Barkhane n’est pas la Françafrique: ce que fait vraiment la France au Sahel

C’est l’incapacité des pays africains à bâtir une force militaire efficace qui a contraint la France à intervenir. Cela lui a permis de protéger des pays amis mais aussi ses ressortissants vivant dans les États de la région.

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MICHELE CATTANI via Getty Images Un militaire de l’armée française surveille une zone rurale lors de l’opération Bourgou IV au nord du Burkina Faso, le 11 novembre 2019. C’est la première fois que l’armée française, les armées nationales et la force multinationale du G5 Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger, Mauritanie et Tchad) travaillent officiellement ensemble sur le terrain. La mission des 1400 soldats de cette opération Bourgou IV (dont 600 des 4500 soldats français de la force Barkhane): rétablir l’autorité dans une zone reculée où aucune armée n’a mis les pieds depuis plus d’un an, laissant le champ libre aux djihadistes.

De plus en plus voix s’élèvent pour pointer le rôle de la France au Sahel: qui pour dénoncer une intervention néocoloniale, qui pour fustiger son incapacité à régler la situation. Il convient donc d’éclaircir quelques points.

Barkhane n’est pas la “Françafrique”

Il est ainsi faux de dire que l’opération Serval, puis Barkhane, est une intervention néocoloniale. Sa généalogie diffère grandement de ce que d’aucuns ont nommé la “Françafrique”. La France n’est pas intervenue pour sauver ses intérêts économiques, que ce soit pour Total ou Areva. D’ailleurs s’agissant d’Areva au Niger, on peut légitimement considérer que cela relèverait d’abord d’une logique sécuritaire en évitant qu’un groupe jihadiste ne s’empare d’une mine d’uranium leur permettant de fabriquer des bombes sales. L’intervention au Mali et au Sahel s’inscrit en réalité dans un combat global contre le jihadisme. Là où la France a une responsabilité, en revanche, c’est que l’intervention au Mali est la conséquence directe de l’intervention en Libye. Laquelle a notamment permis aux jihadistes d’accéder aux stocks d’armes abandonnés par l’armée libyenne.

La France a ensuite adossé son intervention à une résolution du Conseil de sécurité. Elle a aussi bénéficié de l’aide logistique de ses alliés occidentaux et de l’appui militaire des soldats tchadiens sur le terrain. On est donc loin des interventions unilatérales du temps de la “Françafrique” où la France intervenait pour maintenir ou imposer un régime dictatorial ami à cette seule fin.

 

Là où la France a une responsabilité, en revanche, c’est que l’intervention au Mali est la conséquence directe de l’intervention en Libye.

 

La France n’a cessé, enfin, depuis la fin du mandat de Nicolas Sarkozy, de vouloir rester au second plan en se contentant d’un appui logistique d’une force armée africaine. Ce n’est que dos au mur, alors que les colonnes de pick-up jihadistes fonçaient sur Bamako, que François Hollande s’est résolu à intervenir. C’est l’incapacité des pays africains à bâtir une force militaire efficace qui a contraint la France à intervenir. Cela lui a permis de protéger des pays amis mais aussi les ressortissants français vivant dans les États de cette région.

L’aide militaire de la France n’est qu’un préalable à une solution politique africaine

S’agissant de son incapacité à endiguer le terrorisme dans la région, on ne peut que constater la véracité de ce constat. Pour autant, la solution ne peut pas venir de la France seule. Premièrement parce que le règlement ne saurait être que politique, économique et social, et qu’il ne peut dès lors provenir que des acteurs locaux. Deuxièmement, la France n’est pas franchement aidée par ses alliés. Ceux-ci n’ont pas compris que la sécurité européenne se jouait aussi au Sahel. Les Européens ont d’ailleurs été davantage traînés qu’entraînés dans la mission de formation des forces militaires maliennes. Et ils ne souhaitent, malheureusement, pas s’impliquer davantage. Par ailleurs, la force militaire onusienne est en difficulté sur le terrain et n’apparaît pas en mesure de prendre le relais de la France.

 

S’agissant de son incapacité à endiguer le terrorisme dans la région, on ne peut que constater la véracité de ce constat.

 

Le seul rôle de la France est ainsi la partie militaire (ou éventuellement d’intermédiaire) qui n’est qu’une condition préalable à une solution politique africaine. Pas de solution politique, économique et sociale sans situation militaire, à tout le moins, stabilisée. C’est comme cela que doit être interprétée la présence de la France au Sahel.

En conséquence, la question n’est pas de savoir si la France doit partir, mais quand? Rien de possible pour le moment ou à court terme. La solution viendra de l’émergence d’une force militaire africaine crédible et d’une armée onusienne plus efficace sur le terrain. Quant à l’aspect politique, on ne peut pas dire qu’IBK, le président malien, ait confirmé les espoirs placés en lui…

Source : Le HuffPost

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