La fin du consumérisme porté à son paroxysme

Par WD

La pénétration de la sous-culture américaine dans l’Europe dès 1945 (au-delà de l’imposition du chewing-gum, du coca, du rock’n’roll et du cinéma tueur d’indiens) a eu deux effets indésirables. Le premier touchait la culture, les mœurs, la vision du monde. Cette dernière était multidimensionnelle sur notre continent du fait de la pluralité des terroirs. Le deuxième s’était accaparé la dimension matérialiste de nos sociétés bien distinctes alors. Sans parler de l’ingérence dans les cœurs du « Tout est à vendre, ce n’est qu’une question de prix », il est évident que le leurre du bonheur par l’acquisition des biens matériels avait tourné les têtes des européens. Il en était fini de « Tout ce qui a un prix n’a que peu de valeur ». Ils ont voulu vivre « mieux que leurs parents » en achetant tout ce que la propagande marchande leur proposait. Le crédit compensait leur manque de moyen et les rendait en effet secondaire dépendant d’un système pervers qui hypothèque le futur pour une satisfaction présente. Le sommet de l’arnaque est le système Revolving Credit Facility qui démontra sa faille lors de la crise non résolue des subprimes.

Cette course au bonheur par le palpable, somme toute artificiel, est source d’insatisfaction éternelle du fait du renouvellement constant des biens matériels dont le rythme est de plus en plus effréné. Nous parlons même pas de l’obsolescence programmée qui force l’achat de remplacement. La force marchande joue subtilement sur le fait humain qui fuit l’effort, la peine, l’adversité tout en étant attiré par la facilitée, la jouissance, le rêve, l’irresponsabilité. Tous les meilleurs slogans publicitaires exploitent cet intrinsèque humain qui fuit la douleur et veut le plaisir.

Dans cette folie matérialiste, il s’est combiné un rapport exhibition/voyeurisme qui débouche sur une compétition de mauvais aloi. Quel que soit notre statut social, il faut paraître supérieur aux autres. Il ne s’agit pas de démontrer ce que nous sommes réellement, nos qualités, notre charisme, nos capacités propres élevées, nos dons, mais bien de faire illusion sur des bases artificiellement établies par les manipulateurs de ficelles sociétales. Gueux ou princes, nous devons donner l’illusion de notre prétendue hauteur à notre périmètre existentiel. C’est le syndrome du Paon rêvant d’Icare. Il nous fait consommer plus que de raison pour satisfaire ce paradigme d’éblouissement. Cet escalade consumériste fait que nous gaspillons inutilement. Nous engendrons des déchets au point que les centres de recyclages sont dépassés par le volume. Les centres d’enfouissement sont saturés et on fougue à des pays deshumanisés notre merde.

Dans ce culte du bonheur par le matériel, il est une déviance dramatique. Celle de consommer à outrance les rapports humains. Nous ne cherchons plus la finesse et la profondeur des liens entre les gens, nous les consommons. Tant que les collectifs, associations, groupements divers et variés nous intéressent, nous procurent quelque chose, nous restons dans leur sérail. S’ils ne nous apportent plus une pleine satisfaction, un plein bénéfice, nous les quittons sans explication, sans mise au point ni remord. Nous avons consommé un bien intangible, ni plus ni moins et nous allons ailleurs consommer d’autres apports humains au gré de nos humeurs ou besoins du moment. Même sur un plan plus basique comme les relations amoureuses, nous consommons. Nous ne cherchons plus l’amour avec ses strates qui forment un duo, base fondamentale dans la société humaine, nous consommons du sexe voire des performances plus ou moins malsaines ou non naturelles. Dès que la consommation est satisfaite ou lasse, nous en changeons. Peu importe si cet acte engendre des drames humains, familiaux, moraux. Tel est notre bon plaisir.

C’est la même règle dans le cadre familial, de l’amitié, des relations de quartiers, de travail, etc. Tant que l’avantage est supérieur à l’investissement personnel que l’on y met, tout va bien, le cycle perdure. Sinon, on se retire de ce jeu en cherchant une nouvelle conjoncture plus favorable à nos aspirations égocentriques.

Après on se demande pourquoi tout va mal dans notre société. Depuis 77 ans les rapports humains sont frelatés par ces jeux de duplicité inconsciente de surcroît. Alors, imaginons bien qu’avec l’ingénierie sociale actuelle, les manipulations à but avoué de dégénérescence sociétale, nous ne sommes pas prêts à inverser la tendance délétère. La crise Covid a eu au moins le mérite d’en extirper toute l’essence occulte de ce fiasco sociétal. Toutefois, la volonté de rester dans son cercle de confort, si artificiel soit-il, est plus forte que la raison. Certains acceptent même le traitement génique pour pouvoir continuer à consommer comme avant, c’est dire dans quelle errance ils sont. Il faut dire que la liberté a un prix et ils n’ont pas un kopeck à y consacrer.

Nous espérons qu’avec la crise humaine actuelle qui percute deux blocs idéologiques radicalement opposés, la vraie dimension humaine reprendra ses droits et ses devoirs, que les rapports humains redeviennent francs, entiers et généreux. La fin de l’abondance et le début des privations devraient naturellement délivrer les qualités humaines qui croupissent sous la fange du modèle sociétal américain.

Volens cogitandi.

WD

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