TRIBUNE. « Sauvegardons la militarité de la gendarmerie »

Le général Marc Watin-Augouard, conseiller au cabinet du ministre de l’Intérieur de 2002 à 2004, fait le bilan du rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur. « Sans notre militarité, nous ne pourrions être responsables de la sécurité sur 95% du territoire », défend ce spécialiste de la cybersécurité qui a été inspecteur général des armées-gendarmerie de 2008 à 2012.

TRIBUNE.-Sauvegardons-la-militarite-de-la-gendarmerie« La zone gendarmerie, longtemps moins touchée par la délinquance de masse, est ouverte aux raids », constate le général Marc Watin-Augouard. (Abaca)

Voici la tribune du général Marc Watin-Augouard : « Dix ans après la loi du 3 août 2009 qui marque le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur, le bilan est globalement positif. Ce transfert était inévitable, en raison de la hausse de l’insécurité qui a dépassé dans l’opinion publique les problématiques de sécurité extérieure. En 2002, la présidentielle s’est jouée sur cette thématique. On assiste au premier glissement vers l’Intérieur. Certains militaires redoutent un démantèlement, annonciateur d’une fusion. Mais l’identité de la gendarmerie n’est pas remise en cause.

Sans statut militaire, il faudrait fermer trois brigades de gendarmerie sur quatre!

Ce transfert nous a conduit à nous redéfinir : nous sommes une force armée chargée de la protection des personnes et des biens, dont les capacités d’action vont au-delà de celles de la police. Notre militarité est essentielle. Sans elle nous ne pourrions être responsables de la sécurité sur 95% du territoire. Or les 2/3 de la progression démographique se localisent dans les zones périurbaines et rurales, là où il n’y a pas de police nationale, pas ou très peu de polices municipales, de forces mobiles, de sécurité privée. Ainsi le seuil du nombre d’habitants au-delà duquel la police prend en charge la sécurité a été porté à 20.000 habitants, seuil qui selon moi pourrait être fixé à 40.000, voire 50.000.

Depuis les années 80, la zone gendarmerie, longtemps moins touchée par la délinquance de masse, est ouverte aux raids et le contrôle social de la société traditionnelle y est affaibli. Aujourd’hui, il faut lutter contre le sentiment d’abandon des territoires, exprimé par certains gilets jaunes. L’Etat doit garantir l’égalité devant les services publics, au premier rang desquels figure la sécurité. Sans statut militaire, si l’on adoptait le modèle de la police, il faudrait fermer trois brigades sur quatre!

La gendarmerie doit s’adapter pour apporter une offre de sécurité, en allant si nécessaire, comme son statut militaire l’y invite, jusqu’au sacrifice suprême. Le colonel Beltrame en est l’héroïque illustration. Sa militarité est son ADN. Elle n’est pas menacée, sauf érosion due à une banalisation. En dehors de toute crise majeure, c’est le risque. La dualité police-gendarmerie est une richesse pour la France. Disposer d’une force à la fois proche de la police et des armées est un atout dans le continuum défense-sécurité. »

Source : Le JDD

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