Du sida au covid, l’humanité a sombré dans la peste morale

Basculement éthique en l’espace d’une génération

Comment la tyrannie a remplacé la médecine, et la délation l’empathie.

samedi 7 août 2021, par Lionel Labosse

L’humanité a survécu à la lèpre, à la peste, à la variole, au choléra, à la polio, à Hitler, à Staline, au cancer, au sida, et une épidémie moyenne, qui ne laissera pas la moindre trace sur la pyramide des âges d’aucun pays quand on la comparera ne serait-ce qu’aux pandémies du XXe siècle, a raison de la démocratie, de la liberté et de toutes les grandes idées des Lumières. Je suis un peu trop vieux pour avoir connu la peste et le choléra, mais les témoignages que j’en ai lus (Journal de la peste de Samuel Pepys par exemple), montrent que tout le monde ne cédait pas forcément à la panique, peut-être parce que le rapport à la réalité était immédiat, au sens littéral sans médias pour répandre la peur. En revanche j’ai pris la vague du sida en pleine face dans mon adolescence. J’avais 15 ans en 1981 quand le mot et la chose ont fait leur apparition en même temps que je découvrais mon goût pour les garçons. Cet article sera donc consacré à ce parallèle entre deux maladies virales, avec comme fil rouge : comment se fait-il que nous ayons essuyé cette vague terrible du sida il y a quarante ans sans céder à la panique, alors que la vaguelette du covid fait sombrer l’humanité dans une peste morale bien plus grave que cette grippe ? Et j’en demande pardon par avance, je vais un peu raconter ma vie pour argumenter, à l’instar de mes illustres prédécesseurs Montaigne ou Rousseau.

Guerre de 14-18, antibiotiques et médiatisation des maladies

Avant la généralisation des antibiotiques et de certains vaccins, c’est-à-dire en gros après la fin de la Seconde Guerre mondiale, période qu’ont traversée beaucoup de personnes âgées ciblées par le covid en 2020-21, il était courant de perdre un ou deux enfants en bas âge. Un oncle âgé de 86 ans et ma mère ont échappé de justesse respectivement à la diphtérie et à une terrible grippe quand ils étaient enfants. Vive le vaccin contre la diphtérie ! Mon père né en 1939 a perdu deux sœurs, tantes putatives qui n’ont pas eu la chance de mourir du covid octogénaires en 2020, mais sont mortes en bas âge de maladies qui maintenant seraient bénignes. À cette époque on disait « c’est la vie », on les enterrait au coin du cimetière, dans de petits cercueils avec une colonne tronquée sur la tombe, et on se consolait en leur faisant un petit frère posthume, ce qui n’empêchait pas le chagrin de vous poursuivre à vie.
Au fil de l’augmentation de l’espérance de vie dans la seconde moitié du XXe siècle, des maladies dont on parlait à peine à l’époque où l’on ne vivait pas assez vieux pour qu’elles vous fauchent, ont acquis leur célébrité : cancers et maladies cardio-vasculaires. Des associations se sont créées parce que des retraités en bonne santé avaient le temps de s’en occuper, et la diminution du temps de travail et les congés payés, la disparition des guerres récurrentes à chaque génération qui nous empêchaient de penser à autre chose, tout cela libérait également du temps pour que des adultes actifs puissent s’investir. Les médias ont parlé de ces maladies à longueur de temps, et ce qui était de l’ordre du destin et de l’inéluctable est devenu une tragédie qui venait à point combler la place laissée vacante par la raréfaction des guerres. En 2021, il semble que pour la moitié de nos concitoyens, cette petite épidémie soit pire que la guerre de 14-18, et l’on retrouve chez des personnes d’âge mûr ou âgées le même comportement de culpabilisation à l’égard des jeunes que celui que dénonçait Gabriel Chevallier dans La Peur : il était entendu que les jeunes devaient se sacrifier pour les civils, et s’ils ne le faisaient pas ou le faisaient sans crâner, c’était la honte pour leurs parents planqués de l’arrière. La citation ou la médaille avaient à peu près la même valeur que le QR code actuel.
La réponse politique au cancer ou aux maladies cardio-vasculaires est demeurée il me semble dans des limites raisonnables, quoique l’augmentation délirante du prix du tabac excède ces limites, car elle prive les pauvres de ce plaisir, et engendre un marché parallèle qui nuit gravement à la tranquillité dans mon quartier, où n’habitent pas les preneurs de ce genre de décisions. En France, on peut pour l’instant encore consommer à peu près autant d’alcool que l’on veut, même s’il est certain que cela nuit à la santé, ce qui n’a pas empêché nos dictateurs et leurs sbires de profiter de cette crise pseudo-sanitaire pour sonder de temps à autre des prohibitions locales ou temporaires de vente d’alcool. On pourrait aussi interdire l’avion, les restaurants, etc., à toute personne obèse ou dont les bronches sont abîmées par le tabac, le foie par l’alcool, etc., parce que cela augmente le risque de mourir des deux premières causes de mortalité, qui font autour de 850 morts par jour en France sur la moyenne de 1600 morts (en augmentation inéluctable pour les 25 prochaines années, vu la forme de la pyramide des âges). Les confinements et fermetures de salles de sport et autres piscines ont aggravé l’obésité qui était la comorbidité la plus grave pour ce virus en ce qui concerne les jeunes. Un jeune de 24 ans de ma connaissance, a eu la plus longue hospitalisation que j’aie connue autour de moi juste à cause d’une obésité pourtant moyenne, et ces criminels recommencent avec leur « passe » : me voilà à nouveau interdit de piscine, alors que j’avais pu en faire pendant le 2e confinement sur ordonnance médicale !

Émergence du sida : éthique de responsabilité

Mais abordons le thème central de cet article : le sida, sa survenue et les réactions qu’il a engendrées. Voici une maladie émergente nouvelle, mortelle presque à 100 % jusqu’à l’arrivée des traitements, c’est-à-dire pendant presque vingt ans, avec un délai de survie très variable selon les personnes. Cette maladie tuait indépendamment de l’âge, et en raison de son mode de transmission, a atteint beaucoup de jeunes (sexualité, toxicomanie) et quelques personnes âgées (transfusions), si l’on schématise (il y eut aussi des vieux gays et des jeunes transfusés !). Or il aurait été possible d’interdire de façon autoritaire sous prétexte du sida les lieux de consommation sexuelle (clubs échangistes hétéros, saunas et clubs gays, prostitution), surtout à une époque (début des années 1980) où l’homophobie était bien plus répandue que maintenant. Mais étonnamment (et heureusement) c’est la raison qui l’a emporté, et l’on a axé la prévention sur l’information et la responsabilité. Heureusement en France, Jean-Marie Le Pen avait utilisé le terme « sidaïques », et proposé des « sidatoriums » à l’exemple je crois de Cuba, et cela a servi de repoussoir pour qualifier toute personne qui proposait ces mesures répressives d’« extrême drouate », d’où l’utilisation de « sidatiques », vite remplacé par « séropositif » et « malade du sida ». Le covid étant une maladie fulgurante, on n’a pas cru nécessaire d’inventer d’équivalents, à part « covid long », mais cela ne désigne que la maladie, pas le malade. Songez au ridicule qu’il y aurait à prétendre que Giscard, officiellement mort du covid après des années de maladie cardio-vasculaire, serait « covidique » ou un truc comme ça, et non pas cardiaque. On finançait des distributions de préservatifs gratuits, des échanges de seringues, ce qui faisait accuser les promoteurs de ces mesures de favoriser la débauche et la toxicomanie, mais là aussi la raison l’a emporté. On n’a jamais criminalisé la transmission du virus, alors que d’autres pays l’ont fait, comme la Suède (et je crois que c’est toujours en vigueur même si la maladie n’est plus du tout mortelle ; cf cet article.)

Avoir 17 ans au temps du sida

Je vais passer à la première personne pour témoigner de ce que j’ai vécu, en commençant par un extrait d’un essai publié en 2004, Altersexualité Éducation & Censure :
« J’ai fait partie de cette génération qui a découvert en même temps — et dans la solitude — l’homosexualité, l’homophobie et le sida, dont on commençait à peine à parler. Joli paquet surprise quand on a dix-sept ans.
Quand je dis dans la solitude, je veux dire que, croyez-le si vous voulez, jusqu’à l’âge de dix-huit ans, je n’avais pas rencontré une seule personne pour parler de tout cela. J’espérais toujours être rattrapé par l’hétérosexualité ; heureusement j’ai couru plus vite qu’elle ! C’est à cet âge que j’ai connu mon premier mort du sida. Il avait vingt-trois ans, c’était en 1983, et pour son père, qui passait ses soirées à casser du pédé, il n’est pas mort de ça. J’ignore même s’il est comptabilisé dans les statistiques de cette maladie, car ce n’est que quelques années après que j’ai identifié la cause de sa mort. Il s’agissait du frère de la petite amie d’un cousin. Il paraît qu’il n’y avait que trois personnes à son enterrement. Ce que j’en dis ici, je l’ai entendu dire à ce cousin. Ces paroles étaient tombées dans mes oreilles comme des gouttes d’huile bouillante. À l’âge où l’on s’occupe à « tuer le père », apprendre qu’un père « tue » son enfant… Que cette mention dans ce livre te soit une deuxième sépulture, Blaise.
C’est de cette expérience que date une certaine force intérieure, un mépris relatif des risques et convenances. Cela me vient aussi d’une faculté de me projeter dans l’avenir, qui m’a fait résister, comme une grande proportion des adolescents altersexuels, à la tentation du suicide. Cela provient enfin, quelques années plus tard, de deux ou trois agressions homophobes dont j’aurai la chance de me sortir. Je me considère comme un survivant. Ce que je vis c’est du rab, alors la respectabilité, vous savez, cet oursin que 95 % des gens semblent avoir sous les fesses chaque fois qu’ils veulent s’asseoir, moi, je m’en suis offert l’ablation à 17 ans. Je n’arrive pas à jouer sérieusement le métier d’homme sérieux, mais ce n’est jamais par provocation ; c’est une obsession naïve de transparence, de légèreté, de gaieté. »

Vérité et mensonge : basculement et manipulation par la peur

Fin de l’auto-citation. C’est entre 1981 et 1984 (j’avais donc de 15 à 18 ans) que le sida fut identifié, puis nommé, et son virus découvert. La peur était palpable, mais les médecins et les autorités de santé s’employaient alors majoritairement à rassurer tout en informant, et l’on se rappelle les incessantes émissions de radio ou de télévision ressassant les mêmes explications sur le fait que non, on ne pouvait pas attraper le sida en embrassant un séropositif ni en utilisant des toilettes ; le sida se méritait en prenant un peu de risques, il fallait se faire enculer ou piquouzer, aïe ! Ce n’était pas donné à tout le monde ! En étant rationnel à cette époque, si l’on écoutait les médias mainstream, on n’avait pas peur : il suffisait d’utiliser des préservatifs, point barre, et l’on faisait fi des 5 % d’abrutis qui nous serinaient que l’on pouvait attraper le virus aux toilettes ou je ne sais quoi, à peu près les mêmes qui croient aujourd’hui qu’une muselière empêche d’attraper le covid, sauf que maintenant ils sont 95 % parce que le pouvoir et les médias mainstream accréditent ce mensonge !
Basculement en 2020 : la maladie à la mode ne présente qu’un risque infinitésimal pour les jeunes, mais on veut vous enculer (au sens figuré !) en vous forçant à devenir toxicomane ! Le pourcentage de la population terrorisée par le sida et s’interdisant de vivre y compris chez les gays était sans doute moins important que de nos jours, mais il existait et existe encore, favorisé par la persistance de ces séances scolaires sur lesquelles j’ai beaucoup travaillé comme militant entre disons 1997 et 2008. De mon point de vue ces séances étaient bienvenues pour permettre un débat rare dans certaines familles sur la tolérance en matière de « diversité sexuelle ». C’est une expression positive que j’avais inventée et tenté d’imposer en lieu et place de « lutte contre l’homophobie » pendant cette deuxième expérience militante de ma vie. Mais ces interventions en milieu scolaire ont été instrumentalisées par l’État pour greffer dans la sphère laïque le sentiment de peur ou de honte en tout cas de rejet lié à la sexualité distillé traditionnellement par les religions. On bassine les enfants avec un narratif anxiogène associé à la sexualité : tout n’est que harcèlement, pédophilie, inceste, MST, grossesses non désirées, misogynie, « gros relous », j’en oublie. Donc malgré un contexte global de discours rassurant, le narratif sous-jacent était et demeure celui de la peur, et c’est ce noyau qu’on a fait exploser et qui domine à l’aube de l’ère coronalithique. Avec la déferlante « balance ton porc », rares sont les féministes qui persistent à affirmer que malgré toutes ces tares qui existent bel et bien, l’amour est quand même la drogue la moins dangereuse et la moins chère, le bon vieux « café du pauvre ». J’ai envie de reprendre la leçon d’Alfred de Musset sur les risques de l’amour pour évoquer l’attitude des terrorisés du Covid qui semblent prêts à accepter de porter la muselière et de ne plus embrasser leurs enfants jusqu’à la tombe. Je n’ai changé que deux mots :
« Adieu, Camille, retourne à ton masque, et lorsqu’on te fera de ces récits hideux qui t’ont empoisonnée, réponds ce que je vais te dire : Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux ou lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux. On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière, et on se dit : J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être masqué créé par mon orgueil et mon ennui. »
Si je voulais préciser la filiation entre médecins terroristes et rassuristes, je prendrais l’exemple de l’utilisation du préservatif pour la fellation. On se rappelle avec consternation les débats philistins entre médecins de plateaux-télé à l’époque sida, expliquant avec la bouche en cul de poule que certes la possibilité de transmission par le liquide pré-séminal était faible, mais pas nulle, et que donc il valait mieux mettre un préservatif pour les fellations, que d’ailleurs il en existait au gôut fraise, etc. Les autres hésitaient à s’exprimer parce que le principe de précaution faisait que si un seul abruti prétendait avoir été contaminé de cette façon, il pourrait leur nuire. On retrouve cela à la puissance 10 avec les plaintes des khmers bleus de la « santé » pour « mise en danger de la vie d’autrui » lorsque Martine Wonner ou des étudiants de l’IHU de Marseille ne portent pas le masque en public. Et le « goût fraise » censé rendre les préservatifs plus glamour trouve son équivalent dans les masques au design, au tissu et aux couleurs tendance. En ce qui me concerne, je ne prends que des masques chirurgicaux, que je passe à la machine jusqu’à ce qu’ils se délitent, pour qu’ils soient le moins glamour possible, en plus de perdre au fil des lavages toutes les saloperies chimiques qu’ils peuvent receler. Toutes les études scientifiques vont dans le sens d’une chance de contamination infinitésimale dans les deux cas, mais il suffisait qu’un quidam qui mène une double vie et trompe sa femme en se faisant enculer bien profond se fasse contaminer, il prétendrait que non, pas du tout, c’est au terme d’une soirée bien arrosée en regardant un match de foot avec des potes, que sans le faire exprès, alors qu’il s’était assoupi sur le canapé, sa bouche s’est retrouvée par hasard au contact du gland d’un copain qui avait prolongé le foot par un porno ; quel malheur ! L’histoire de la muselière sur le nez en permanence, c’est pareil, sauf qu’avec le covid, la bande de psychopathes qui dirige le monde a réussi à faire croire à la moitié de la population que s’ils ne portent pas la muselière ils vont mourir dans d’atroces souffrances. Pour faire de l’humour je vais faire mon Raoult : le directeur de l’IHU rappelle fréquemment dans ses vidéos qu’à l’IHU ils basent leurs articles sur « les plus grosses séries au monde », eh bien en ce qui me concerne c’est la même chose ! Je passerai les détails en ce qui concerne la fellation pour ne pas heurter les âmes sensibles, mais cela fait disons depuis le mois de février 2021 que je fréquente massivement les cercles anticovidistes, où l’on s’embrasse, se serre la main, se donne des accolades à tour de bras ; j’ai embrassé des centaines d’inconnus ou de connus, n’ai respecté aucune « distanciation physique », ai porté la muselière le moins possible, et aucun d’entre nous n’a attrapé quoi que ce soit ; un certain nombre cherchent d’ailleurs désespérément à attraper le fameux variant Delta, en vain. Alors j’ignore si mon expérience constitue la « plus grosse série au monde », en tout cas je peux témoigner que la « distanciation physique » et le masque, c’est de la folie, comme l’expliquent toutes les études sérieuses publiées sur le sujet (voir cv19.fr, Laissons les médecins prescrire et
Alternatif bien-être.com.

« Quel bogosse infecté au variant Delta me roule une pelle pour avoir un Passe ? »
© Lionel Labosse

La question du nombre de morts et de leur âge

Selon Wikipédia, « il y a eu, entre 1981 et 2006, environ 25 millions de morts dus aux maladies en rapport avec le sida ». Cela pourrait inquiéter car on nous serine tous les jours le nombre de morts du covid, qui en serait à 4,2 millions en 2 saisons. À une énorme différence près : la moyenne d’âge de décès, du moins en France, est de plus de 80 ans avec le covid, ce qui égale l’espérance de vie. La plupart de ces morts sont morts « avec » et non « du » covid. Ce nombre devra avec le temps (et cela commence dans certains pays) être revu nettement à la baisse pour éviter les doublons, sauf à constater un formidable progrès dans la lutte contre le cancer et les maladies cardio-vasculaires ! Malheureusement les statistiques de l’Insee sur les causes de mortalité mettent longtemps à sortir dans notre pays, ce qui permet au narratif de la dictature de proliférer comme un cancer de la pensée. Il est étonnant que beaucoup de personnes âgées aient perdu la mémoire des grippes asiatique (1956-1958) et de Hong Kong (1968-70), qui ont tué autant, mais des personnes bien plus jeunes, et cela sans que l’on impose à l’époque quelque mesure prétendument sanitaire que ce soit. À l’époque du sida, les campagnes pour le préservatif et les échanges de seringues ont sans doute sauvé des millions de vies, mais à aucun moment on n’a imposé aux gens de ne plus niquer, à aucun moment on n’a interdit la vente des seringues en pharmacies. Interdire de soigner, c’est ce que Macron, Véran, Philippe et tous leurs complices du conseil scientifique ont fait, mutatis mutandis en 2020 !
Je n’ai jamais connu une personne morte de « grippe » (ou bien je ne sais pas la cause de sa mort), mais je ne compte plus les morts du sida (avant 1995) et du cancer. Je ne connais personnellement aucune personne morte du covid. Un oncle et une tante nonagénaires sont morts en 2020, dans un état très dégradé, mais je ne sais pas si l’hôpital pour l’une, la maison de retraite pour l’autre, ont coché la case « covid ». Et vous ? Quand je pose cette question, des personnes relativement âgées me disent qu’elles ont perdu leur mère, ou au pire, on pleure un sexagénaire dont il est difficile de savoir s’il avait des comorbidités. En ce qui me concerne, dans les 5 dernières années, en plus de deux amis octogénaires, j’ai perdu trois amis sexagénaires qui venaient ou n’avaient même pas pu prendre leur retraite. L’âge moyen de la mort en France tourne autour de 80 ans, ce qui fait une moyenne entre ma grand-mère morte à 103 ans et ma meilleure amie morte à 63. En revanche, en ce qui concerne le sida, dès 1983, j’ai connu ce garçon de 23 ans dont il est question ci-dessus ; en 1984, je me rappelle un professeur de la Sorbonne qui me faisait passer un oral dans son bureau et recevait un appel lui annonçant que Michel Foucault était au plus mal, ce dont il me fit la confidence émue. Puis ce fut un voisin, le plus jeune d’un couple gay qui avait emménagé en face de chez nous, et après cela je suis devenu hors-catégorie car j’ai passé 21 mois entre décembre 1988 et septembre 1990 en service national comme objecteur de conscience au sein de l’association AIDES, où j’ai fréquenté des acteurs majeurs de la lutte contre l’épidémie, mêlés à des quidams. L’objection de conscience est une autre racine, peut-être, de mon refus d’accepter les ordres absurdes ou qui violent ma conscience. Elle devrait être (et elle l’est mais pas assez) invoquée par les soignants pour refuser d’exécuter ce que les criminels au pouvoir leur ordonnent (injecter du Rivotril, piquer des femmes enceintes ou des enfants en bonne santé, etc.), les enseignants pour refuser de forcer les enfants à appliquer des mesures absurdes et néfastes qui ont entraîné une hausse inédite des tentatives de suicides d’enfants, les contrôleurs SNCF et agents des services publics pour refuser de contrôler leurs concitoyens comme s’ils étaient des flics, ou de verbaliser le non-port de muselière, les directeurs de lieux de culture, etc. À Aides, en deux ans, et par la suite, je ne compte plus ceux que j’ai vus dépérir et mourir, avec des stigmates parfois spectaculaires, parfois plus discrets, parfois en quelques mois, d’autres en quelques années, et d’autres qui ont survécu jusqu’aux traitements efficaces et vivent encore, comme celui dont j’ai partagé la vie pendant 3 ans (on mettait des capotes, et basta), et qui par chance est toujours vivant, vaxiné (c’est son droit), mais farouchement anti-passe !

Carte de volontaire de l’association AIDES, 1990-92 © Lionel Labosse

Le bon vieux temps du sida

Au sein des locaux de l’association AIDES, la bonne humeur et l’esprit gay au meilleur sens du terme régnaient, qui contribuaient au maintien du moral, que ce soit les séropos, les malades ou les séronégatifs, et beaucoup de malades avaient la pudeur de ne pas se présenter comme tels tant que ça ne se voyait pas. On plaisantait, on s’embrassait, on riait, on pleurait, on se faisait des gueuletons. Indépendamment de mon service national, j’avais subi sur deux week-ends la formation de « volontaire » (mot préféré à « bénévole »), indispensable pour participer à des groupes d’action, que ce soit aide aux malades, permanence téléphonique, prévention gay, etc. Cela existe encore, mais les jeunes qui font ça doivent être payés, et quand je les vois sur les lieux gays avec le masque jusqu’aux yeux, j’ai juste envie de les baffer. J’avais 22 ans, mais j’invitais chez mon ami (enfin chez « nous ») des amis bien plus âgés que moi, des gens très sérieux, psy, infirmiers, profs, comptables, etc. Il y avait bien sûr comme dans toutes les associations des frictions, des luttes de pouvoir qui ont commencé à ternir le tableau, et qui finiraient par survenir dans les groupes anti-covidistes que je fréquente actuellement, dans la 3e expérience militante de ma vie, à une différence près. En effet, comme le pouvoir soutenait ce mouvement, les subventions pleuvaient, les journalistes s’intéressaient positivement à nous, etc. Le fric et le goût du pouvoir ont fait leur travail de sape, et je dois dire que même parmi les médecins de l’association, dont plusieurs étaient malades, il y avait des gens imbuvables. J’avais intégré une modeste association intitulée « Le Patchwork des Noms », qui réalisait des patchworks de 1 m sur 2 en mémoire des morts, et les exposait dans des lieux publics, pour compenser la stigmatisation qui présidait trop souvent à leurs funérailles. On se souvient que Thierry Le Luron ne mourut officiellement du sida que de façon posthume, alors que tout le monde le savait. Différence avec le covid : c’est la maladie à la mode, et même si vous êtes nonagénaire et cardiaque au dernier degré (Giscard d’Estaing), il est considéré plus chic d’être mort « covid » que « cancer » ou « infarctus ».
Une amie chanteuse a vécu les mêmes choses que moi, parce que le milieu artiste comptait beaucoup de gays, et de gays qui aimaient la vie. C’était un enterrement par semaine, et un enterrement de jeune. Elle se souvient particulièrement d’un ami mort dans ses bras, et pense que c’est cette expérience intime de la mort qui manque à ceux qui sont terrorisés par ce petit virus. Je ne sais pas en ce qui me concerne faire le tri entre l’expérience de la mort et du risque, et la réflexion qui m’avait mené à l’objection de conscience, ou le fait d’avoir très jeune été frappé par l’expérience de Milgram en voyant le film d’Henri Verneuil I… comme Icare. J’ai été aussi frappé par la foi profonde qui anime une grande proportion des anticovidistes, notamment des catholiques, ce que confirme l’écoute de Radio Courtoisie, jusqu’à rejeter sans ménagement l’attitude du pape François qui prône le vaxin et un « altruisme » à géométrie variable qui ne craint pas de sacrifier des enfants dans le vain espoir de prolonger la vie de grabataires. Ce pfizer-pape est considéré comme l’Antéchrist par ceux qui ont l’âge de se souvenir du retentissant « N’ayez pas peur » de Jean-Paul II, écho de la formule des évangiles. De même, le philosophe de plateaux-télé Michel Onfray a perdu toute crédibilité en cédant à la trouille du covid et en se faisant propagandiste de la vaxinolatrie, oubliant le « Philosopher c’est apprendre à mourir » de Montaigne. Je ne suis pas croyant, mais les covidistes qui répandent et gouvernent par la peur me semblent des ennemis irréductibles de la civilisation occidentale bâtie sur le christianisme. Si nous sommes sortis de ces années terribles avec une sorte de nostalgie, c’est parce que personne ne manipulait la peur, du moins dans les sphères du pouvoir, alors que personne n’aura jamais la moindre nostalgie du covidisme, et je pense et j’espère que d’ici quelques années, tout le monde éprouvera seulement de la haine et du ressentiment pour les criminels enfermistes du pouvoir et des médias (cf. « Après la Révolution : le procès d’« Ubu » Macron » par Alexandre Gerbi. Ce choc de la mort et de la jeunesse nous rapprochait. On discutait familièrement avec Daniel Defert, le compagnon de Michel Foucault qui avait fondé AIDES, et comme j’avais trouvé ma place comme « rédacteur en chef » du petit bulletin d’information (je faisais absolument tout, de la rédaction à l’expédition postale !), j’avais droit à sa bienveillance qui n’excluait pas certaines frictions quand j’usais de la liberté d’expression. Daniel Defert avait imposé la formule « Le malade est un réformateur social » issu d’un discours fameux, et de fait, les malades et leurs proches avaient réussi à imposer à force de compassion, un autre rapport plus horizontal avec les pontes de la médecine. Ils allaient au devant des informations sur les traitements, et comme leur vie était en jeu dans une course contre la montre, ils manifestaient quand on ne les écoutait pas. Or le covid étant une maladie brève qui touche principalement des gens déjà très malades, il ne peut être question d’une quelconque pression sur le rouleau compresseur de la médecine officielle, en roue libre sous le bâton de big pharma. Les malades soit meurent en quelques jours, soit guérissent. Le seul espoir de lutte à moyen terme réside dans les rescapés d’un covid long qui auront été empêchés par les décrets criminels de bénéficier des traitements précoces, ou les familles des morts privés de traitement. Quand ils auront récupéré, ils demanderont des comptes, comme cela se fait déjà au sein de l’association Victimes Coronavirus sous l’égide de Me Di Vizio qui est un peu le Daniel Defert du Covid. Un ami séropositif suivi à l’hôpital Bichat dans le service de Yazdanpanah, à qui je disais pis que pendre de ce personnage (membre du « conseil scientifique » et grand ami du président de Gilead), m’a dit que le service était d’une qualité exceptionnelle, les médecins vraiment au service des patients. Apparemment ce rapport innovant est resté, mais comment se fait-il que le même personnage soit l’instigateur d’une façon de traiter les malades diamétralement opposée ? Dr Jekyll et Mr Hyde ?

Le jeu des 7 différences

Si l’on joue au jeu des 7 différences, cela va plus loin. Je me souviens, lors d’un séjour à New York en 1997, avoir fréquenté des clubs gays comme il y en avait à Paris. Des employés faisaient constamment des rondes pour vérifier que toutes les braguettes étaient fermées, et que vous vous pelotiez seulement avec les yeux. J’ai été frappé dans certains lieux gay parisiens sous le covidisme, de revivre exactement la même impression avec des employés pitoyables qui vous poursuivent et vous montrent du doigt parce que vous avez ôté votre masque (enfin à un degré moindre car le rapport à la police est quand même très différent et parce qu’ils savent bien quand même que le risque sanitaire est égal à 0 ; ils ont seulement peur d’une amende dont le risque est pourtant lui aussi quasi nul). Les échos des États-Unis actuellement évoquent une vaxination obligatoire et une attitude variée selon les États en ce qui concerne le masque, tout cela sans rapport avec la dangerosité du virus. N’ayant pas de médicaments efficaces à l’époque, on acceptait des « protocoles compassionnels » avec des médicaments variés, et ce fut même le titre d’un des livres d’Hervé Guibert. Il y eut des rumeurs sur des remèdes miracles, notamment le traitement proposé par le biologiste Mirko Beljanski, mais je n’en ai jamais eu aucun écho direct. Il a subi à cette époque un sort comparable à celui du Pr Fourtillan actuellement, ce qui confirme qu’il est dangereux de s’attaquer aux intérêts de Big Pharma, mais franchement je ne pense pas que le sida serait soignable par la pharmacopée traditionnelle. Les articles qui ressurgissent encore régulièrement, niant l’existence du sida, m’agacent, car contrairement au covid, il n’est pas question de morts de 92 ans qui étaient déjà multicancéreux, mais de types de 25 ans en parfaite santé qui mouraient dans certains cas squelettiques, couverts de dartres et de taches du Sarcome de Kaposi, et je les ai vus avec mes yeux, touchés avec mes mains et embrassés avec ma bouche, alors ne me racontez pas de blagues, c’est un peu comme quand Raoult parle des patients qu’il a soignés dans son hôpital face à des ronds de cuirs qui colligent des big data. Une rumeur persistante qui fait pitié est celle concernant le poppers. Ce produit est un excitant cardiaque à l’effet bref, il est anodin, en vente libre (même si les technocrates français avaient tenté de le faire interdire il y a une quinzaine d’années), et a toujours été utilisé dans le milieu gay mais aussi hétéro, et l’est encore de façon très répandue. Alors s’il donnait le sida, comment, étant toujours autant utilisé, il n’y aurait plus de sida ? De même on peut lire dans ce genre d’articles que s’il y avait le sida, c’est que les homos se droguaient. Ah la belle nouvelle ! Les drogues étaient utilisées depuis belle lurette par des hommes et des femmes homos ou hétéros, et alors comment expliquer que le sida ne touchait que les hommes, sauf lorsqu’il y avait échange de seringues ? Et je peux témoigner qu’il n’y a jamais eu autant de consommation de drogues dans le milieu gay que de nos jours ; c’est une véritable plaie, mais ce ne sont pas du tout les mêmes drogues qu’il y a trente ans. On les appelle « chems », et les types se mettent dans des états de nervosité qui excèdent ma compréhension. J’ai deux amis qui m’ont donné des sueurs froides dans les dernières années, l’un ayant séjourné à Fresnes entre autres, l’autre m’ayant appelé à l’aide dans une crise de délirium. Mais pas un seul ne développe le sida, grâce aux traitements, y compris la « PrEP » (Prophylaxie pré-exposition), efficaces que vous soyez drogué ou non. Bref, la négation de l’existence du sida est une ânerie propagée par des gens qui parlent de ce qu’ils ignorent.
De l’autre côté du spectre, il y a parmi les gays, ou peut-être les bisexuels honteux qui craignent surtout de révéler leur double vie en ramenant une chtouille à la maison, une part irréductible d’hypocondriaques terrorisés, qui persistent à l’époque des traitements efficaces à 100 % et de la PrEP, à se comporter comme en 1985, avec capote pour la fellation, voire aucun contact charnel. Il n’est donc pas étonnant que ceux-là se pavanent sur les lieux de drague masqués jusqu’aux yeux, incapables de relativiser la dangerosité d’un virus en faisant la part entre BFMTV et la vérité scientifique. Il y a aussi les stars de banlieue qui s’imaginent que le masque leur évite d’être reconnus. En tout cas ils font pitié, et on a envie de les secouer et de leur faire honte en les mettant en face de la génération perdue de 1980, ceux qui savaient qu’ils allaient mourir, mais qui ont vécu à fond jusqu’à la dernière lampée de vie, comme j’en ai connu tant. [1] C’est un peu comme au Cambodge, toute l’élite gay de la génération des années 1980 a été décimée, de Foucault à Guy Hocquenghem, et ceux qui ont survécu n’étaient pas les têtes brûlées, mais peut-être les plus prudents, or la prudence ne fait pas forcément bon ménage avec le génie, n’est-ce pas Françoise Sagan, Arthur Rimbaud, etc. ?
Autre différence, le mépris affiché des roquets de la presse gouvernementale contre le Pr Luc Montagnier, Prix Nobel pour avoir découvert le virus du sida. On l’encensait à l’époque, et en 2020, c’était à celui qui lui cracherait le mieux à la figure. Cela va de Nicolas Martin, commissaire politique de France Culture qui déclarait dans cette émission du 20 avril 2020 « Pour revenir à l’ultracrépidarianisme de Luc Montagnier, ce n’est pas sa première prise de position hors de son champ de compétence, puisque ses propos ont été à plusieurs reprises vertement critiqués par la communauté scientifique ». Il est bien évident que le grand scientifique Nicolas Martin ne sort pas de son champ de navets, pardon, de compétence, quand il juge de l’opinion sur un virus d’un type qui a obtenu un Prix Nobel pour avoir découvert un virus, qui n’est pas plus celui de l’ultracrépidarianisme que de l’ultracrétinisme.

Attitude du milieu gay, « extrême drouate » et « ultracrépidarianisme »

Parlons maintenant d’une autre différence entre les deux épidémies : l’attitude du milieu gay. Nous avons déjà évoqué le tollé provoqué par les formules de Jean-Marie Le Pen. J’ai vu progressivement les associations gay bon enfant de ma jeunesse être mises sur la touche par les associations bulldozer stipendiées à coups de centaines de milliers d’euros de subventions de collectivités locales ou de l’UE, ce que j’ai dénoncé dans mon essai Le Contrat universel : au-delà du « mariage gay », dénonciation qui m’a bien entendu valu d’être mis à l’écart du mouvement gay, de même (en cent fois plus grand) que la dénonciation par le Pr Raoult et ses collaborateurs de la corruption dans le domaine de la santé a fait d’eux des parias. Pour donner un ordre de grandeur, le ministère de la Santé avait accordé en 2007 la somme de 560 000 € au Syndicat national des entreprises gaies (SNEG), ce qui avait déclenché les foudres du député UMP des Côtes-d’Armor Marc Le Fur (op.cit., p. 37). Imaginez-vous que cela se passait il y a 14 ans ; croyez-vous que cette corruption systémique ait progressé vers le mieux dans l’intervalle ? Les naïfs compareront avec le pot-de-vin de 1,3 million de francs de la part de Pfizer avoué par Jérôme Cahuzac en 1993, alors qu’il venait de sortir du cabinet du ministre de la Santé de l’époque… Un corollaire de cette corruption systémique est la disparition de la presse non-corrompue, je veux dire non subventionnée, qui ne peut plus tenir face à la presse subventionnée (par divers moyens détournés). À cette époque, j’avais assez facilement publié des nouvelles dans le magazine Gai Pied Hebdo, disparu en 1992. J’ai republié certaines de ces nouvelles dans un recueil intitulé Le Mariage de Bertrand. J’avais même publié un reportage sur la Chine dans un éphémère magazine gay. Ces journaux étaient plus ou moins artisanaux, militants, et Gai Pied avait pour inspirateur à sa création Michel Foucault. Rien à voir avec Têtu, magazine créé par un homme d’affaires pour utiliser à son profit le milieu gay et ses possibilités d’influences. Fréquence Gaie, la radio associative libre gaie parisienne, ne dura que quelques années, bientôt reprise par des gens sans scrupules qui en ont fait un robinet à fric, et transformé la Gay pride de l’époque en un phénomène commercial de promotion de la musique techno, démultiplié depuis en « techno parade ». La créativité individuelle des altersexuels doit désormais passer sous les fourches caudines d’hommes d’affaires préoccupés par leurs gains abstraits ou concrets, comme pour la presse généraliste, parce que les conditions pour l’existence d’une presse libre ont disparu. Je retrouve à peu près la même effervescence dans France-Soir, journal en ligne créé par un homme d’affaires certes, mais qui est aussi un scientifique, et dont l’aiguillon n’est pas ses propres gains, mais le bien public. On a vu l’acharnement d’une ancienne animatrice radio devenue ministre de la culture pour assassiner ce rare média indépendant. Nous sommes en dictature.
Donc ce qui s’est passé en 2020-2021 ne m’étonne pas, et seule une révolution pourra nous en sortir, et nous sortir du système mafieux de l’UE, dans lequel jusqu’au moindre petit roquet à la tête d’une association de gays collectionneurs de porte-clefs ou de posters de Mylène Farmer va soutenir l’État pour continuer à toucher sa petite subvention en suppositoire. Tout citoyen qui fait partie d’une association de quelque domaine que ce soit peut sans doute témoigner du même glissement. Signalons donc quelques retournements de veste dans ce petit monde gay propre sur lui. Il fut une époque où l’on n’avait pas de mots assez durs pour évoquer l’horreur absolue du « sérotriage » sur les applis de rencontre gay, c’est-à-dire le fait d’annoncer qu’on ne souhaite pas rencontrer un séropositif. Eh bien les mêmes qui s’offusquaient avec des mimiques de chaisières devant des images osées de ce type de discrimination, applaudissent à bras raccourcis aux discriminations contre les non-vaccinés. Les soignants en grève à partir du 5 août 2021 leur donnent une leçon de sens civique. L’une de leurs revendications proclamée dans cet article consiste en « La non-discrimination des patients : nous refusons leur tri à l’entrée de notre établissement de santé publique ». Citons l’un de ces tristes sires du milieu gay actuel, dont j’ai relevé une saillie dans un petit gratuit distribué dans les lieux gays parisiens : « Donc, déjà, l’ombre d’une 4ème vague plane plus ou moins vaguement. Entre les idiotes qui ne veulent pas se faire vacciner, celles qui n’ont pas le niveau scolaire suffisant et qui tombent bien facilement dans les bras du FN-RN et des complotistes (c’est la même chose), celles qui ont peur d’éventuels effets secondaires et qui, malgré le fait qu’elles prennent régulièrement GHB et Viagra, n’entendent pas prendre préventivement un peu de Doliprane après la vaccination parce que ça pourrait leur faire mal au foie, et celles qui… Bref, cette minorité importante pourrait bien gâcher la vie et les mois futurs de tous ceux qui n’aspirent qu’à reprendre une vie normale » (Franck Desbordes, directeur de publication, agendaq.fr n°193, juin 2021). Les éléments de langage semblent copiés-collés de McRond-McKinsey, et l’on sent tout le mépris de classe du type, que la subvention qu’il doit recevoir – directement ou indirectement – tous les mois autorise à insulter sa clientèle, à la traiter de « chose » et la féminiser. On note au passage l’allusion à la « minorité importante », car le petit apparatchik semble quand même craindre les effets du boycott des « idiotes » dont fait partie votre serviteur. Eh bien si à l’ère du sida nous avions dû compter sur ce genre d’individus, nous aurions tous fini dans des sidatoriums, car à cette époque, nous étions non pas une « minorité importante », mais une minorité méprisée, ignorée, stigmatisée, et parce que nous refusâmes collectivement de céder à la peur, nous gagnâmes, et nous gagnâmes bien que nous fussions minoritaires, nous gagnâmes parce que nous étions la Liberté, l’Égalité et la Fraternité. Le jeune militant anticovidiste Rémi Tell, qui pourtant est loin d’avoir connu cette époque, rappelle avec pertinence dans ses discours ces discriminations basées sur le statut sérologique. À l’époque du sida, c’était « d’extrême drouate » de discriminer et d’attenter au secret médical ; à l’époque du covidisme, les défenseurs de la liberté, du secret médical et de la non-discrimination sur le statut sérologique sont systématiquement taxés « d’extrême drouate » par les fascistes de l’extrême centre. Il s’agit donc bien d’un basculement éthique en l’espace d’une génération. Désormais, Vérité = Mensonge.

Décidément, il y a un grand ménage à faire !

Lionel Labosse

Source : altersexualite.com, 2021

[1] Le fameux « I don’t regret a single moment of it », cité dans « Sexual Distancing : Remembrance of Sex Past in Robert Chesley’s Jerker », essai de Charalampos Keivanidis.

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