Jérôme Rodrigues, le militant blessé devenu une figure des Gilets jaunes

8000994_67b1194e-23b7-11e9-8cba-3e76d1aeb0bc-1_1000x625Jerome Rodrigues, blessé à l’œil, s’exprime depuis l’hôpital Cochin, à Paris, le 27 janvier 2019. AFP/CHRISTOPHE ARCHAMBAULT

Blessé à l’œil samedi dernier lors de la mobilisation parisienne, Jérôme Rodrigues est l’un des leaders du mouvement.

Sa notoriété a largement dépassé le cadre des Gilets jaunes. Si Jérôme Rodrigues, le manifestant blessé à l’œil samedi dernier à Paris, était déjà l’une des figures les plus populaires au sein du mouvement, son visage s’affiche désormais à la une des médias français. Et sur Facebook, où les Gilets jaunes s’organisent et communiquent entre eux, de nombreux visuels ont fait leur apparition, représentant le visage barbu de Rodrigues et recouvert d’un bandeau à l’œil.

 

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Originaire du Portugal, Jérôme Rodrigues est né en France d’un père portugais et d’une mère française (repartis tous les deux au Portugal en 2016). Au média lusophone lusojournal il confiait le 23 janvier dernier son admiration pour son pays d’origine. Les Portugais « ont repris les rênes du pays et ont dit non aux mesures d’austérité. On voit le service public là-bas par exemple, vous payez pour les services mais ils sont faits et rapidement. Ici en France rien ne bouge, alors que ce sont des services gratuits », détaillait-il.

Rodrigues, qui se dit sur sa page Facebook originaire de Tremblay-en-France (Seine-Saint-Denis) et habitant Paris, a enchaîné plusieurs petits boulots en France : à Disneyland, au Club Med, chez EDF ou encore chez Renault. Il est actuellement en reconversion pour devenir plombier. « J’ai été dans le commerce pendant 20 ans, mais des accidents de la vie font que j’en suis là aujourd’hui », résumait-il au lusojournal.

Décrit comme « calme », « pacifique » et « toujours positif »

Par « accidents de la vie », faut-il aussi comprendre ennuis avec la justice ? Selon nos informations, Jérôme Rodrigues a 2 infractions inscrites au Traitement d’antécédents judiciaires (TAJ) : un transport de stupéfiants en 2013 à Livry Gargan et un vol simple en 2016 à Pierrelaye. Ce qui ne veut pas dire qu’il a été forcément condamné, mais qu’il a fait l’objet d’une procédure.

Et son dernier emploi au magasin Retif s’est mal terminé, puisqu’il a été licencié le 18 juin 2016 pour une faute grave, comme nous l’a confirmé son employeur. L’intéressé n’a pas contesté ce licenciement. Selon nos informations, son éviction aurait eu lieu à la suite d’un vol et escroquerie en flagrant délit. Ce que ne peut nous confirmer son avocat Me Philippe de Veulle, son avocat. « J’ignore ces antécédents, et même si je les connaissais, je ne vous les donnerais pas. Je défends un client qui va perdre un oeil. Un homme formidable et généreux. »

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Décrit comme « calme » et « pacifique » par plusieurs de ses proches, Jérôme Rodrigues a en effet toujours condamné les heurts et demander d’éviter les violences qui ont émaillé les samedis de mobilisation des Gilets jaunes. « C’est quelqu’un de toujours positif et dont la gentillesse dépasse tout ce qu’on peut imaginer », assure au Parisien Vincent, un « bon ami » qui le connaît depuis dix ans.

Avant de devenir l’endroit où il s’exprime à sa « famille » Gilets jaunes, la page Facebook de Jérôme Rodrigues était assez classique. Actif sur le réseau social depuis février 2014, le Franco-portugais poste d’abord des illustrations du dessin animé « les Minions » et des photos de celle qui semble être sa fille. Il « s’éclate » même à faire apparaître cette dernière dans plusieurs positions, mais habillée de la même façon et sur une même photo, grâce à une petite application. Après les attentats de janvier et du 13 novembre 2015, il change sa photo de profil pour afficher un tag « c’est l’encre qui doit couler, pas le sang », ou un drapeau français orné d’un brassard noir.

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Militant contre les taxes sur le carburant

C’est courant 2018 que ses publications prennent un aspect plus militant. En mars dernier, en pleine grève à la SNCF contre la réforme du gouvernement, Rodrigues appelle à « ne pas se battre contre [les avantages des cheminots] de la SNCF », mais plutôt « pour vous pour avoir [aussi] des avantages !! ». Au printemps, il s’insurge également contre les « 64 milliards d’euros de recettes fiscales sur les carburants », qu’il compare aux « 73 milliards d’euros de recettes de l’impôt sur le revenu ».

Lui qui affirme se battre notamment pour le pouvoir d’achat, le référendum d’initiative populaire (le fameux « RIC »), et la « fin des privilèges des dirigeants », fait partie d’un groupe « historique » des leaders des Gilets jaunes, raconte l’Obs. Il est notamment lié et soutenu par Eric Drouet. Cette autre figure du mouvement, davantage controversée mais tout aussi populaire, appelle d’ailleurs à manifester en « hommage aux blessés » samedi prochain à Paris.

Adulé par les Gilets jaunes

Plutôt discret au moment des premières manifestations en novembre, Rodrigues devient hyperactif sur Facebook début décembre, multipliant chaque jour les appels à se mobiliser et annonçant ses passages dans les médias. Il se filme et se diffuse également en direct lors de manifestations, notamment lors du réveillon du 31 décembre. Il devient aussitôt adulé par les Gilets jaunes, à en croire les centaines de commentaires à ses publications : « Vraiment Bravo le Barbu pour ton intervention, chapeau bas ! », « Tu es génial Jérôme ! », « Bravo à toi. T’as dit tout haut ce que les gens pensent tout bas. » etc.

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« Ça ne me surprend pas qu’il se mobilise car il vient d’un milieu prolétaire, même si je suis étonné de le voir aujourd’hui sur les antennes télé. Mais quand on connaît Jérôme, on se dit « ouais pourquoi pas », car il est très ouvert », explique encore son « bon ami » Vincent.

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Se projetant vers la suite, Jérôme Rodrigues expliquait au lusojournal : « Je suis originaire de Coimbra [une ville au centre du Portugal, NDLR], j’adore ce pays qui est aussi le mien, et je me suis déjà posé la question d’aller y habiter. » C’était trois jours avant sa blessure à l’œil, causée, selon lui, par un tir de lanceur de balles de la police. En attendant les résultats de l’enquête de l’IGPN (la « police des polices ») et alors que la piste du « LBD » s’est renforcée après nos révélations, le militant s’est de nouveau adressé à « la famille » sur Facebook mardi matin : « On ne lâche rien !! ».

Après la publication de cet article, Jérôme Rodrigues, qui reçoit via Internet « des milliers de messages par jour », nous a rappelés pour nuancer ses antécédents judiciaires et la fin brutale avec son ancien employeur. « Qui n’a jamais fait de petites conneries dans sa vie ? », s’interroge le leader des Gilets jaunes. Il dit par ailleurs avoir de nouveaux rendez-vous cette semaine à l’IGPN et avec le médecin pour faire un diagnostic complet de son oeil.

Source : Le Parisien

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