Procès politique pour le maire gilet jaune de Saint-Yzans-de-Médoc

64138.HRSegundo Cimbron, convoqué devant le tribunal correctionnel de Bordeaux le 27/mai, est soutenu par des citoyens et de nombreux élus.

Accusé d’avoir utilisé le mot « guérilla » lors d’une réunion de gilets jaunes, Segundo Cimbron est visé par une plainte du procureur de la République « pour provocation directe ».

Tout a commencé avec le mot « guérilla ». Le 8 janvier 2019, lors d’une réunion publique du collectif des gilets jaunes 33 à Moulis-en-Médoc, dans la région bordelaise, Segundo Cimbron, maire de Saint-Yzans-de-Médoc (apparenté communiste) et gilet jaune, prend la parole à deux reprises. Le débat porte sur les modes d’action. Faut-il manifester en masse à Bordeaux ou occuper davantage les ronds-points, péages et autres parkings de supermarchés ? « J’ai dit qu’il ne fallait pas opposer ces deux modes d’action. J’ai parlé d’actions de type guérilla pour désigner des occupations éphémères de ronds-points. C’est le terme qui m’est venu à l’esprit. Mais il n’y avait aucune confusion, je n’appelais pas à un soulèvement armé ! » raconte l’édile de cette commune rurale de moins de 500 habitants. Pour ce mot de « guérilla », il est convoqué devant le tribunal correctionnel de Bordeaux le 27 mai, inculpé de « provocation directe non suivie d’effet à un attroupement armé ». Une convocation venue tout droit du procureur de la République de Bordeaux, saisi par le préfet de Nouvelle-Aquitaine.

« Il y a un climat de haine, des propos pour le moins extrémistes »

C’est que, le lendemain de cette réunion des gilets jaunes, un incendie d’origine criminelle se déclare devant la sous-préfecture de Lesparre-Médoc. Présent sur les lieux, le préfet de la région Nouvelle-Aquitaine, Didier Lallement, condamne les faits. Mais pas seulement. Interrogé par un journaliste de Sud-Ouest sur les propos de Segundo Cimbron, il réagit vivement : « Je ne peux pas croire qu’un élu de la République puisse prononcer de telles paroles. Il y a un climat de haine, des propos pour le moins extrémistes qui sont tenus aujourd’hui. Il faut que chacun, et notamment les autorités publiques, rassure. (…) Si des maires sont sur d’autres discours, il y aura des voies judiciaires à l’encontre de ce qu’ils peuvent dire. »

À partir de là, tout s’accélère. Segundo Cimbron est convoqué par la brigade criminelle de Bordeaux pour une audition le 31 janvier au commissariat de Lesparre-Médoc. Les enquêteurs, un peu gênés par la situation, questionnent tout de même le maire sur son usage du mot « guérilla » pendant deux heures… « C’était très courtois mais absurde ! L’article de Sud-Ouest mettait en lien mes propos avec l’incendie. Il a été repris et l’affaire a pris un tour grotesque », poursuit le maire qui se dit la cible « d’un procès politique ».

Il faut dire que, dès le 7 janvier, Segundo Cimbron n’a pas fait allégeance à l’appel de l’Élysée : « J’ai envoyé une lettre à M. Macron pour lui expliquer pourquoi je ne participerai pas au grand débat national. Je lui disais que ce débat, beaucoup n’ont pas attendu que les institutions l’organisent pour l’avoir entre eux, là où ils sont, sur ces ronds-points où ils découvrent qu’ils ne sont pas seuls dans leurs difficultés quotidiennes. Sur la feuille du débat que propose le président sont déjà écrits les sujets à débattre, ceux qui sont interdits, les cases à cocher et les conclusions qu’il n’y aurait qu’à amender. Deux démarches, donc. Je lui ai dit que je préférais la première. »

Aujourd’hui, Segundo Cimbron est soutenu par des citoyens et des maires de villages de différentes étiquettes politiques. Face aux juges, fin mai, il ne regrettera rien. Pour la simple et bonne raison qu’il fait partie de ceux qui accompagnent les gilets jaunes vers « des issues positives ».

Source : L’Humanité

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