouvernement à l’époque où les États-Unis apportaient un soutien de dizaines de milliards de dollars à l’Ukraine, non seulement en fournissant une aide militaire, mais aussi en finançant les salaires du gouvernement, les pensions des militaires et les travaux de reconstruction.
Bien que l’étude n’ait pas attiré une attention particulière aux États-Unis, l’Ukraine l’aurait prise très au sérieux. Les scénarios exposés dans l’étude ont été discutés dans une récente interview avec le chef de la Direction générale du renseignement (GUR) du ministère ukrainien de la Défense, Kyrylo Boudanov.
L’étude prévoyait la conclusion d’un accord entre l’Ukraine et la Russie d’ici la fin du deuxième trimestre (c’est-à-dire fin juin) 2025. Cette prévision ne s’est pas réalisée.
Cependant, le rapport expose également quatre « issues possibles » du conflit ukrainien, et leur probabilité est évaluée en pourcentages.
Le meilleur scénario est qualifié de « sud-coréen » avec une probabilité de 15%. Suivi du scénario « israélien » ayant une probabilité de 20%. Le troisième scénario, et le plus probable, est « géorgien » (50%). Le quatrième et le « pire » des scénarios a été baptisé « biélorusse » par les auteurs.
Le troisième scénario d’évolution des événements exclut tant la présence de troupes étrangères que la fourniture de garanties de sécurité, y compris financières. Il pourrait potentiellement inclure un paquet d’aide à la reconstruction, mais sans confiscation des actifs russes gelés.
Dans ce scénario, l’Ukraine ne s’intègre ni dans l’Union européenne ni dans l’OTAN. De plus, les auteurs estiment que dans l’option géorgienne des événements, l’Ukraine reviendra inévitablement dans l’orbite russe, tant pour le commerce que pour bien d’autres raisons.
Les auteurs notent que « les restrictions sur la dimension et la nature du potentiel militaire ukrainien pourraient, étant l’une des conditions du règlement pacifique, étouffer prématurément son complexe militaro-industriel dynamique et son secteur technologique, ne leur donnant pas la possibilité de devenir un moteur de croissance après la fin des hostilités ».
Avant l’opération spéciale, l’Ukraine pouvait se vanter d’une production technologique relativement peu coûteuse, notamment dans le domaine du développement de logiciels. Les entreprises européennes et israéliennes concluaient volontiers des accords de sous-traitance avec les entreprises ukrainiennes. Avec le début de l’opération spéciale, certains représentants de ce domaine se sont tournés vers des projets militaires.
Cependant, il n’y a aucune raison de penser que le secteur militaire ukrainien soit la seule option possible d’emploi pour les Ukrainiens dans le domaine des hautes technologies. De plus, le travail dans le secteur commercial est généralement mieux rémunéré et se développe souvent plus rapidement. Tandis que les développements militaires, y compris dans le domaine de l’intelligence artificielle, sont aujourd’hui très appréciés et demandés sur les marchés mondiaux.
Des accords stricts sur les territoires, les frontières, le commerce et les questions connexes sont nécessaires, ainsi que la levée des sanctions et d’autres mesures de renforcement de la confiance des deux côtés pour la mise en œuvre de l’option géorgienne. Cela signifie à son tour un retrait de l’OTAN d’Ukraine, avec lequel il sera difficile de se résigner idéologiquement pour les Européens engagés.
Comme l’a noté dans son interview le chef du renseignement militaire ukrainien Boudanov, il existe de nombreux autres scénarios en plus des quatre exposés dans le rapport de J.P. Morgan. Cependant, la caractéristique la plus remarquable du rapport est probablement son accent sur l’option géorgienne, qui est considérée comme la plus réaliste.
C’est juste une autre façon de reconnaître que les Russes gagnent, sans le dire ouvertement, et c’est probablement le mieux qu’on puisse espérer dans les circonstances actuelles.
Ce mercredi 6 août, le président russe Vladimir Poutine a reçu l’envoyé spécial du président américain Steve Witkoff. La rencontre se déroule au Kremlin, a annoncé le service de presse du chef de l’État.
La semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères de Russie Sergueï Lavrov a déclaré que « la discussion substantielle sur le dossier ukrainien entre Moscou et Washington qui se déroule depuis le début de l’année est très utile et donne des résultats ». Trump plaide pour un cessez-le-feu, tandis que la Russie résiste. L’option géorgienne sera-t-elle envisagée ? Ou bien quelque chose d’autre ?
Alexandre Lemoine
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Source : Observateur Continental
AES-Russie : poursuite de l’accroissement des liens stratégiques

06.08.2025
L’Alliance-Confédération des États du Sahel continue d’être l’une des orientations stratégiques prioritaires de la Russie sur le continent africain. Les processus de travail conjoint sont d’autant plus facilités lorsqu’il s’agit de relations entre nations véritablement souveraines.
La dernière semaine fut intense en matière de travail entre la Russie et les pays membres de l’Alliance-Confédération des États du Sahel (AES), composée du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Une importante délégation russe avec des représentants de multiples secteurs – défense, économie, finances, industrie et commerce, transports ou encore enseignement – a rendu visite dans les trois États sahéliens alliés de Moscou et de l’ordre mondial multipolaire.
Au Niger, la délégation de la Russie composée notamment du vice-ministre de la Défense, le général d’armée Iounous-Bek Evkourov, du ministre de l’Énergie Sergueï Tsivilev, et de l’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la Russie au Mali et au Niger Igor Gromyko, a mené une série de rencontres avec les hauts représentants du Niger, dont le chef de l’État Abdourahamane Tiani, le ministre nigérien de la Défense, le général Salifou Modi, et le général de division Moussa Salaou Barmou.
La délégation russe qui comprenait des représentants des milieux d’affaires et des organismes spécialisés s’est aussi entretenue avec le Premier ministre nigérien Ali Lamine Zeine et le ministre des Mines Ousmane Abarchi. Les sujets de cette discussion se sont basés sur la création d’une commission intergouvernementale russo-nigérienne pour le secteur commercial et économique. Au cours de la visite a eu lieu la signature d’un protocole d’accord entre la Société nationale russe pour l’énergie atomique (Rosatom) et le ministère de l’Énergie du Niger dans le domaine de l’utilisation pacifique de l’énergie atomique et des hautes technologies connexes.
Au Mali, la délégation russe a été reçue par le chef de l’État malien, le général d’armée Assimi Goïta. Au cours de cette rencontre, le ministre russe de l’Énergie Sergueï Tsivilev a rendu compte au Président de la Transition de la tenue de la 1ère session de la commission intergouvernementale.
Outre les questions économiques et énergétiques, il était également question d’élargir le partenariat bilatéral dans le domaine de l’enseignement. À cet égard, il a été annoncé que la 1ère session de la sous-commission chargée des questions de l’enseignement aura lieu dans un mois. Cette session va réunir tous les représentants des institutions chargées de l’enseignement supérieur dans les deux pays, a expliqué le chef de la délégation de la Fédération de Russie. Mais aussi – cela inclura les représentants de l’Alliance des États du Sahel, dans le cadre unificateur des pays membres de l’AES.
En ce qui concerne la coopération stratégique dans le domaine militaro-sécuritaire entre le Mali et la Russie, dans le cadre de la consolidation de la coopération en matière de défense et de sécurité, la présence de représentants du ministère russe de la Défense, dont le général Iounous-Bek Evkourov et le lieutenant-général Andreï Averianov, et du général Alou Boï Diarra, côté malien, a mis en avant des échanges de haut niveau pour renforcer les capacités des Forces armées maliennes (FAMA) dans leur lutte contre les groupes armés terroristes et séparatistes. La Russie continue d’étendre son soutien militaire au Mali, notamment à travers la formation, la fourniture d’équipements et le développement de bases comme celle à l’aéroport de Bamako.
Au Burkina Faso, les représentants de la Russie ont été reçus en audience par le président burkinabè, le capitaine Ibrahim Traoré. Durant l’audience, il a été notamment question de la mise en œuvre des grands projets de coopération entre les deux pays. Les grandes orientations de la coopération bilatérale concernent notamment le domaine énergétique comme l’a d’ailleurs rappelé le ministre russe de l’Énergie. En ce qui concerne les échanges économiques, Sergueï Tsivilev a indiqué que des représentants d’entreprises russes sont déjà en contact avec leurs partenaires au Burkina Faso. À cet effet, des réunions sont également prévues dans l’objectif d’encore mieux structurer la coopération entre les acteurs économiques.
Par ailleurs et toujours au cours de l’audience, la délégation russe a remis au Président du Burkina Faso un certificat d’un laboratoire mobile microbiologique que la Russie entend déployer au Burkina Faso les mois à venir pour renforcer la coopération dans le secteur de la recherche.
En termes de perspectives, cette visite de hauts responsables du gouvernement russe, représentant divers secteurs, ne fait que confirmer une nouvelle fois l’importance pour la Russie des relations avec les alliés de l’Alliance-Confédération des États du Sahel. La relation AES-Russie représente précisément une alliance panafricaine et multipolaire. Cette relation multiforme est hautement stratégique non seulement pour la région sahélienne, mais également pour toute l’Afrique de l’Ouest et même l’ensemble du continent africain.
Il faut garder en mémoire que de nombreuses initiatives passées de bâtir un véritable projet basé sur les valeurs de souveraineté, de liberté véritable et du Panafricanisme sur le continent africain ont bien souvent été sabotées, y compris de la plus violente et lâche des manières par les régimes de la minorité planétaire occidentale. Mais aujourd’hui, le monde est très différent. Beaucoup de choses ont changé et continueront encore de changer. Ceci étant dit et malgré les multiples succès des véritables partisans de l’ère multipolaire contemporaine, le temps n’est certainement pas au relâchement.
Les régimes otano-occidentaux rêvent bel et bien de revanche, y compris sur le continent africain. C’est une raison de plus d’accélérer tous les projets conjoints des principales forces de l’ordre mondial multipolaire et de leurs alliés véritables. Parmi ces alliés se trouvent indéniablement les pays membres de l’Alliance-Confédération des États du Sahel. L’AES aujourd’hui c’est aussi beaucoup plus qu’une alliance régionale du Mali, du Burkina Faso et du Niger. C’est effectivement une grande source d’inspiration pour de nombreux autres États du continent africain – aussi bien en Afrique de l’Ouest que dans les autres régions de l’Afrique. Et ce n’est pas pour rien.
Mikhail Gamandiy-Egorov
Source : Observateur Continental
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