Crises de nerfs chez les policiers mosellans

Un suicide a plongé le commissariat de Freyming dans la douleur et la tristesse. Le coup de poing d’un officier sur un collègue a plongé celui de Thionville dans l’incompréhension. Des signes d’une surchauffe à tous les étages.

Le malaise policier ne date pas d’hier. Mais des signes le ramènent toujours à la surface. En Moselle, de récents événements prouvent combien les hommes sont fatigués, « au bout du rouleau, on peut le dire », soupire un brigadier.

C’est d’abord un major de Freyming-Merlebach qui se suicide avec son arme de service, pour une histoire futile de croissants qui a conduit à enquête et à des suspicions mal placées. Ses proches ont déposé plainte contre X. C’est aussi un officier de Thionville qui craque et assène, vendredi, un coup de poing à un agent (lire ci-contre).

Il transpire de ces histoires « le sentiment que la police est en train de craquer, craint Yves Milla (Unsa-Police). Je crois que l’administration n’a pas tenu compte de la spontanéité du mouvement des policiers en colère. Aujourd’hui, elle discute avec les syndicats traditionnels mais elle ne nous entend pas. Ce n’est pas ici le problème, c’est beaucoup plus haut. Un problème de politique générale. » Dans les couloirs des commissariats, il ne faut pas tendre l’oreille bien longtemps avant d’entendre les agents dire « leur lassitude de la politique du chiffre. C’est le seul curseur qui compte pour Paris. Des chiffres et encore des chiffres, au point de s’arranger quand il y a plusieurs services d’enquête saisis. L’un compte le nombre de gardes à vue, l’autre prend le nombre de personnes incarcérées. Et tout le monde est content. C’est ridicule mais c’est comme ça que ça se passe. Cela met une pression insupportable », confie un ancien membre d’un service d’enquête, qui a choisi « une voie plus calme. Je m’emmerde mais au moins, j’ai des horaires fixes et une vie de famille. » Ce n’est pas un hasard, selon ces agents, si le judiciaire a tant de mal à séduire aujourd’hui.

« Une fois qu’on a dit ça, ça changera quoi ? »

« Cette politique du chiffre impacte le travail et le quotidien des collègues, prolonge Yves Milla. La multiplication des missions use. S’ajoute une procédure toujours plus lourde, des tâches toujours plus compliquées. » « On est dépossédé de notre savoir-faire, rebondit un autre. Je veux dire que, parfois, je me demande ce que je fais là. L’ordre des priorités n’est pas le bon. On me demande de bosser sur des pneus volés, sur des violences conjugales et sur un petit trafic de stups alors que j’ai des informations intéressantes sur une équipe de cambrioleurs. C’est impossible que je bosse là-dessus, je n’ai pas le temps. Alors on lâche l’affaire, on lâche prise… On perd la motivation. Le climat aujourd’hui est hypertendu. »

Et ça explose, souvent. « Ce qui est arrivé à Thionville prouve que ce sont des hommes. C’est un pétage de plomb comme ça ne doit pas arriver, confie un agent local. Mais le contexte fait que ça arrive. Mais une fois qu’on a dit ça, ça changera quoi ? »

Le directeur départemental de la Sécurité publique est resté injoignable hier.

Source : Le Républicain Lorrain

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *