Pourquoi Nordahl Lelandais a fait une demande de libération qui n’aboutira pas

Nordahl Lelandais, ex-militaire de 34 ans suspecté d'avoir tué la jeune Maëlys en Isère, a demandé sa libération après cinq mois de détention.

Nordahl Lelandais, ex-militaire de 34 ans suspecté d’avoir tué la jeune Maëlys en Isère, a demandé sa libération après cinq mois de détention.

Le suspect numéro 1 des meurtres de la petite Maëlys et du caporal Noyer a déposé mardi une demande de remise en liberté. Mais celle-ci a peu de chances d’aboutir.

Les soupçons s’accumulent, les investigations s’étendent à d’autres dossiers de disparitions non élucidées mais Nordahl Lelandais reste ferme sur ses positions: il n’a rien à se reprocher. Et il tient officiellement à le faire savoir sur le plan judiciaire. Mardi, l’ancien militaire de 34 ans, doublement mis en examen pour « meurtre » et « assassinat » dans les affaires Maëlys en Isère et Arthur Noyer en Savoie, a déposé une demande de remise en liberté auprès des juges d’instruction de Grenoble.

C’est la première fois que le suspect, qui justifie sa démarche par son « innocence », conteste sa détention. Voilà près de cinq mois qu’il est incarcéré à l’isolement à la maison d’arrêt de Saint-Quentin-Fallavier (Isère). RTL, qui a révélé l’information, précise que la justice dispose de cinq jours pour répondre à sa demande. Mais pour plusieurs connaisseurs du dossier, celle-ci n’a aucune chance d’aboutir et relève davantage de la stratégie de « communication ». D’abord parce que Nordahl Lelandais est visé par deux mandats de dépôt. Or, il n’a demandé sa libération que pour l’affaire Maëlys. « Il faudrait qu’il le fasse aussi pour la mort du caporal Noyer. Mais au vu des éléments, je doute qu’il soit libéré », observe un magistrat.

« Une demande psychologique »

Le parquet de Grenoble a déjà fait savoir qu’il se prononcerait pour un maintien en détention. L’accusation dispose de plusieurs « indices graves et concordants » pour appuyer sa position: les absences répétées du suspect lors de la soirée de la disparition de Maëlys, ses déclarations incohérentes en garde à vue et l’ADN de la fillette retrouvé dans son véhicule.

« Je suis dubitatif quant au timing judiciaire de la requête de Nordahl Lelandais, note un proche des parents de Maëlys. Pourquoi ne pas l’avoir fait avant? Cela ressemble plus à une opération pour instiller le doute quant à sa culpabilité, alors que tout l’accable. » Un sentiment partagé par maître Marie Grimaud, qui représente l’association Innocence en danger en tant que partie civile. « C’est une demande de remise en liberté ‘psychologique’, dénonce l’avocate. Le mis en cause prépare sa ligne de défense, qui consiste à dire: ‘Je demande à être libéré donc je suis innocent’. Le rouleau compresseur auprès de l’opinion publique est mis en route. » Contacté, l’avocat de Nordahl Lelandais, Alain Jakubowicz, n’a pas souhaité s’exprimer.

L’enjeu d’un futur procès

La large médiatisation de l’affaire -et notamment des éléments à charge et à décharge- constitue un enjeu fort dans la perspective d’un procès. Dans l’une de ses rares interventions en décembre dernier, Me Jakubowicz ne s’était fait aucune illusion à ce sujet. « Parmi vos auditeurs, il y a les futurs jurés d’un procès d’assises, car il y aura un procès d’assises. Ces gens-là, aujourd’hui, sont conditionnés, car on leur dit que [Nordahl Lelandais] est coupable », avait fustigé l’avocat sur Europe 1.

En matière criminelle en effet, ce sont des citoyens tirés au sort qui se prononcent sur la culpabilité d’un accusé, assistés d’un ou plusieurs magistrats. En l’absence de corps , de preuves scientifiques ou d’aveux, le verdict est souvent plus compliqué à prendre. « Il y a un intérêt pour lui à préparer l’opinion des jurés », constate un proche du dossier. Pour autant, Nordahl Lelandais reste toujours présumé innocent et l’enquête pourrait tout aussi bien aboutir à un non-lieu, sans procès. Une hypothèse non mentionnée par Me Jakubowicz, qui avait précisé, au contraire, que son client aurait à s’expliquer sur « un certain nombre de points et de coïncidences ».

Fabien Rajon, l’avocat des parents de Maëlys, y avait vu « une ambiguïté » dans la stratégie de la défense. « Pourquoi la défense n’a-t-elle pas estimé opportun de relever appel de sa détention provisoire ou de solliciter son placement sous contrôle judiciaire, voire une remise en liberté pure et simple? », s’était-il interrogé dans une lettre ouverte publiée en décembre dans Le Parisien. En clair: pour la partie civile, soit Me Jakubowicz invoque « l’innocence » de Nordahl Lelandais et demande sa libération, auquel cas les dénégations du suspect sont audibles, soit il l’incite à « dire ce qu’il sait » sur la disparition de la fillette. Coïncidence ou pas, il aura fallu attendre un peu moins d’un mois pour que le suspect conteste officiellement son incarcération.

Source : L’Express

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