INFO LE POINT. Le ministère de l’Intérieur commence à payer les heures supplémentaires

C’est la principale revendication de la majorité des policiers, la Place Beauvau s’engage à solder sa dette à partir de décembre 2019.

19528058lpw-19529540-article-jpg_6588684_660x281Hasard du calendrier ? Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, est l’invité ce jeudi soir de L’Émission politique de France 2. Mardi 15 octobre, le directeur général de la police nationale, Éric Morvan, a diffusé une note à l’ensemble de ses directeurs – que Le Point a pu récupérer – intitulée « Campagne d’indemnisation exceptionnelle des heures supplémentaires pour les personnels de la police nationale ».

« C’est un sujet qui était à l’ordre du jour dès décembre 2018 avec les organisations syndicales représentatives, commente-t-on Place Beauvau. Convaincu par les arguments du ministre, Édouard Philippe a arbitré en faveur d’un règlement dès la fin de l’année 2018. On était bien loin de l’émission de télé. »

Selon un récent rapport parlementaire, les policiers auraient cumulé près de 50 millions d’heures sups non payées. Chaque direction détient la maîtrise de son stock d’heures et de sa méthode pour les écouler… sans trop grever son budget de fonctionnement. Par exemple au Service de la protection (SDLP, ex-SPHP), l’un des services les plus « gourmands », de nombreux officiers de sécurité ont préféré profiter d’un retrait d’activité en continuant de percevoir leur traitement. Certains d’entre eux ont en effet cumulé l’équivalent de 3 à 5 ans d’heure sups. « On est plus d’une centaine dans ce cas », précise l’un des fonctionnaires qui avait bataillé pour faire reconnaître les abus de sa direction en matière d’heures supplémentaires non rémunérées.

La gestion de Frédéric Auréal, l’ex-patron du SDLP, a pu déconcerter : Beauvau paie le traitement de fonctionnaires qui ne sont plus sur le terrain et qui ne sont pas non plus à la retraite. Aussi le recrutement d’un agent au sein du SDLP compte double. Est-ce sa méthode qui est visée quand le patron de la police affirme : « La récupération non maîtrisée de ces heures supplémentaires aurait un impact négatif sur l’organisation des missions de police. »

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400 heures par agent maximum

Les heures sups feront bien l’objet d’une rémunération en 2019, selon le préfet Éric Morvan. Dans sa note, il indique la méthode à suivre : elles figureront dès le mois de décembre sur les bulletins de paie. Tous les policiers qui dépassent 160 heures par mois sont concernés, du gardien de la paix de sécurité publique au CRS en passant par le fonctionnaire de la police technique et scientifique. « Le nombre maximal d’heures qui seront indemnisées est de 400 heures par agent au taux horaire de 12,47 euros brut de l’heure », précise la note. Un montant que certains syndicats comme Alliance-Police nationale, organisateur de la manifestation unitaire du 2 octobre qui a mis près de 22 000 policiers dans la rue notamment pour le paiement des heures supplémentaires, jugent inacceptable dans la mesure où « le traitement est le même pour tous, quels que soient la catégorie d’emplois et le grade ».

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Éric Morvan a également prévu un calendrier de mise en œuvre de la campagne de collecte des heures : elle commencera le 18 octobre et devrait se terminer le 31 octobre pour le comptage, selon chaque agent et leur rémunération.

Le ministère de l’Intérieur devrait continuer le même effort en 2020, selon nos informations. Il prévoit un budget de 26 millions d’euros à cet effet. « Il faut apurer la dette née de la suppression de 12 500 postes à partir de 2007 et de l’engagement des forces de l’ordre à la suite des attentats de 2015. Au final, nous réorganiserons le temps de travail pour empêcher la reconstitution d’un stock massif d’heures supplémentaires », explique le cabinet du ministre de l’Intérieur.

Si cela aboutit, Christophe Castaner pourra s’enorgueillir d’être le premier titulaire de la Place Beauvau à avoir trouvé une solution pérenne à une vieille revendication qui faisait notamment s’insurger Frédéric Péchenard, ancien patron de la police en ces termes : qui accepterait de travailler gratuitement ?

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Source : Le Point

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