Affaire Adama Traoré : les magistrats bouclent leurs investigations sans mise en examen

1202595-prodlibe-marche-pour-adama-traoreMarche entre la gare du Nord et la place de la République à Paris en mémoire d’Adama Traoré, le 13 octobre. Photo Cyril Zannettacci

Tandis que l’instruction sur le décès du jeune homme lors de son interpellation doit être clôturée prochainement, les juges en charge de l’affaire n’ont prononcé aucune mise en examen, ce que contestent la partie civile et ses soutiens.

Les juges d’instruction s’apprêtent à enterrer l’affaire Adama Traoré. Aucune mise en examen n’a été prononcée par les magistrats à l’issue de leur enquête sur la mort de ce jeune homme, le 19 juillet 2016 dans la cour de la gendarmerie de Persan (Val d’Oise). Selon nos informations, le parquet de Paris a reçu le dossier le 14 décembre dernier. Cet avis de fin d’information a donc ouvert un délai de trois mois pendant lequel les parties peuvent formuler des demandes d’actes. Yassine Bouzrou, l’avocat de la famille d’Adama Traoré, a demandé une nouvelle audition des agents qui ont interpellé le jeune homme. Si l’instruction n’est donc pas encore terminée, cette ultime demande a désormais peu de chance de faire basculer l’enquête. Le procureur de la République doit de son côté prendre ses réquisitions dans les prochains jours.

L’essentiel de l’enquête s’est noué autour d’une succession d’expertises et de contre-expertises visant à déterminer les causes de la mort d’Adama Traoré. Dès l’annonce du décès, l’état de santé du jeune homme avait été évoqué par le procureur de la République de Pontoise en poste à l’époque. A l’issue de la première autopsie, le parquet avait déclaré que le jeune homme souffrait d’une «infection très grave touchant plusieurs organes». L’examen en question faisait pourtant seulement mention «de lésions d’allure infectieuse». Une communication mensongère qui avait contribué à jeter le doute sur les investigations.

Après un chemin judiciaire tortueux, les experts médicaux étaient cependant parvenus à s’accorder dans une synthèse rendue en septembre dernier. Cette pièce maîtresse de l’enquête affirmait formellement que l’interpellation des gendarmes n’avait pas de lien avec la mort du jeune homme. Dans leurs auditions, en juillet 2016, ces derniers décrivaient les conditions d’une interpellation particulièrement virulente qui correspondait à la technique de plaquage ventral, connue pour sa dangerosité. Mais selon le collège d’experts, lorsque Adama Traoré arrive dans l’appartement où il sera retrouvé par les gendarmes, son «pronostic vital est déjà engagé» et «[la compression thoracique] n’a pas eu de rôle dans la survenue du décès».

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Les médecins estiment qu’Adama Traoré souffrait d’une drépanocytose, une maladie du sang, ainsi que d’une sarcoïdose pulmonaire, maladie inflammatoire, «dont l’importance l’expose particulièrement à un risque d’hypoxémie [manque d’oxygène, ndlr] d’effort». C’est ce qui se produit ce jour-là selon eux. D’après leur rapport, un mécanisme fatal s’enclenche alors. Les experts assurent d’ailleurs que dans ce cas rien ne pouvait être fait pour sauver Adama Traoré : «Dans les meilleures conditions imaginables, et même lorsque l’arrêt cardio-circulatoire survient en milieu hospitalier ou en unité de soins intensifs, le pronostic décrit est le décès. La réanimation est inefficace.» Avant de clore leurs investigations, les magistrats avaient rejeté une demande de l’avocat Yassine Bouzrou qui contestait justement les conclusions de ce rapport et souhaitait une nouvelle expertise.

Source : Libération

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