Quand Beauvau met le RAID au piquet pour… un livre sur le Bataclan

Le chef du RAID, Jean-Michel Fauvergue, a dû quitter son poste début mars.

Le chef du RAID, Jean-Michel Fauvergue, a dû quitter son poste début mars. – Thibault Camus/AP/SIPA
Cinq mois après la parution d’un livre-témoignage sur la nuit du Bataclan, le médecin chef du RAID, Matthieu Langlois, est convoqué devant le conseil de discipline. Le patron du service, lui, a déjà été limogé. Ambiance à l’Intérieur…

Et pendant ce temps là, alors que l’état d’urgence se prolonge en France et que les services de renseignement britanniques et américains sentent poindre la menace, la Place Beauvau, elle, se concentre sur un livre. Oui, vous avez bien lu : un livre.

Le témoignage publié par le médecin-chef du RAID, Matthieu Langlois, qui a raconté ce qui s’est vraiment passé au Bataclan, dans la nuit du 13 novembre 2015 (co-écrit avec notre collaborateur à Marianne, Frédéric Ploquin). Un livre dont le projet avait été validé (oralement) par le service de communication de l’Intérieur, avant que le manuscrit n’obtienne le feu vert du chef du RAID, Jean-Michel Fauvergue, à la veille de sa publication au mois d’octobre dernier (chez Albin Michel). Sauf que ces vérités n’ont pas plu à tout le monde et que le ministre de l’Intérieur de l’époque, Bernard Cazeneuve a aussitôt sommé le directeur général de la police (DGPN), Jean-Marc Falcone, de sévir. Ce qu’il a fait séance tenante en saisissant l’inspection générale de la police nationale.

Jean-Michel Fauvergue limogé

Bernard Cazeneuve envolé pour Matignon, le bras armé n’a pas molli. Et le premier couperet est tombé cinq mois plus tard, le 6 mars. Comme une urgence à régler avant l’élection présidentielle, le DGPN a convoqué le patron du RAID pour lui dire qu’il était limogé. A cause de ce livre qu’il n’a pas su, ou pas voulu, censurer, comme on le lui avait demandé oralement. Parce qu’il n’a pas su empêcher le docteur Langlois de s’exprimer dans les médias, sachant que sa première interview, au Figaro Magazine, avait été accordée avec l’aval de la direction de la communication du ministère. Limogé, donc, en pleine crise terroriste et malgré des états de service largement honorables.

Premier coup de fusil parti sans que Bruno Le Roux n’ait vraiment eu le temps de découvrir les tenants et aboutissants de ce dossier « sensible ». Ni de comprendre quels égos avaient été froissés par cet ouvrage au demeurant peu polémique et plutôt bon pour le moral d’une police au bord de l’épuisement et de la crise de nerfs, face à des hiérarques plus prompts à manier la matraque que la décoration –même après les coups durs.

Le second coup de feu est à venir, puisque le médecin-chef, qui n’est pas policier mais employé de façon contractuelle par l’Intérieur, est convoqué le 23 mars devant le conseil de discipline, entre un voyage à Londres et un autre à Oslo, pour partager avec ses homologues étrangers le savoir-faire des médecins français en matière de tuerie de masse. Il comparaitra accompagné d’un avocat et épaulé par un syndicaliste, face à un conseil en service commandé. Un coup dur pour un service, le RAID, qui a beaucoup enduré depuis les attentats de 2015, mais qui fait face à sa mission – on l’a encore vu samedi dernier lors de l’attaque perpétrée dans l’enceinte de l’aéroport d’Orly. Une maladresse de plus à l’encontre d’une police que cette gauche aura décidément peu comprise – disons tout de suite que Matthias Fekl, ministre de l’Intérieur pour les deniers instants du quinquennat, n’y est strictement pour rien !

Source : Marianne

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