Affaire Alexandre Benalla : l’exécutif tente de s’expliquer… et s’enfonce

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 Les ministres ont défilé toute la journée pour justifier maladroitement la réaction de l’Elysée à l’affaire Alexandre Benalla. Alors qu’Edouard Philippe s’est montré extrêmement mal à l’aise, Emmanuel Macron a carrément multiplié les esquives.

Un immense cafouillage. C’est le résumé de la communication de l’exécutif ce jeudi 19 juillet, depuis que Le Monde a révélé qu’un chargé de mission à l’Elysée, Alexandre Benalla, a été sanctionné de deux semaines de mise à pied pour avoir roué de coups un manifestant le 1er mai, alors qu’il accompagnait des CRS en tant qu’observateur. Et ce, sans prendre la peine de signaler les faits à la justice, comme l’exige pourtant le code pénal. Le parquet de Paris a donc dû attendre que l’affaire soit rendue publique par la presse pour annoncer ce jeudi l’ouverture d’une enquête, confiée à la brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP).

Pendant ce temps-là, la macronie tentait de sauver la face… Premier cafouillage dans la matinée, avec la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, qui affirme devant l’Assemblée nationale qu’Alexandre Benalla « était sur cette manifestation sans autorisation, ce qui évidemment pose une difficulté« . La version de la garde des Sceaux contredit directement celle du directeur de cabinet, qui a affirmé au Monde qu’il avait bel et bien autorisé Benalla à accompagner les forces de l’ordre le 1er mai.

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Par la suite, les interventions des ministres se sont presque toutes heurtées au même écueil : elles ont sciemment évité de mentionner le silence de l’Elysée, pourtant au courant de l’affaire dès le lendemain des faits. Ainsi, Christophe Castaner, secrétaire d’Etat chargé des Relations avec le Parlement, a affirmé sur CNews qu’il n’y aurait « aucun obstacle à ce que la justice puisse faire son travail« . Le problème, c’est qu’en l’absence de notification au procureur par la présidence, justement, la justice faisait face jusqu’ici à un obstacle de taille ! Ce qui n’a pas empêché Christophe Castaner de tenter un rétablissement en saluant « la vigilance citoyenne » de l’auteur de la vidéo… Vigilance citoyenne qui a manifestement fait défaut au sommet de l’Etat.

Un Premier ministre approximatif

L’intervention d’Edouard Philippe, qui a répondu aux questions du Sénat, a également été édifiante. Bafouillant, butant sur les mots, le Premier ministre a paru mal à l’aise sur la forme comme sur le fond. Il a tout d’abord insisté sur le fait que Benalla « avait été invité et autorisé à titre personnel à assister aux opérations en tant qu’observateur« , contredisant donc, depuis le palais du Luxembourg… ce qu’avait affirmé sa ministre de la Justice à l’Assemblée. Edouard Philippe a ensuite affirmé que « l’enquête permettra[it] de dire les raisons et les conditions dans lesquelles ce décalage avec le statut d’observateur a été conduit et réalisé« , et un peu plus tard ajouté : « L’affaire est désormais aux mains de la justice, et c’est très bien ainsi !« . Certes, mais là encore : que n’en a-t-elle eu l’occasion plus tôt ? Sans justifier ce silence, le chef du gouvernement s’est félicité qu’une « mise à pied de l’intéressé » ait été « très rapidement » prononcée. Et qu’importe si au regard de la gravité des faits allégués, la sévérité de la sanction apparaît un tantinet dérisoire.

Le Premier ministre a ensuite exprimé bien malgré lui, par sa rhétorique même, le malaise du gouvernement sur l’affaire. « De toute évidence, nous serons évidemment déterminés à faire en sorte que cette enquête puisse permettre de faire toute la lumière et que nous puissions tirer toutes les conclusions de cette enquête et de cette procédure judiciaire engagée, a-t-il insisté. Je le dis parce que c’est naturel de le dire, parce que c’est ce à quoi nous croyons et parce que c’est ce que nous souhaitons ». Ça va mieux en le disant, oui…

Capture d’écran 2018-07-21 à 02.36.57La même interrogation a été soulevée dans les réponses du ministre de l’Intérieur, toujours devant les sénateurs. Gérard Collomb s’est empressé de faire savoir qu’il avait « demandé à l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) » un rapport sur les faits… Une initiative qui aurait pu être considérée comme sincère si elle avait précédé les révélations de la presse, au lieu de les suivre.

Capture d’écran 2018-07-21 à 02.37.56« Pourquoi avoir attendu que les faits soient rendus publics pour que la justice se saisisse de l’affaire et ouvre une enquête préliminaire ?« , lui a donc justement rétorqué la sénatrice LR Isabelle Raimond-Pavero. Et le ministre de botter en touche : « (…) Un rapport de l’IGPN a été demandé, il sera rendu public et vous aurez toutes les informations sur ce qui est évidemment un grave dysfonctionnement ».

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