Isabelle Riquet : la gendarmerie chevillée au corps

L’heure de la retraite a sonné pour la capitaine de gendarmerie, Isabelle Riquet, qui faisait partie, en 1983, de la première promotion féminine de la gendarmerie. (Photo D.R.B.)

Elle avait été de la toute première promotion de femmes gendarmes en France. La capitaine Isabelle Riquet, arrière-petite-fille, petite-fille, fille et mère de gendarme, va désormais mettre de côté les soucis de l’arme puisque sonne l’heure de la retraite.

L’heure de la retraite a sonné pour la capitaine de gendarmerie, Isabelle Riquet, qui faisait partie, en 1983, de la première promotion féminine de la gendarmerie.
L’heure de la retraite a sonné pour la capitaine de gendarmerie, Isabelle Riquet, qui faisait partie, en 1983, de la première promotion féminine de la gendarmerie. (Photo D.R.B.)

Elle n’a pas encore quitté la caserne de Guebriant, à Saint-Brieuc, qu’elle manque déjà à ses gendarmes. Cet été, la capitaine Isabelle Riquet sera partie à la retraite. Elle avait été le premier officier à commander en second la compagnie de gendarmerie de Saint-Brieuc, en 2015. Avec un tempérament qui a conquis les troupes : « On va perdre beaucoup », réagit un militaire du Psig. « C’est un officier apprécié, parce qu’elle est toujours sur le terrain, avec douceur, sang-froid. C’est quelqu’un qui aime le dialogue et qui est toujours accessible, bienveillant. »

Parler de troupes n’est pas tout à fait juste. Car si elle a choisi la gendarmerie, Isabelle Riquet n’aurait pas aimé l’armée. « Il y a dans le choix militaire l’idée qu’un jour, on peut prendre la vie, alors que, moi, je suis entrée en gendarmerie pour aider les gens, c’est différent ». Et c’est presque une inclinaison héréditaire. Elle est arrière-petite-fille, petite-fille, fille de gendarme, « un père officier qu’elle admire ». Mariée à un gendarme. Et mère de trois enfants, dont un fils… devenu gendarme. Elle a rencontré son mari à l’école des bleus, à l’occasion de la toute première promotion mixte de France.

« Je m’y suis engouffrée »

« J’ai eu la chance de bénéficier, en 1983, de l’ouverture des portes de la gendarmerie aux femmes. Je m’y suis engouffrée. J’ai ainsi fait partie de la toute première promotion, « Sainte Geneviève », la bien nommée qui a rassemblé 160 filles, dont 154 ont été au bout de la formation, contredisant les prédictions les plus pessimistes. »

« Dans notre métier, il faut veiller particulièrement à ce que l’usure ne s’installe pas, sans quoi nous ne sommes plus efficaces », confie Isabelle Riquet.
« Dans notre métier, il faut veiller particulièrement à ce que l’usure ne s’installe pas, sans quoi nous ne sommes plus efficaces », confie Isabelle Riquet. (Photo D.R.B)

Première affectation : la brigade de Tours. « Je me suis retrouvée dans les locaux où mon arrière-grand-père avait failli mourir, intoxiqué dans son sommeil par un poêle, à l’époque où les plantons dormaient sur place. » Elle découvre un métier « qui se fait à plusieurs », impliquant rigueur, technicité et disponibilité humaine. Et qui vous sature la mémoire d’histoires souvent dramatiques. Alors, elle « la vide » régulièrement, pour la « remplir encore ». Oublier, se confronter. « Dans l’action, nous enfouissons nos états d’âme, ils peuvent ressurgir à la faveur d’un fait anodin alors que nous sommes en situation de fragilité temporaire. Il faut en tenir compte et savoir le déceler quand les militaires se cachent derrière une carapace. »

« Je n’ai pas pu l’empêcher »

Elle n’a douté qu’une fois du sens de sa mission. Elle avait pris dans son bureau deux jeunes, qui conduisaient sous stups, pour leur expliquer les risques. Quand elle a été appelée pour un accident dramatique, impliquant d’autres jeunes. « Je n’avais pas pu l’empêcher, alors j’ai eu la sensation que ce qu’on faisait était inutile, j’avais toujours cru en ce que je faisais, la prévention… »

Mais la foi revient. Et, avec elle, des convictions. « L’écoute, et le temps qu’on passe avec les gens, ils nous le rendent. Ils nous ont identifiés parfois comme la bouée de secours, parce qu’ils savent qu’on répondra… Tu dois les écouter. »

Un cambriolage dans la campagne : la capitaine, de permanence, se rend sur place.
Un cambriolage dans la campagne : la capitaine, de permanence, se rend sur place. (Le Télégramme/Dimitri Rouchon-Borie)

« S’accorder du temps »

La découverte du commandement a ancré cette foi davantage. Avec un respect du gendarme, de la base au sommet. « On peut demander beaucoup, mais il faut un échange, une reconnaissance mutuelle. Dans notre métier, il faut veiller particulièrement à ce que l’usure ne s’installe pas, sans quoi nous ne sommes plus efficaces : pour pouvoir donner aux autres de l’écoute et du temps, il faut savoir s’accorder des temps de pause pour se ressourcer. Le rôle de la hiérarchie dans cette vigilance bienveillante est indispensable. La relation humaine fait tout. »

« Elle est admirable »

« J’ai eu du mal à laisser mes gars », dit-elle encore de son départ de Fougères (35). À Saint-Brieuc, c’est l’inverse qui s’annonce. « C’est quelqu’un d’admirable », explique le chef d’escadron Matthieu Glavieux, ancien commandant de la compagnie de Saint-Brieuc. « Isabelle a la gendarmerie chevillée au corps. Portée par une intense rigueur de travail, une disponibilité hors-norme et une énergie incommensurable, je pense sans trop me tromper qu’au-delà de nos grades et rangs respectifs, tout le monde partage ce sentiment. Pionnière elle a été, pionnière elle restera. »

Source : Le Télégramme

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