Une troisième plainte pour « viols » contre Tariq Ramadan

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Déjà doublement mis en examen pour viols, Tariq Ramadan est visé par une troisième plainte émanant d’une Française qui décrit des faits similaires.

REUTERS/Mike Segar

[EXCLUSIF] Une femme qui dit être tombée sous l’emprise du théologien, l’accuse de lui avoir imposé des rapports sexuels d’une extrême violence entre 2013 et 2014, en France et à l’étranger. L’Express a pu consulter sa plainte, déposée ce mercredi à Paris.

Marie* a longtemps hésité avant de briser le silence. Pourquoi prendre le risque de se retrouver au coeur d’une tempête médiatique? Que des représailles potentielles s’exercent sur ses enfants? Que sa parole soit remise en cause? C’est en observant Henda Ayari, première femme à avoir porté plainte contre Tariq Ramadan, s’exprimer publiquement et à visage découvert dans les médias que cette Française domiciliée dans les Hauts-de-France, âgée d’une quarantaine d’années, s’est décidée: elle aussi veut être reconnue comme victime du théologien suisse, influent personnage dans le monde musulman.

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Selon les informations de L’Express, Marie est la troisième femme à déposer plainte en France contre l’islamologue de 55 ans pour « viols ». Au pluriel, cette fois-ci, car c’est une série de violences sexuelles étalées au fil des mois qu’elle dénonce. Dans sa plainte, déposée ce mercredi auprès du parquet de Paris et consultée par L’Express, elle décrit pas moins de neuf viols qui auraient été commis de février 2013 à juin 2014 à Paris, Roissy, Lille, Londres et Bruxelles. Comme les deux autres plaignantes, cette musulmane assure avoir été prise dans un engrenage toxique, dans lequel se mêlent emprise mentale, menaces verbales et sévices physiques. Elle a conservé de nombreux messages échangés avec Tariq Ramadan, qui attesteraient de ses dires et que ses avocats entendent transmettre à la justice. Elle est défendue par maîtres Francis Szpiner, Jonas Haddad et Grégoire Leclerc, qui représentent déjà Henda Ayari.

« Elle était flattée qu’il lui consacre du temps »

L’affaire débute au mois de février 2013. Marie traverse une période difficile, elle vient de se séparer de son compagnon et élève seule son garçon et sa fille, sans disposer d’emploi stable. Selon son récit, Tariq Ramadan la contacte par le biais de Facebook. Il lui demande si elle est bien la personne qui a assisté à l’une de ses conférences, tenue une semaine plus tôt. La quadragénaire « était surprise car elle n’avait participé à aucune conférence de Ramadan et fut dans un premier temps méfiante car elle n’imaginait pas avoir affaire réellement [à lui] », écrivent ses avocats dans la plainte. Mais ses doutes sont vite dissipés lorsque l’islamologue se montre face caméra au cours d’une conversation sur Skype.

Avec le recul, Marie pense qu’elle a été ciblée par Tariq Ramadan pour la seule raison qu’elle était abonnée à sa page Facebook officielle. « Elle était surprise et flattée qu’un homme aussi célèbre et occupé puisse lui consacrer du temps », poursuivent les conseils de Marie. Impressionnée par « l’aura » de Tariq Ramadan, Marie s’épanche très vite auprès de lui sur sa vie intime, sans rien occulter « des éléments susceptibles de lui nuire ». Les échanges virtuels sont quotidiens, de jour comme de nuit. L’islamologue se montre d’abord à l’écoute, bienveillant. Il lui distille des conseils religieux, elle qui traverse une période d’interrogations sur sa foi.

Fellation forcée, humiliations…

La première rencontre physique se déroule le 15 février 2013, au Radisson Blue Hôtel de Bruxelles, où Tariq Ramadan est de passage pour une conférence. Selon les dires de la victime, l’islamologue a déjà changé de comportement: il l’ordonne de l’appeler « maître », lui impose de revêtir une tenue affriolante. La victime reçoit une liste d’instructions très précises pour garantir une discrétion: ne pas se présenter à l’accueil, récupérer la clé de la chambre sous le palier…

C’est au moment de l’arrivée de Tariq Ramadan, vers 23 heures, que tout aurait basculé. Selon la plainte, il lui aurait imposé « de force une fellation en lui agrippant les cheveux ». Après un rapport sexuel décrit comme violent, il l’aurait humiliée dans la salle de bain, la traitant de « chienne, pute, salope ». Des sévices qui rappellent celles décrites par Christelle, la seconde plaignante.

Elle coupe tout contact après avoir « eu peur pour sa vie »

Marie ressort de ce rendez-vous bouleversée mais poursuit ses correspondances avec le théologien, qui oscillerait entre menaces et excuses. C’est là que le piège se referme, explique la quadragénaire: elle a, au fil des mois, de nouvelles relations sexuelles avec Tariq Ramadan, entre deux conférences en France ou à l’étranger, qu’elle décrit comme de plus en plus violentes. Huit autres rapports, au total, sont inscrits dans la plainte et sont qualifiés de viols. Selon Marie, l’homme lui impose le silence: il menace de « la réduire en miettes » et de raconter à ses proches toutes les confessions qu’elle lui a faites si jamais elle n’obéit pas à ses désirs.

La spirale infernale prend fin au mois de juin 2014. Marie raconte qu’elle s’extirpe de l’emprise mentale de Tariq Ramadan après une dernière rencontre, à Lille, au cours de laquelle l’homme aurait manqué de l’étouffer au cours d’une pénétration. « Sidérée, tétanisée, ayant eu peur pour sa vie, [elle] décida de ne plus se rendre aux rendez-vous » et « ne plus céder à ses menaces », relatent ses avocats dans la plainte. Après s’être tue pendant près de quatre ans, Marie a décidé de se confier à la justice. Tariq Ramadan, lui, devrait rapidement être entendu sur ces faits. Une source judiciaire confirme à L’Express le dépôt d’une plainte et indique qu’elle est en cours d’analyse.

Le théologien reste mis en examen dans le cadre des deux autres enquêtes pour viols et détenu à la prison de Fleury-Mérogis (Essonne). Contacté, son nouvel avocat, Emmanuel Marsigny, n’était pas joignable dans l’immédiat.

* prénom modifié

Source : L’Express

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