Affaire Maëlys. Les zones d’ombre autour de l’enquête s’accumulent

  • Maëlys, 9 ans, a disparu dans la nuit du 26 au 27 août dernier, aux alentours de 3 h du matin, lors d'un mariage à Pont-de-Beauvoisin, en Isère.
    Maëlys, 9 ans, a disparu dans la nuit du 26 au 27 août dernier, aux alentours de 3 h du matin, lors d’un mariage à Pont-de-Beauvoisin, en Isère. | AFP
La petite Maëlys, 9 ans, a disparu dans la nuit du 26 au 27 août 2017, lors d’un mariage en Isère. Presque deux mois plus tard, l’enquête semble stagner : un seul suspect présumé a été interpellé, des éléments l’accablant sont dévoilés au fur et à mesure, mais l’homme a réponse à tout, et les recherches n’ont toujours pas permis de retrouver la petite fille. Hier, une « forme blanche » sur une photo de la voiture du suspect a relancé l’enquête.

Cela fait maintenant presque deux mois que Maëlys, 9 ans, a disparu à Pont-de-Beauvoisin, en Isère, lors d’un mariage aux alentours de 3 h du matin. Depuis, les enquêteurs ont passé au peigne fin le moindre petit indice. Mais l’enquête piétine. Le suspect, présumé innocent, a fourni des réponses précises à plusieurs interrogations des enquêteurs. Sa famille ne cesse de clamer son innocence.

Fin septembre, les parents de la petite Maëlys, qui s’exprimaient publiquement pour la première fois, ont appelés le principal suspect, Nordhal L. à « révéler ce qu’il sait », ajoutant que le « comportement » de ce dernier ne les a pas « convaincus de sa bonne foi »La mère de Nordhal L., manifestement sensible aux déclarations des parents de Maëlys, s’est ensuite rendue à la prison de Saint-Quentin-Fallavier (Isère) pour un nouveau face-à-face avec son fils. Là encore, l’homme n’a rien lâché. « S’il y avait eu le moindre doute, moi, je l’aurais ressenti. Mais là, non », a-t-elle estimé. 

Ouest-France se penche sur les zones d’ombres de l’enquête.

Cette photo avec « une forme blanche » sur le siège passager

Jeudi 19 octobre, M6 a révélé que les enquêteurs tentaient d’exploiter une image de vidéosurveillance sur laquelle apparaît la voiture du principal suspect. Sur cette image en question, aucun visage n’a pour le moment été identifié par l’institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) mais une « forme blanche » apparaît. Pour rappel, Maëlys portait une robe blanche le jour du mariage.

Cette trace ADN retrouvée

Le dimanche 3 septembre, Nordahl L., l’un des 140 invités présents au mariage, est mis en examen et écroué pour « enlèvement, séquestration ou détention arbitraire de mineur de 15 ans ». Cette mise en examen intervient après la découverte d’une trace ADN de Maëlys sur le tableau de bord de son véhicule.

Le 4 septembre, au lendemain de sa mise en examen après la découverte de la trace ADN de la petite fille dans son véhicule, Nordahl L. admet auprès des enquêteurs que Maëlys est montée dans sa voiture.

La procureure de la République de Bourgoin-Jallieu en charge du dossier sur la disparition de Maëlys.

Ce petit garçon qui n’a jamais existé

« Il a déclaré que la fillette était entrée dans le véhicule avec un petit garçon, sur la banquette arrière, pour voir si son chien (celui du suspect, NDLR) était dans le coffre », annonçait alors son avocat Me Bernard Méraud.

D’après l’ancien maître-chien engagé dans l’armée, Maëlys serait donc montée au cours de la soirée sur la banquette arrière de son Audi A3, en compagnie d’un petit garçon blond, tandis qu’il fumait une cigarette. Les deux enfants auraient voulu voir, si ses chiens, dont il leur aurait parlé auparavant, étaient dans le coffre, avant de ressortir et de retourner dans la salle des fêtes.

Seul problème, les enquêteurs n’ont trouvé aucune trace du blondinet décrit par le suspect et estiment qu’il n’existe pas.

De plus, la trace ADN n’a pas été retrouvée là où Nordahl L. a déclaré que les enfants étaient allés. Il a expliqué aux enquêteurs avoir « ouvert la porte avant et baissé le siège » pour accéder à la banquette arrière. Maëlys aurait donc accédé à la banquette par la porte arrière droite, mais la trace ADN elle, a été prélevée entre le volant et la portière gauche, côté conducteur.

Tous les participants du mariage au cours duquel Maëlys a disparu, ont été interrogés par la police.

Cette voiture soigneusement lavée

Le lendemain de la disparition de Maëlys, des images de vidéosurveillance d’une station de lavage où s’est rendu le suspect sont consultées par BFMTV. On y voit le suspect utiliser un très fort décapant dans le coffre, ayant pour particularité de repousser les chiens et de tromper leur odorat. L’ex-militaire de 34 ans va également longuement insister sur la portière avant côté passager.

Pour justifier ce nettoyage de fond en comble, qui a duré 2 h 15 selon le Dauphiné Libéré, Nordahl L. a déclaré aux enquêteurs qu’il comptait vendre sa voiture sous peu à une connaissance.

BFMTV a également révélé que les enquêteurs ont prélevé des eaux usées et de la graisse automobile dans la station de lavage où Nordahl L. a nettoyé son véhicule. Ces derniers seraient à la recherche de traces ADN. « On saisit tout ce que l’on peut trouver, on fait des recherches partout et il est normal que l’on fasse des recherches dans les eaux de lavage, dans des lacs, dans des endroits qui n’ont parfois rien à voir avec les faits », a déclaré Jean-Yves Coquillat, procureur de la République de Grenoble.

Ces allers-retours qui intriguent

D’après le Dauphine Libéré, le suspect a reconnu s’être absenté trois fois du mariage. L’homme aurait par ailleurs résilié une de ses deux lignes téléphoniques qui selon lui, fonctionnait mal, deux jours après la disparition de la fillette. Élément troublant pour les enquêteurs, ce second téléphone portable, qui était en mode avion aurait « borné à trois reprises, à trois horaires différents des relais téléphoniques dont la couverture géographique ne peut atteindre la salle des fêtes de Pont-de-Beauvoisin », résume le quotidien. Nordahl L. avait auparavant assuré qu’à ces instants, il se trouvait au mariage.

Son emploi du temps lors de la soirée du mariage, reconstitué par les enquêteurs, fait par ailleurs apparaître qu’il s’est absenté du mariage sur un laps de temps correspondant à l’heure estimée de la disparition.

Ces déclarations troublantes du suspect

Début octobre, L’Express a pu consulter une audition de Nordahl L. Ce dernier revient sur le déroulé de la soirée : « Quand j’étais à table et qu’elle a vu la photo de mes chiens sur mon téléphone, j’ai parlé avec cette petite. C’était la première fois que je la voyais », a-t-il assuré. Or, lors de sa première audition, l’homme n’a pas expliqué aux enquêteurs qu’il avait échangé avec la fillette, « c’est une bêtise de ma part. Sur le coup, pour moi, entendre qu’une petite a été enlevée et m’avait parlé, et que je l’avais fait monter dans ma voiture sans la forcer, ça m’a perturbé », se contente-t-il de rétorquer.

Sur son absence aux alentours de 3 h du matin, au moment même où toute la salle recherchait Maëlys, il explique être « allé à Saint-Albin chercher des produits stupéfiants ». Et concernant ses versions des faits divergeantes, là encore, l’homme a réponse à tout : « Il y avait beaucoup d’alcool, le fait de reparler, ça fait des flashs ».

Ce short taché qui disparaît

Parmi les trois allers-retours, le suspect a indiqué aux enquêteurs s’être absenté une fois, durant une heure, pour changer son short, taché de vin rouge, qu’il aurait finalement jeté à la poubelle. Depuis, le short reste introuvable.

Ces témoignages contradictoires sur sa personnalité

Dr Jekyll ou Mr Hyde ? La personnalité du suspect ne fait pas l’unanimité. Les proches de Nordahl L. ont pris publiquement la parole pour défendre. Sa mère d’abord : « On s’acharne sur lui parce qu’il faut trouver un coupable, il faut trouver quelqu’un. C’est pas lui. Il n’est pas capable de faire ça », a-t-elle confié à RTL, le 4 septembre dernier. « Je n’ai pas fait un monstre, ça n’a jamais été un monstre. Non, c’est pas un monstre. C’est un garçon gentil qui ne ferait pas de mal à personne. »

 

Pour Sven, son frère, Nordahl L. est innocent mais, « il fallait trouver un coupable », explique-t-il à France Bleu. « Il est victime d’un acharnement judiciaire et médiatique », ajoute-t-il. Un copain d’enfance parle, lui, d’un « garçon sensible », qu’il avait vu pleurer « à cause d’une histoire de cœur ».

Toutefois plusieurs ex-petites amies du suspect dépeignent un homme « manipulateur », « menteur » et « violent ». L’ex-militaire aurait eu recours aux intimidations physiques et verbales lors des ruptures amoureuses, rapporte le Dauphiné Libéré. L’une des jeunes femmes aurait confié avoir cru « vivre sa dernière heure » après avoir été emmenée par le suspect dans les bois « pour s’expliquer ». Selon France 3 Auvergne Rhône Alpes, Nordahl L. aurait également posté sur internet des vidéos de ses ébats avec ses ex-compagnes.

Du côté d’un de ses anciens employeurs, on parle d’un homme agressif, ingérable, rapporte France Bleu. L’encadrement de l’Armée, où il est resté cinq ans, l’a aussi éloigné à cause de son addiction à la drogue.

Source : Ouest-France

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