Prisons : les syndicats rejettent le projet d’accord, nouveaux débrayages

Après une semaine de tensions, les syndicats de surveillants appellent à un « blocage total » des établissements lundi.

Manifestation des gardiens de prison devant le centre pénitentiaire de Borgo (Haute-Corse), le 19 janvier.

Manifestation des gardiens de prison devant le centre pénitentiaire de Borgo (Haute-Corse), le 19 janvier. PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP

Le mouvement de colère des gardiens de prisons, lancé lundi après l’agression de surveillants par un détenu djihadiste à Vendin-le-Vieil, dans le Pas-de-Calais, s’était ralenti samedi pendant une phase de consultation. Il promet désormais de se durcir à nouveau. Les surveillants ont rejeté, samedi 20 janvier, un projet d’accord négocié avec le gouvernement et appelé à un « blocage total » des établissements, dès lundi à 6 heures.

Dimanche, le mouvement se poursuivait comme la veille, au ralenti. Les prisons de Borgo en Corse, où deux surveillants ont été gravement blessés, et celle de Gradignan (Gironde) étaient totalement bloquées, a-t-on indiqué de source syndicale et à la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP). « L’essentiel de la mobilisation se traduit ce matin par des retards de prise de fonction », a-t-on précisé à la DAP.

Le secrétaire général de FO-Pénitentiaire, Emmanuel Baudin, a affirmé qu’il y avait encore dimanche matin « des débrayages dans un grand nombre d’établissements », citant notamment Borgo, Gradignan, Val-de-Rueil (Eure), Saran (Loiret) et l’unité hospitalière psychiatrique de la région de Bordeaux. En revanche, les grandes maisons d’arrêt de la région parisienne, Fleury-Mérogis et Fresnes, n’étaient pas touchées selon des sources syndicales locales.

« Des propositions en deçà des attentes »

L’UFAP-UNSA, majoritaire (40 %), a fait savoir tard dans la soirée qu’après avoir interrogé ses militants, il ne signerait pas le texte. La CGT-Pénitentiaire (environ 15 %) avait déjà annoncé dans l’après-midi qu’elle ne le signerait pas, évoquant des propositions « bien en deçà des attentes des collègues mobilisés, notamment en termes de reconnaissance et d’attractivité de (ses) missions de service public (indemnité et statut) et de l’insuffisance de création de postes proposés ».

Ce projet d’accord prévoyait notamment :

  • la création de 1 100 emplois de surveillant sur quatre ans, « dont une première tranche de 100 emplois dès 2018 » ;
  • des mesures pour améliorer la sécurité des gardiens ;
  • un régime de détention spécifique pour les « détenus terroristes et radicalisés ».

A l’heure actuelle, on compte 28 000 surveillants pour près de 70 000 détenus dans 188 établissements en France. La chancellerie estime à environ 500 les détenus incarcérés pour des faits de terrorisme et à 1 500 ceux considérés comme potentiellement radicalisés.

L’UFAP-UNSA, qui avait fait de la sécurité l’axe prioritaire de ses revendications, explique avoir « entendu » ses militants et « acte la demande de revalorisation indemnitaire des personnels mobilisés et meurtris dans leur chair ».

De son côté, FO-Pénitentiaire (environ 30 %), qui fait cavalier seul depuis le début du mouvement, a appelé à durcir le ton en appelant à des débrayages mais aussi à des « dépôts de clés », geste qui consiste pour les surveillants à ne pas prendre leur travail et à laisser, le cas échéant, les forces de l’ordre prendre le relais.

Une vingtaine d’établissements touchés

Le mouvement a été renforcé ces derniers jours par une série d’agressions de surveillants. Au total, en une semaine, une vingtaine d’établissements ont été touchés « à des degrés divers » par le mouvement des surveillants, consistant pour la moitié d’entre eux en des retards de prise de service, selon la Direction de l’administration pénitentiaire (DAP).

Selon Yoan Karar, de FO-Pénitentiaire, « il y a encore eu un concours de recrutement de gardiens de prison [mercredi] et 70 % des candidats ne se sont même pas présentés ». Des chiffres globalement validés par la DAP, qui évoque « 34 % de candidats qui se sont présentés sur les 15 000 inscrits » ; pour quelque 1 200 postes.

C’est dans ce climat pesant qu’à la prison de Maubeuge (Nord), un « mouvement d’excitation » a gagné samedi une vingtaine de détenus, selon Alain Jégo, directeur interrégional des services pénitentiaires, entraînant l’intervention d’équipes régionales de sécurité. « Le problème est réglé », a-t-il ajouté, refusant de parler de « mutinerie ».

Des détenus refusent de regagner leur cellule

La situation est revenue à la normale, dimanche en fin de journée, dans les prisons de Maubeuge et Lille-Loos-Sequedin(Nord) après l’intervention des Eris (Equipes régionales d’intervention et de sécurité) alors que des détenus avaient refusé de regagner leur cellule.

« Les détenus voulaient être solidaires du mouvement des surveillants, on ne sait pas trop si c’est vrai ou si c’est une blague », a déclaré Guillaume Pottier, secrétaire Ufap-Unsa pour les Hauts-de-France.

Environ 160 détenus avaient refusé dans l’après-midi de rejoindre leur cellule après la promenade. Le même phénomène, concernant une quarantaine de prisonniers, s’était produit à la prison de Maubeuge.

Samedi, des Eris avaient été dépêchées à la prison de Maubeuge à la suite d’un « mouvement d’excitation » d’une vingtaine de détenus, selon l’administration régionale pénitentiaire.

La prison de Maubeuge, ouverte en 1990, offre 400 places, avec un quartier maison d’arrêt hommes majeurs (200 places) et un quartier de centre de détention (200 places), selon le ministère de la justice. Le centre pénitentiaire de Lille-Loos-Sequedin a, lui, ouvert en 2005, avec une capacité d’accueil de 976 personnes, d’après la même source.

Source : Le Monde

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *