Darmanin accusé de viol : la défense très maladroite de Belloubet, « au demeurant » ministre de la Justice

Pensant défendre intelligemment son collègue au gouvernement, la garde des Sceaux a expliqué qu’« au demeurant, Gérald Darmanin est un excellent ministre du Budget ». Et a enflammé les réseaux sociaux.

9b2de42_Jy3pgTCIdVoniZiV7HEcHfzaNicole Belloubet et Gérald Darmanin, réunis en septembre 2018 (PHILIPPE HUGUEN / AFP)

« Au demeurant ». Adverbe. Définition ? « Tout bien considéré et pour ce qui reste à dire ; du reste, par ailleurs. » Voilà sûrement deux mots que la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, va regretter amèrement d’avoir utilisé.

Interrogée sur Franceinfo, ce vendredi 12 juin, sur les propos du ministre de l’Intérieur prônant une tolérance zéro pour des faits de racisme et le fait de savoir si le « soupçon avéré », qui entraîne une suspension des policiers, pourrait s’appliquer au cas du ministre des Comptes publics Gérald Darmamin, après la reprise des investigations concernant une accusation de viol en 2009, la garde des Sceaux s’est retranchée derrière le droit.

« Le droit de la fonction publique n’a rien à voir avec les règles qui s’appliquent aux ministres. Lorsqu’il y a des plaintes pénales, c’est la Cour de Justice de la République, lorsqu’il y a une responsabilité politique, c’est le Parlement », assure Nicole Belloubet. Et d’enchaîner : « La procédure suivra son cours. Au demeurant, Gérald Darmanin est un excellent ministre du Budget. »

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Autrement dit : « Tout bien considéré et pour ce qui reste à dire, Gérald Darmanin est un excellent ministre du Budget. »

Ou encore : « Du reste, Gérald Darmanin est un excellent ministre du Budget. »

Reprise de l’enquête

Une défense plus maladroite à propos du ministre des Comptes publics laissant entendre qu’importe qu’une enquête soit rouverte, pour viol, du moment qu’un ministre est bon.

La cour d’appel de Paris a ordonné la reprise des investigations concernant une accusation de viol en 2009 visant Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics et l’un des poids lourds du gouvernement.

Près de deux ans après une ordonnance de non-lieu, la chambre de l’instruction de la cour d’appel a ordonné mardi à la juge d’instruction chargée du dossier la reprise des investigations concernant Gérald Darmanin, accusé par une femme, Sophie Patterson-Spatz, de viol, harcèlement sexuel et abus de confiance.

La chambre de l’instruction n’a pas suivi les réquisitions du parquet général et estimé, selon une source judiciaire, que la magistrate instructrice « ne pouvait se fonder uniquement sur les résultats de l’enquête préliminaire » pour refuser de relancer les investigations dans cette affaire.

« Passer à la casserole »

A l’époque, Sophie Patterson-Spatz s’était adressée à l’élu, alors chargé de mission au service des affaires juridiques de l’UMP (ancêtre de LR), pour tenter de faire annuler une condamnation de 2004 pour chantage et appels malveillants contre un ex-compagnon.

Selon elle, Gérald Darmanin, aujourd’hui âgé de 37 ans, lui aurait fait miroiter en mars 2009 son appui auprès de la Chancellerie par le biais d’une lettre et la plaignante se serait sentie, en échange, contrainte de « passer à la casserole », selon l’expression de celle-ci devant les enquêteurs.

Entendu en audition libre, Gérald Darmanin a confirmé avoir eu une relation sexuelle avec Sophie Patterson-Spatz, mais, selon lui, librement consentie et à l’initiative de la plaignante.

Une deuxième accusatrice, une habitante de Tourcoing (Nord), ville dont le ministre fut maire de 2014 à 2017 et où il a été réélu le 23 mai dernier, avait porté plainte pour « abus de faiblesse », affirmant que l’élu lui avait demandé des faveurs sexuelles en échange d’un logement. Cette procédure a également été classée sans suite par le parquet de Paris, au printemps 2018.

Gérald Darmanin avait affirmé en février 2018 « les yeux dans les yeux », n’avoir « jamais abusé d’aucune femme » ni de son « pouvoir ».

« Sur le fond de l’affaire, [il] a bénéficié d’un non-lieu, a estimé jeudi la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, sur Franceinfo. Je lui renouvelle et mon amitié et ma confiance ce soir. »

Les propos de Nicole Belloubet, s’ils n’ont pas aidé Gérald Darmanin, ont au moins fait réagir beaucoup d’internautes et permis de placer en trending topics (les sujets « tendances »), sur Twitter, le nom d’un certain… Emile Louis, tueur en série, surnommé « le Boucher de l’Yonne », après avoir été condamné pour le meurtre de plusieurs jeunes filles handicapées. Une autre manière de pointer du doigt l’étrange propos de la garde des Sceaux. Avec parfois beaucoup d’humour : « Au demeurant, Emile Louis est un excellent chauffeur de bus », ironise une utilisatrice de Twitter.

Source : L’Observateur

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