Un peu de cohérence Monsieur le Ministre !

Profession Gendarme a lu pour vous sur Secret-Défiance une analyse très pertinente des propos de Monsieur LE DRIAN, ministre de la défense, sur  les deux arrêts de la Cours Européenne des Droits de l’Homme concernant les associations professionnelles  et le syndicalisme au sein des Armées.

Avec l’aimable autorisation du webmaster du site Secret-Défiance, nous avons tenu à vous faire profiter de cet article. Vos commentaires y seront les bienvenus.

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Que l’on soit ou pas pour les syndicats dans les armées, il y a tout de même une question qui pose problème: c’est la réaction du ministre de la défense à l’annonce des deux arrêts de la CEDH reconnaissant « aux militaires la liberté d’association, laquelle comprend le droit de fonder des syndicats et de s’y affilier. » tout en spécifiant que cette liberté peut avoir des restrictions.

En cela, la CEDH ne fait qu’appliquer l’article 11 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales telle qu’amendée par les Protocoles n° 11 et n° 14 du conseil de l’Europe.

Que dit l’article 11 ?

Article 11 – Liberté de réunion et d’association

Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, y compris le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts.
L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. Le présent article n’interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l’exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l’administration de l’Etat.

A ces arrêts qu’a répondu le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian ?


Les syndicats dans l’armée, ce n’est pas à l’ordre du jour, ça, je peux vous le dire !

Quels sont ses arguments ?


Les syndicats dans l’armée ? « Pas à l’ordre du jour » pour Le Drian sur WAT.tv

Monsieur Le Drian ne mentionne que la seconde partie de l’article 11:


Le présent article n’interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l’exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l’administration de l’Etat. »

Or cette précision n’annule pas la partie 1 de la loi:

Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, y compris le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts.
Cela veut donc dire que les militaires ont le droit de créer des syndicats auxquelles l’état français peut apporter des restrictions. L’état français ne peut donc en aucun cas interdire aux militaires de se syndiquer, une restriction n’étant pas une interdiction.

L’Etat doit donc réfléchir, non pas à comment interdire un syndicat, mais sous quelle forme et avec quelles restrictions ce syndicat existera. Remplacer un syndicat par une amélioration des instances de concertation ne peut pas être envisageable, sauf à reconnaitre que ces instances sont des associations professionnelles.

Mais effectivement cela n’arrangerait pas les affaires du ministère qui pourrait craindre de devoir faire face à des instances qui protégeraient les intérêts professionnels des militaires, tels que forcer le ministère à lutter de façon plus radicale contre les dysfonctionnement de Louvois, par exemple, ou, autre exemple, protéger la santé et la sécurité des soldats en RCA.

Mais la question qui parait essentielle pour tout militaire, favorable ou pas à la création de syndicats dans l’armée, est la suivante:

Les militaires doivent obéissance aux ordres de leurs supérieurs.

Les citoyens doivent respecter la loi.

Il parait inconcevable que le chef des armées également citoyen et chef d’un état qui a ratifié la convention et s’est soumis à une juridiction européenne, ne respecte des arrêts européens que quand cela l’arrange.

Aucune manipulation langagière, coupant la loi en deux et assurant que l’on est favorable au dialogue dans les armées, ne peut se substituer aux arrêts européens, ou alors la France fait appel. Si elle ne fait pas appel, c’est qu’elle accepte ces arrêts et qu’elle les met en application. Mais trouver une solution intermédiaire qui favoriserait le dialogue social sans donner aux militaires les moyens de contrainte, ce n’est pas respecter ces arrêts.

De plus, cela fait 2 ans que l’on entend le ministre dire qu’il est favorable au dialogue social, mais qu’est ce qui a changé ? Et-ce à dire que pour le ministère, le dialogue c’est « cause toujours, tu m’intéresses », un moyen de maintenir le statut quo si favorable au ministère ? Pensez donc, une masse de muets, c’est confortable.

Pourtant, quand au congrès de Toulouse d’octobre 2012, le PS déclare: « Nous sommes l’Europe », quand en décembre 2004, le PS organise un référendum interne sur la Constitution Européenne ou le oui est sorti largement vainqueur (plus de 59 % des voix), et que le premier secrétaire du Parti socialiste François Hollande s’est exprimé pour le OUI, il parait difficile de ne pas assumer ses choix politiques et idéologiques.

Alors, Monsieur le Ministre de la Défense, comment pouvez tenir un discours cohérent sur les droits de l’Homme et sur la nécessité d’adhérer à l’Europe tout en interdisant à une catégorie de Français de pouvoir se défendre et d’être représentée par le moyen de syndicats comme tous les autres Français? Je voudrais bien le savoir ….

Source : SECRET DEFIANCE

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