Saint-Etienne-du-Rouvray: une enquête de la police des polices après des accusations contre un service des renseignements

Une enquête publiée par Mediapart met en cause la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris dans le suivi de l’un des terroristes qui a assassiné le père Hamel. Des chefs auraient demandé d’antidater des documents qui attestaient de la dangerosité d’Adel Kermiche.

L’attentat perpétré dans une église de Saint-Etienne-du-Rouvray, en Seine-Maritime, aurait-il pu être évité? Le suivi de l’un des terroristes qui a assassiné le père Jacques Hamel, le 26 juillet 2016, est remis en cause par une enquête fleuve de Mediapart qui accuse les renseignements français d’avoir tenté de camoufler leur négligence dans cette affaire. L’avocat de victimes des deux terroristes réclame la déclassification de l’ensemble des éléments du dossier d’enquête.

Me Méhana Mouhou a annoncé avoir réalisé la saisine du procureur de la République de Paris, François Molins, afin « qu’il ouvre une information judiciaire », a-t-il indiqué sur BFMTV. « Ce qui est révélé, c’est très important, c’est quand même des éléments qui auraient été post-datés, en droit pénal, ça s’appelle du ‘faux criminel’ et également une tentative, par rapport aux éléments matériels qui nous sont donnés, d’obstruction à l’exercice normal de la justice », détaille l’avocat de Guy et Janine Coponet.

Dans la soirée, le parquet de Paris a annoncé l’ouverture d’une enquête préliminaire des chefs de « faux », « usage de faux », et « altération de documents de nature à faciliter la découverte d’un crime ou d’un délit ou la recherche des preuves », par une personne concourant par ses fonctions à la manifestation de la vérité. Les investigations ont été confiées à l’IGPN, la police des polices.

Faille dans la transmission des informations

Le 26 juillet 2016, Adel Kermiche et Abdel Malik Petijean ont pénétré dans la petite église de Saint-Etienne-du-Rouvray, en banlieue de Rouen, en plein office célébré par le père Jacques Hamel. Un couple de paroissiens octogénaires et trois soeurs y assistaient. En scandant à plusieurs reprises « Allahou akbar », l’un s’est précipité sur l’homme d’église et le second terroriste a forcé le paroissien, Guy Coponet, à filmer la scène. Le père Jacques Hamel est poignardé, notamment à la gorge, puis les deux agresseurs s’en prennent au paroissien. Blessé à plusieurs endroits, l’octogénaire va survivre.

Quelques jours avant l’attentat, un des agents de la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris avait repéré l’agresseur du père Hamel, Adel Kermiche, sur les réseaux sociaux. Celui-ci évoquait un projet d’attentat. Une note a été rédigée, le 22 juillet, par l’homme des renseignements parisien mais celle-ci n’a jamais été transmise, faute de personnel pour la valider, à la DGSI, autorité pourtant compétente puisque Kermiche était basé dans l’agglomération de Rouen. Par ailleurs, selon Mediapart, des chefs de cette direction auraient demandé que le document évoquant sa dangerosité soit antidaté pour masquer ce retard dans la transmission des informations.

Déclassification de documents

En réponse à l’enquête menée par Mediapart, la préfecture de police de Paris s’est défendu en indiquant que la note datant du 22 juillet 2016 n’évoque « en aucun cas », « l’imminence d’un passage à l’acte, et encore moins le ciblage d’un lieu précis ». La préfecture confirme, dans le même temps, l’existence d’une seconde note, datée elle du 26 juillet 2016. « On peut pinailler sur les détails, mais ça conforte ce que l’on dit, pourquoi faire une deuxième alors qu’il y en a une première qui existait après l’attentat », indique Mathieu Suc, journaliste à Mediapart et auteur de l’enquête.

Pour ainsi répondre à cette interrogation, l’avocat de Guy et Janine Coponet a également réclamé une déclassification de tous les documents secret défense présents dans le dossier d’enquête sur l’attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray. « J’ai demandé au procureur de la République d’ouvrir une information judiciaire et donc de saisir un juge d’instruction parce que, en cette matière, il faut enquêter pour connaître la vérité parce qu’on l’a doit aux victimes, mais aussi aux Français (…) et j’ai demandé une déclassification, non pas au compte-goutte, mais de tous les documents secrets défenses qui intéressent l’attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray », précise Me Mouhou.

Source : BFMTV

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