Tariq Ramadan : l’aveu d’une « double vie » refroidit ses soutiens
Accusé de viols par cinq femmes, Tariq Ramadan a avoué aux enquêteurs avoir eu une relation sexuelle avec l’une d’entre elles.
Le prédicateur voit maintenant ses soutiens prendre leurs distances, notamment au sein de la communauté musulmane.
Rassemblement de soutien Tariq ramadan, accusé de viols, devant le palais de justice de Paris, le 22 février 2018. / Geoffroy Van Der Hasselt/AFP
Écroué à la prison de Fleury-Mérogis (Essonne) depuis début février 2018, visé par cinq plaintes pour viol en France et à l’étranger, le théologien musulman Tariq Ramadan avait jusque-là toujours nié avoir eu des relations avec les plaignantes. Et il avait jusqu’ici bénéficié du soutien d’une partie de la communauté musulmane. Lors de la rencontre annuelle des Musulmans de France (ex-UOIF) au Bourget le 30 mars, leur président Amar Lasfar lui avait exprimé son soutien, le qualifiant de « modèle pour l’islam de France et d’Europe ».
Mais la ligne de défense de Tariq Ramadan, qui soutenait ne jamais avoir trompé sa femme, a été remise en cause mercredi 18 avril, par la découverte de sperme sur une robe appartenant à une plaignante, dont des analyses ADN doivent dire prochainement s’il s’agit de celui de Tariq Ramadan. À la suite de ce rebondissement, l’avocat de l’islamologue a déclaré que ce dernier avait avoué avoir eu des relations sexuelles avec la plaignante, mais pas celles qu’elle dénonce.
Une réputation mise à mal
En effet, si les accusations de viol ne prennent pas auprès des soutiens du théologien qui croient fortement en sa présomption d’innocence, les soupçons autour de sa double vie mettent à mal sa réputation d’exemplarité. Par le passé, le théologien avait plusieurs fois déjà fait l’objet de rumeurs concernant des aventures extraconjugales. « Dans les milieux musulmans croyants, que Tariq Ramadan ait eu des relations extraconjugales est une chose considérée comme très grave, inacceptable » a déclaré jeudi 19 avril Saïd Branine, le responsable du site communautaire Oumma.com au quotidien Libération.
Romain Caillet, spécialiste de l’islamisme, compare l’affaire Tariq Ramadan à un scandale sexuel survenu au Maroc en 2016, impliquant deux responsables du PJD, le parti islamiste au pouvoir. Moulay Omar Benhammad, marié et père de sept enfants, et Fatima Nejjar, veuve et mère de six enfants, avaient été surpris par la police en pleine « posture sexuelle ». Tous deux vice-présidents du Mouvement unicité et réforme, l’aile religieuse et le bras idéologique du PJD, ils avaient été « suspendus de toutes les structures du mouvement ». « Cela aurait été très simple pour le PJD de crier au complot pour protéger ces deux représentants, mais le parti a pris la décision de les exclure, » rappelle Romain Caillet. Autrement dit, la balle est aujourd’hui dans le camp des Musulmans de France, instance représentative des Frères Musulmans en France et principal soutien de Tariq Ramadan.
Les soutiens se font rares
Si préalablement à l’aveu de relations sexuelles extra-conjugales, les soutiens de l’islamologue n’étaient pas exclusivement des figures proches des Frères Musulmans, l’ex-UOIF demeure désormais le seul soutien du théologien. Une campagne de soutien, qui avait récolté plus de 85 000 €, a été clôturée mercredi 18 avril à une heure du matin, sans avoir atteint son objectif de 150 000 €. Une première campagne de crowdfunding avait permis de récolter 107 000 €.
« Il faut maintenant attendre la réaction des Musulmans de France, qui jusque-là ont soutenu Ramadan mais qui semblent attendre les résultats des analyses ADN du sperme retrouvé sur la robe de la plaignante. Si les résultats sont positifs, continuer à nier la double vie de Tariq Ramadan relèverait définitivement du complotisme. » résume Romain Caillet.
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